Elle s'avance devant le miroir. Elle reste parfaitement immobile. Elle peut rester parfaitement immobile, plusieurs longues minutes. Elle n'est alors plus vraiment humaine. Elle est bien mieux que cela. Elle est bien solide qu'un tendre humain. Elle est de roc et de croc.
Korka relève les babines, range les mimines,
sort les canines.
et sourit.
Finalement.
Pas trop puisque les molaires font diversion. Et elle veut que les dents pointent au bord des lèvres, tout juste à côté de la chair rose des lèvres. Elle les couperait ses lèvres si c'était possible. Si ce n'était pas le signe que tout est fini. Elle trouve les piercings et tatouages bien dérisoires. Cela semble suffire à la plupart, contenter leur âme de vampire. Vampires de pacotille. Vampires du dimanche. Elle ne rêve pas d'être un vampire, ne s'habille pas en noir à dentelle, en mini jupe et énormes Doc Martens. Elle ne met pas de rouge à lèvre violet, celui qui fait froid dans la piscine.
Korka est plus stratégique que cela. Elle aime le rose et toutes les couleurs. Elle ne se gêne pas pour les décliner. Et ça fait plaisir aux Parisiens de voir une jeune femme en couleurs. C'est avant d'avoir bien regardé les pupilles tronçonneuses. ils s'émerveillent. Parfois se retournent sur elle. Elle n'hésite pas à en faire trop. Elle s'amuse. Mais ceux qui s'attardent vraiment, qui remontent jusqu'aux yeux, ne tournent pas autour pour s'exclamer sur son énorme touffe de frisettes noires, oui, elle n'y est pour rien, ceux-là sont de rares spécimens. Des spécimens qui existèrent sans doute. Dont parfois elle aimerait davantage de preuves. elle en a par éclairs; c'est peu; Il faut s'en nourrir et attendre la prochaine fois. Peut-être que ses congénères sentent qu'il vaut mieux, pour la conservation de l'espèce, ne pas fixer cet individu-là et sourire de ses belles couleurs apparentes.
Korka, ne mange jamais de viande.
Korka, passe son temps chez le dentiste.
Korka, rit de cette ironie.
Korka a les dents blanches comme la lune dans ses plus grandes clartés.
Korka range ses canines chez le dentiste. Il ne se doute de rien. Il dit seulement qu'elle a de belles dents, bien blanches, bien redressées. Elle entend qu'il lui parle de fierté. Elle est d'accord avec lui. Elle hoche la tête. Ce sont les crocs qui font la bête.
Plus tard, beaucoup plus tard, quand elle sera vieille et pourra être piquante du menton et des mots, elle aura un dentier. Elle demandera son modèle personnel. Elle mettra de l'argent de côté pour avoir le plus beau modèle, le plus improbable peut-être, le plus pointu de l'histoire. Elle ne veut aucune courbe, aucune rondeur. Les dents sont faites pour déchirer. D'où, devant son miroir, cette question sur l'anatomie humaine qui la turlupine relativement : les dents faites pour déchirer, croquer, craquer tous les os et codes, juste derrière les douces et molles lèvres. Précisément pour contenir les ardeurs des croqueurs, des individus trop entreprenants, trop agressifs ? Précisément parce qu'on se blesse soi-même avant de blesser l'autre à croquer et qu'il faut supporter la douleur ? Tout le monde ne supporte pas la douleur. Presque personne ne supporte la vraie douleur. Rien de plus normal, me direz-vous puisque c'est l'alarme du corps. Pourtant Korka a une autre théorie sur la douleur.
Non, Korka n'est pas une sado-maso de base, qu'on trouve dans les boîtes spécialisées de la capitale. Elle pense que la douleur a des effets aussi autres que Aïe Mama mia ! Elle pense que la douleur fait penser. Qu'elle éclaire les lanternes mortes avant même la naissance. Celles que les gènes ont décidé de ne pas utiliser, faute d'énergie et de place dans le labyrinthe. Celles qui ne s'allumeront jamais d'elles-mêmes sauf sous une pression quelconque, la plus aisée à mettre en œuvre étant la douleur ou, oui peut-être aussi, l'angoisse. A mettre dans le même sac, plus ou moins, pas tout à fait. Korka est aussi pointilleuse que ses crocs. La douleur est le catalyseur de toute pensée. C'est ainsi qu'elle entend l'ascèse ou les drôles de conduites de certains.
