On les chasse, on les insulte,
ces oiseaux noirs.
Bah ! le corbac !
On en dit quoi :
sale bête de mauvaise augure,
va-t-en roter ailleurs,
laisse-nous notre pain et nos enfants,
voleur d’enfants,
vieux misanthrope éraillé.
Bref, on ne le connaît que comme ça
le cuicui,
et même j’en soupçonnerais d’aucuns de ne pas le considérer comme un oiseau.
Au même titre que les vautours ou les poules et les ptérodactyles
qui sont bien d’autres choses qu’un petit cuicui mimi.
Eh bien, lui il en bave de cette réputation.
Il n’est pas beau, il n’est pas fier, il n’est pas fort.
Il effraye, repousse, du moins tient à distance.
Les petits d’hommes s’éloignent instinctivement.
Il n’est pas sans se chercher de la compagnie pourtant.
Mais pour ce faire, il ouvre le bec et veut chanter : ça casse les oreilles, presque même les siennes.
On ne s’y habitue pas.
Alors désormais, il se tait.
On le traite de morbide et désespoir.
C’est vrai qu’il n’est pas clair ; suspicieux prêt à l’attaque.
Avec sa voix d’outre-tombe.
Et il n’a aucune intention de combattre, en fait.
Il en prend l’air parce qu’il a peur.
Il sait bien qu’on lui jette des pierres.
Personne n’y comprend rien. Peut-être sa compagne qui ne doit pas être loin de subir le même sort.
Elle est corbeau aussi ?
Non pas vraiment
ni corbeau ni corbelle
Mais aussi sombre exclue.
Elle, elle le sait, elle s’en est approché ; il est brillant de près, les plumes parfaites, sans taches, parfaitement en ordre, le corps solide, les yeux un peu tristes.
Il le sait tout cela.
Mais tant pis. Il se prend au jeu du plus méchant et il brandit sa somptueuse noirceur, il en fait sa valeur.
Il n’a pas le choix, sinon il ne vaut rien.
On continue de s’écarter sur son passage
même ses petits à lui ne lui tendent pas les bras.
Au fond, ils ont raison, il n’arrive pas à les aimer.
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