mercredi 19 octobre 2016

Je suis un monstre

Si je laissais vraiment
Faire la nature...

Arrête de réfléchir !
Te complique pas la vie !
Tu penses trop !
Lâche-toi un peu !
T’en fais toujours des pataquès !

Vous voyez ce que je veux dire ?
Que vous soyez celui qui le dit
Ou celui qui le reçoit ?
Voyez-vous bien ?
Peu importe.
Non ! peu n’importe pas ! peu n’importe pas du tout !

Bref,
Si je laissais donc
Faire la nature,
Notre belle nature,
Sincère et authentique,
Vraie plus vraie que tout autre chose,
Paraît-il,
(Ce que je trouve très insultant pour la culture qui semble opposée à toute cette merveilleuse jungle qui nous habite)
Je dévorerais tout
Sur mon passage.
J’engloutirais
Engouffrerais
Enfournerais
Dévorerais
Dévasterais.
Je serais une ogresse
Une folle déchiqueteuse,
Une égorgeuse de tout ce qui se bouffe
Et se digère,
Une sorcière qui ferait tout bouillir,
Pourvu qu’elle puisse enfourner.
Pas une gentille ogresse verte à couettes
Ou une sorcière qui met trois mômes à la broche.
Je serais une furie de la dévoration.

Meuh enfin non tu ne ferais jamais ça !
On te donne trois graines et t’es contente
Alors dis pas de bêtises !
(Connard va !)

Et si, je sais,
Je sais,
Pas parce que mon cerveau malade
De bouffe
Le dit,
Halluciné.
Je sais
Parce que mon corps le dit.
Je sens que je suis
Entièrement prête
À engloutir
Sans rien choisir,
Sans rien laisser,
Sans rien abandonner.
Tout finir jusqu’a la dernière miette,
Comme sortie d’Auschwitz
Et narguée affamée
Squelettique.
Je sais que mon corps
Peut avaler
Beaucoup de couleuvres
Et beaucoup de tout,
Des heures durant,
Sans s’arrêter,
Manger,
Manger,
Quoi qu’il en coûte.
Quoi que je sache
Exactement ce qu’il m’en coûtera
Très cher,
Dans très peu de temps.

Je sais.
D’autres savent
Ces monstres qu’ils vivent,
Qui se tortillent à l’intérieur,
Qu’on tient en laisse bien serré
La journée
Et qui explose de rire et de liberté
Le soir.
Ce n’est pas de la douleur quotidienne.
Enfin si !
Quotidienne, tous les jours.
C’est la douleur d’être fou
Quelque part.
D’être sans aucune limite
Quelque part.
D’être délirant
Quelque part.
Et de n’être qu’une marionnette
Dépossédée.

Qui a son monstre à lui ?
Qui qui ?
Vous êtes là ?
Qui le connaît ?
Qui le déteste ?
Qui le craint plus que tout ?
Qui voudrait ne plus exister quand il tire les ficelles ?
Qui sait, malgré les apparences ?
Qui sent le monstre tordu et taré pousser les membres bien sages ?
Qui sent la bête, la plus stratégique ?

Ma nature est aussi ce monstre.
Alors, non !
Je ne laisserai pas faire
Sans les mains
Youplaboum.
Parce qu’il faut
Laisser hurler le monstre
Le regarder
Et l’ecouter,
Le respecter,
Y parvenir,
Avant de lâcher le leste.
Et c’est l’affaire d’une vie.
Ou d plusieurs.

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