Korka ne se scarifie pas.
Korka ne mord pas.
Korka reste sage.
Comme une image.
Korka fait dans la tête.
Peut-être un peu trop dans la tête.
Elle lit à en voir double, même avec tout l'attirail de confort. (Pas de maso débile, nous sommes d'accord). Elle lit jusqu'à en avoir la nausée. Pour être sûre d'avoir atteint la limite, le bord qui force sans aucune concession à penser ce qu'on est et pourquoi tout ça. Ce n'est pas qu'elle veut répondre à ces questions tout de suite ou qu'elle trouve cool et classe de se les poser, de se mettre en scène en sombre intellectuelle torturée. Quoique. Bref, elle veut le bord, juste avant le précipice pour s'enfoncer dans le sol, le sien et non voleter comme une pauvrette superficielle au-dessus du monde qui l'accueille.
Elle lit à en voir double.
Elle court (pas tout dans la tête tout de même, c'est une bonne chose) à s'en faire tourner les neurones.
Elle voudrait se battre, frapper de toutes ses forces. mais justement elle n'a jamais eu la force d'aller demander à se battre. Se battre pour survivre, là n'est pas la question. Tout le monde s'y colle. Se battre avec les poings et encore plus avec les pieds. Frapper de toute sa jambe dans les règles du jeu. Avoir le droit de frapper. Avoir le droit de faire mal. Accepter le retour et sourire de s'être laissée prendre. Mais c'est une rêverie que celle-là. Korka la grande croqueuse n'a jamais eu les couilles d'aller enfiler des gants et d'apprendre à cogner.
Ce que Korka fait le mieux est moins noble mais elle s'y plaît. Elle y trouve son compte. Et la morale aux chiottes ! Korka n'a strictement aucune pitié pour les hâbleurs et autres manipulateurs. Fiers. sans complexes. Sans respect des fragilités de ses pairs. Elle les hait de toute son âme et les égorgerait si elle était une psychopathe avérée. Ce que bien heureusement pour eux, elle n'est pas.
Korka n'a pas l'air de ce qu'elle est et peut. Elle le sait et laisse s'approcher les imprudents qui ne prennent pas la précaution de vérifier les yeux. Elle sourit, doucement. Ils y croient bien sûr. Surtout les enjôleurs. Ils se disent qu'elle est déjà gagnée à leur cause. Qu'il n'y aura même aucun combat à mener; Que peut-être, ils s'ennuieront très vite avec cette jeune femme-là. Qu'elle ne se défendra sans doute pas. Ou alors en minaudant, avec le sourire alors même qu'ils la maltraitent déjà. "Ils" parce que le français y oblige. Mais "ils" c'est ils et elles, bien entendu. Aucun sexisme à opérer sur ce point. Les femmes ne sont pas plus douces ou généreuses que les hommes. Elles ont seulement appris à vivre avec l'extrême frustration d'avoir un trou à la place d'un membre. Ce ne sont pas des conneries de psychanalystes. Elle, Korka, peut jurer des heures entre ses dents, encore plus face au miroir, à penser à cette injustice que chacun trouve "naturelle". C'est la nature. Putain de conneries pour emprisonner la rage ! Donc les femmes apprennent sans en avoir le choix à contourner les problèmes. Juste une question de méthode. Certainement pas d'intention. Korka est catégorique sur ce point.
Revenons à nos moutons. Korka les laisse commencer leur tour de piste et elle est une sacrément calme spectatrice; pas un poil ne bouge. Elle est comme une poupée assise au premier rang, joliment installée. Comme il faut. Exactement comme il faut. Le numéro peut être plus ou moins long. Plus ou moins fastidieux. Certains pourraient faire rire tellement ils se ridiculisent. Mais la nausée reprend vite le dessus. Il vaut mieux ne pas bouger de son siège. Elle attend jusqu'au point final. L'artiste salue. Elle est seule bien sûr à l'admirer. Elle ne bouge toujours pas. Aucun bruit ne surgit. Rien ne se passe. Au moment où l'on espère le plus d'émotions, le silence est noir. Korka a cessé de sourire même si c'est sans doute l'instant où elle l'aimerait le plus. Elle se rattrapera ensuite. Elle se tient droite. Elle regarde l'artiste dans les yeux. Et lui, qui avait omis cet élément crucial, se décompose, pâlit, tente de garder contenance, recommence le numéro parfois, les plus pathétiques entre nous. Tout son corps et son esprit sont au fond de ses chaussures trop voyantes.
Korka se lève, déplisse sa robe, sa jupe, s'ébroue. Elle baisse la tête pour la première fois. Dans un élan de sublime compassion, elle relève son visage vers celui ou celle qui avait décidé de l'attacher. Elle lui offre un magnifique sourire aux canines acérées. Mais elle, lui, ne voient que la blancheur incandescente dans ce silence.et le dos qui disparaît par la sortie principale. Sans peur, sans honte, sans douleur. Dans la plus grande tranquillité. L'on connaît Korka et l'on pourra parler de jouissance. Mais c'est une chose qui ne se dit pas. Qu'elle ne dit pas. Qu'ils ne perçoivent pas, quoi qu'il en soit.
Pas d'applaudissements.
Pas de rires.
Aucune excitation.
La fin du monde.
Korka a assisté une fois encore à une fin du monde. Elle l'a laissé s'épanouir. C'est une toute petite fin du monde. Demain l'univers reprendra son cours. Elle ne s'en fait pas. Mais elle n'a pas cédé.
Elle,
n'a pas,
cédé.
Elle a rabattu un caquet parmi des millions.
C'est mieux que rien.
Ni le premier ni le dernier.
Elle,
n'a pas,
cédé.
Elle a un trou mais elle a des couilles. On ne doit pas dire ça ! Ooooh enfin Kor ! ce que tu peux être inélégante ! retiens-toi un peu !
elle ne fait que cela de se retenir la Kor. Sinon, un deuxième Tchernobyl. Elle trouve ça dur de toujours garder ça dans ses tripes. Elle le fait sortir par les yeux. Là où peu le soupçonne. Relativement satisfaisant. Compromis acceptable. Parfois, cela ne lui suffit plus. Alors, ou elle s'enferme à double tour, parce qu'elle a peur de toute effraction, et qu'elle doit fulminer seule le pus fort possible; elle s'agite dans tous les sens pendant tout le temps qu'il faut. Elle crie dans son oreiller. Elle injurie tous ceux qu'elle déteste ou aime trop. Elle est prête à se taper la tête contre les murs. l'oreiller pare au plus violent. Il a toujours jouer son rôle à merveille.
Korka éprouve une grande reconnaissance aux oreillers; Aux siens en particulier. Ils savent tout faire.
Quand elle ne s'enferme pas, elle sort et elle marche et court et sue, des heures dans toutes les rues, tous les quartiers, ou en rond. Ca lui est égal. Elle ne doit pas s'arrêter. Sauf pour un café, qui est bien entendu la dernière boisson conseillée dans son état. Elle veut que les idées s'embrouillent jusqu'à sentir l'existence à l'état pur. C'est angoissant. moins que de croire qu'on va mourir de rage tellement on a de merde à l'intérieur.
Dans ces cas-là, le miroir et les crocs ont beau jeu, ils ne sont d'aucune utilité. Nous en sommes à un autre niveau.
A l'université, Korka est discrète. Pas discrète timide. Discrète laissez-moi en paix. Elle travaille vite et bien. ce qu'elle fait est le plus souvent appréciée par les enseignants. Elle en jubile sans rien en laisser voir. Elle voit qu'elle suscite même parfois leur admiration. Elle sait qu'elle est une tête. Elle sait que tout s'organise et s'écrit comme elle le veut. Tout glisse. pas toujours. Pas les jours de règles et d'angoisses. Tous les autres oui. Elle est aussi têtue. Elle cherchera jusqu'à trouver le fin mot de l'histoire. C'est sa force. Comme sa faille. Elle s'y perdra ?
Elle cherchera tout au long de sa vie. parce qu'elle sait qu'elle ne pourra se fier à aucune solution. Elle ne croira à rien, ou alors momentanément. Elle sait que c'est ainsi que vogue l'humanité. Elle avancera dans l'organisation, dans l'éclaircissement de certaines obscurités. Elle ne prétend pas se saisir des bons outils et de les appliquer à tout bout de champ. Elle pense que chaque pot a son couvercle. Et que c'est encore une frustration bien dégueulasse que fait la nature à l'homme. Peut-être le God là-haut qui joue au xylo.
Elle n'arrive pas à s'y faire. Elle fait rire, avec bienveillance, son entourage, parce qu'elle trépigne de voir toutes ces fausses solutions portées aux nues et que elle et ses comparses s'emmêlent avec leurs doutes. Elle n'arrive pas à admettre son inquiétude et celle de ses semblables, alors que d'autres pourraient se passer d'oreillers pour dormir mais pas d'œillères pour vivre, apaisés. Elle leur en veut de leur sérénité. Elle veut les faire basculer. Les faire perdre l'équilibre. les voir sentir que leur monde en une seconde s'effondre et qu'ils ne sont rien, une infime poussière qui n'a pas de sens. Elle sait que le canyon et les précipices lui appartiennent. Elle sait qu'ils peuvent s'arrondir parfois et finir par la bercer. Aussi surprenant que cela paraisse au vu de l'horreur qu'ils suscitent chez une vertigineuse. Elle continue de vouloir réveiller les yeux morts et les clowns lubriques de leur importance menteuse.
Korka n'est pas une grande femme élancée aux boucles noires lustrées comme dans les publicités. Ce n'est pas une tigresse. Elle n'est pas fatale. Elle se colore et elle noircit des pages et les clowns stupides. Korka est comme beaucoup de gens. Elle aime des choses. Elle aime ses livres. Elle aime sa mère. Elle aime son adorable frère. Elle aime ses amis sardoniques ou silencieux. Elle aime l'art. Elle aime les oreillers.
Korka n'aime pas qu'on se foute de sa gueule.
Korka est impitoyable avec les grandes gueules.
Korka n'hésitera pas à rugir et retrousser les babines : sa gueule est de celle qu'on ne voit qu'une fois.
Korka ne se scarifie pas.
Korka ne mord pas.
Korka reste sage.
Comme une image.
Korka fait dans la tête.
Peut-être un peu trop dans la tête.
Elle lit à en voir double, même avec tout l'attirail de confort. (Pas de maso débile, nous sommes d'accord). Elle lit jusqu'à en avoir la nausée. Pour être sûre d'avoir atteint la limite, le bord qui force sans aucune concession à penser ce qu'on est et pourquoi tout ça. Ce n'est pas qu'elle veut répondre à ces questions tout de suite ou qu'elle trouve cool et classe de se les poser, de se mettre en scène en sombre intellectuelle torturée. Quoique. Bref, elle veut le bord, juste avant le précipice pour s'enfoncer dans le sol, le sien et non voleter comme une pauvrette superficielle au-dessus du monde qui l'accueille.
Elle lit à en voir double.
Elle court (pas tout dans la tête tout de même, c'est une bonne chose) à s'en faire tourner les neurones.
Elle voudrait se battre, frapper de toutes ses forces. mais justement elle n'a jamais eu la force d'aller demander à se battre. Se battre pour survivre, là n'est pas la question. Tout le monde s'y colle. Se battre avec les poings et encore plus avec les pieds. Frapper de toute sa jambe dans les règles du jeu. Avoir le droit de frapper. Avoir le droit de faire mal. Accepter le retour et sourire de s'être laissée prendre. Mais c'est une rêverie que celle-là. Korka la grande croqueuse n'a jamais eu les couilles d'aller enfiler des gants et d'apprendre à cogner.
Ce que Korka fait le mieux est moins noble mais elle s'y plaît. Elle y trouve son compte. Et la morale aux chiottes ! Korka n'a strictement aucune pitié pour les hâbleurs et autres manipulateurs. Fiers. sans complexes. Sans respect des fragilités de ses pairs. Elle les hait de toute son âme et les égorgerait si elle était une psychopathe avérée. Ce que bien heureusement pour eux, elle n'est pas.
Korka n'a pas l'air de ce qu'elle est et peut. Elle le sait et laisse s'approcher les imprudents qui ne prennent pas la précaution de vérifier les yeux. Elle sourit, doucement. Ils y croient bien sûr. Surtout les enjôleurs. Ils se disent qu'elle est déjà gagnée à leur cause. Qu'il n'y aura même aucun combat à mener; Que peut-être, ils s'ennuieront très vite avec cette jeune femme-là. Qu'elle ne se défendra sans doute pas. Ou alors en minaudant, avec le sourire alors même qu'ils la maltraitent déjà. "Ils" parce que le français y oblige. Mais "ils" c'est ils et elles, bien entendu. Aucun sexisme à opérer sur ce point. Les femmes ne sont pas plus douces ou généreuses que les hommes. Elles ont seulement appris à vivre avec l'extrême frustration d'avoir un trou à la place d'un membre. Ce ne sont pas des conneries de psychanalystes. Elle, Korka, peut jurer des heures entre ses dents, encore plus face au miroir, à penser à cette injustice que chacun trouve "naturelle". C'est la nature. Putain de conneries pour emprisonner la rage ! Donc les femmes apprennent sans en avoir le choix à contourner les problèmes. Juste une question de méthode. Certainement pas d'intention. Korka est catégorique sur ce point.
Revenons à nos moutons. Korka les laisse commencer leur tour de piste et elle est une sacrément calme spectatrice; pas un poil ne bouge. Elle est comme une poupée assise au premier rang, joliment installée. Comme il faut. Exactement comme il faut. Le numéro peut être plus ou moins long. Plus ou moins fastidieux. Certains pourraient faire rire tellement ils se ridiculisent. Mais la nausée reprend vite le dessus. Il vaut mieux ne pas bouger de son siège. Elle attend jusqu'au point final. L'artiste salue. Elle est seule bien sûr à l'admirer. Elle ne bouge toujours pas. Aucun bruit ne surgit. Rien ne se passe. Au moment où l'on espère le plus d'émotions, le silence est noir. Korka a cessé de sourire même si c'est sans doute l'instant où elle l'aimerait le plus. Elle se rattrapera ensuite. Elle se tient droite. Elle regarde l'artiste dans les yeux. Et lui, qui avait omis cet élément crucial, se décompose, pâlit, tente de garder contenance, recommence le numéro parfois, les plus pathétiques entre nous. Tout son corps et son esprit sont au fond de ses chaussures trop voyantes.
Korka se lève, déplisse sa robe, sa jupe, s'ébroue. Elle baisse la tête pour la première fois. Dans un élan de sublime compassion, elle relève son visage vers celui ou celle qui avait décidé de l'attacher. Elle lui offre un magnifique sourire aux canines acérées. Mais elle, lui, ne voient que la blancheur incandescente dans ce silence.et le dos qui disparaît par la sortie principale. Sans peur, sans honte, sans douleur. Dans la plus grande tranquillité. L'on connaît Korka et l'on pourra parler de jouissance. Mais c'est une chose qui ne se dit pas. Qu'elle ne dit pas. Qu'ils ne perçoivent pas, quoi qu'il en soit.
Pas d'applaudissements.
Pas de rires.
Aucune excitation.
La fin du monde.
Korka a assisté une fois encore à une fin du monde. Elle l'a laissé s'épanouir. C'est une toute petite fin du monde. Demain l'univers reprendra son cours. Elle ne s'en fait pas. Mais elle n'a pas cédé.
Elle,
n'a pas,
cédé.
Elle a rabattu un caquet parmi des millions.
C'est mieux que rien.
Ni le premier ni le dernier.
Elle,
n'a pas,
cédé.
Elle a un trou mais elle a des couilles. On ne doit pas dire ça ! Ooooh enfin Kor ! ce que tu peux être inélégante ! retiens-toi un peu !
elle ne fait que cela de se retenir la Kor. Sinon, un deuxième Tchernobyl. Elle trouve ça dur de toujours garder ça dans ses tripes. Elle le fait sortir par les yeux. Là où peu le soupçonne. Relativement satisfaisant. Compromis acceptable. Parfois, cela ne lui suffit plus. Alors, ou elle s'enferme à double tour, parce qu'elle a peur de toute effraction, et qu'elle doit fulminer seule le pus fort possible; elle s'agite dans tous les sens pendant tout le temps qu'il faut. Elle crie dans son oreiller. Elle injurie tous ceux qu'elle déteste ou aime trop. Elle est prête à se taper la tête contre les murs. l'oreiller pare au plus violent. Il a toujours jouer son rôle à merveille.
Korka éprouve une grande reconnaissance aux oreillers; Aux siens en particulier. Ils savent tout faire.
Quand elle ne s'enferme pas, elle sort et elle marche et court et sue, des heures dans toutes les rues, tous les quartiers, ou en rond. Ca lui est égal. Elle ne doit pas s'arrêter. Sauf pour un café, qui est bien entendu la dernière boisson conseillée dans son état. Elle veut que les idées s'embrouillent jusqu'à sentir l'existence à l'état pur. C'est angoissant. moins que de croire qu'on va mourir de rage tellement on a de merde à l'intérieur.
Dans ces cas-là, le miroir et les crocs ont beau jeu, ils ne sont d'aucune utilité. Nous en sommes à un autre niveau.
A l'université, Korka est discrète. Pas discrète timide. Discrète laissez-moi en paix. Elle travaille vite et bien. ce qu'elle fait est le plus souvent appréciée par les enseignants. Elle en jubile sans rien en laisser voir. Elle voit qu'elle suscite même parfois leur admiration. Elle sait qu'elle est une tête. Elle sait que tout s'organise et s'écrit comme elle le veut. Tout glisse. pas toujours. Pas les jours de règles et d'angoisses. Tous les autres oui. Elle est aussi têtue. Elle cherchera jusqu'à trouver le fin mot de l'histoire. C'est sa force. Comme sa faille. Elle s'y perdra ?
Elle cherchera tout au long de sa vie. parce qu'elle sait qu'elle ne pourra se fier à aucune solution. Elle ne croira à rien, ou alors momentanément. Elle sait que c'est ainsi que vogue l'humanité. Elle avancera dans l'organisation, dans l'éclaircissement de certaines obscurités. Elle ne prétend pas se saisir des bons outils et de les appliquer à tout bout de champ. Elle pense que chaque pot a son couvercle. Et que c'est encore une frustration bien dégueulasse que fait la nature à l'homme. Peut-être le God là-haut qui joue au xylo.
Elle n'arrive pas à s'y faire. Elle fait rire, avec bienveillance, son entourage, parce qu'elle trépigne de voir toutes ces fausses solutions portées aux nues et que elle et ses comparses s'emmêlent avec leurs doutes. Elle n'arrive pas à admettre son inquiétude et celle de ses semblables, alors que d'autres pourraient se passer d'oreillers pour dormir mais pas d'œillères pour vivre, apaisés. Elle leur en veut de leur sérénité. Elle veut les faire basculer. Les faire perdre l'équilibre. les voir sentir que leur monde en une seconde s'effondre et qu'ils ne sont rien, une infime poussière qui n'a pas de sens. Elle sait que le canyon et les précipices lui appartiennent. Elle sait qu'ils peuvent s'arrondir parfois et finir par la bercer. Aussi surprenant que cela paraisse au vu de l'horreur qu'ils suscitent chez une vertigineuse. Elle continue de vouloir réveiller les yeux morts et les clowns lubriques de leur importance menteuse.
Korka n'est pas une grande femme élancée aux boucles noires lustrées comme dans les publicités. Ce n'est pas une tigresse. Elle n'est pas fatale. Elle se colore et elle noircit des pages et les clowns stupides. Korka est comme beaucoup de gens. Elle aime des choses. Elle aime ses livres. Elle aime sa mère. Elle aime son adorable frère. Elle aime ses amis sardoniques ou silencieux. Elle aime l'art. Elle aime les oreillers.
Korka n'aime pas qu'on se foute de sa gueule.
Korka est impitoyable avec les grandes gueules.
Korka n'hésitera pas à rugir et retrousser les babines : sa gueule est de celle qu'on ne voit qu'une fois.
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