Un lendemain gueule de bois pour la minus rouquine. Elle ne prendra jamais un jour de RTT pour ça. C’est une question de dignité. Elle ne se laissera pas faire. Les vingt-huitards ne la feront pas céder.
Jamais.
Le matin des 29, elle accuse le coup, sans aucun doute. On lui demande souvent si elle n’a pas fait un peu trop la fête par hasard. Elle sourit mystérieusement. C’est en tout cas ce que beaucoup aiment à voir. Elle sourit ironiquement en réalité tellement elle n’a pas fait la fête hier soir. Enfin, les diables se sont bien amusés chez elle, mais ce n’est pas vraiment elle-même vraie. Il y en a bien auxquels elle ne pourra pas cacher grand-chose : Patrick le premier. Elle ne sait pas si ça lui fait plaisir ou déplaisir.
Avant cette étape du grand dehors, elle va procéder à toute la démarche de préparation post-28. La Loi prescrit le déroulement des événements. C’est pratique et confortable. Elle se lève un peu plus tôt parce qu’il y a des choses à faire, dans l’ordre et avec correction. Elle aime ce moment. Même s’il fait encore nuit, même si elle est la seule à être debout. Surtout parce qu’elle est la seule à être debout. Elle est tranquille pour s’organiser, personne à qui penser, personne à retenir loin d’elle. Tout le monde est mort pour encore une bonne heure. Sauf les boulangers. Mais ils travaillent. Ils s’en fichent d’elle. Et puis, elle n’en connaît aucun.
Elle va encore une fois s’étirer et ouvrir son corps crispé toute la veille. La nuit a nécessairement été mauvaise et c’est une joie que de se déplier. Parce qu’elle s’est enroulée sous les draps toute la nuit bien entendu. Entre deux spasmes. Elle a spasmé pendant 8h. C’est fatigant et agaçant. Ce serait pire sans les étirements des 3h. Heureusement, elle a ses stratégies désormais. Et la Loi, son pilier. Elle devrait dire ses piliers, avec un seul, elle ne serait pas bien avancée. Mais ça sonne mieux au singulier. Et c’est plus facile à adorer comme ça. Partager ses vœux, c’est trop dur. Elle a été élevée dans le monothéisme et elle ne peut pas se change comme ça. Non pas qu’elle y soit réfractaire. Ca lui aurait certainement fait du bien de changer d’air et de principes. Mais elle a été construite en monostyle, ce serait trop chamboulement que de se revenir à cette base-là. Avec la folie déclarée, bien sûr elle est retournée très loin en arrière même avant la naissance, mais tout n’était pas à refaire. Elle visitait ce qu’elle avait perdu de vue. En décalé mais c’était obligé. Elle n’a pas pu s’y soustraire. Elle ne regrette pas ça. Bien au contraire. Même s’il lui manquait un guide qualifié. Elle n’a pas tout compris à l’expo, la sienne pourtant. Mais ce qui nous appartient s’appartient en soi d’abord, en auto-tourbillon, et elle n’a pas pu le tenir en main. La scénographie lui a sans doute échappé. Elle en comprend des flash a posteriori, maintenant, depuis peu. Pourtant, le pèlerinage date bien de dix grandes années. Il a fallu tout ce temps. Finalement, le vrai changement, c’est maintenant, dans les 30. les 20, c’est plutôt vertige et vomissures, la tête en bas, ca donne rien. Démesuré. Il paraît qu’il faut en passer par là. Elle continue de se demander. Enfin, elle le répètera toujours, rien à regretter. Presque rien. Peut-être certaines bagarres ? Peut-être certaines haines trop longues ? Peut-être quelques plaquettes de chocolat ? Et puis non ! pas ça ! Mais peut-être quelques coups de cutter ?
A chacun sa jeunesse.
Les 30 ans, c’est l’occasion pour elle de tout refaire comme elle le souhaite vraiment, comme elle le décide elle-même. Pas exactement les même choses mais c’est pratique ces décennies successives. On a plein de chances renouvelées.
Après les étirements, elle s’ébroue. Elle ne le montre ni dit à personne personne. Même la mère n’en sait rien. Même la tante non plus. La Mémé, elle, s’en fout. Elle est au-dessus de ça. Leur condition, à elles trois femmes élues, est sa préoccupation, leur existence et leur beauté. Alors, connaître son emploi du temps et ce qu’elle fait de ses pattes, elle s’en tamponne. Tant qu’elle n’en sait rien du moins. Si cela lui venait aux oreilles ou autre, elle aurait sans doute son mot à dire. Elle a toujours un mot à dire, même si le sujet est un inconnu.
Elle s’ébroue et c’est merveilleusement agréable. Ce n’est pas qu’elle aime à prononcer ce genre de termes d’aïeule émue bourrée, mais c’est la sensation à ce moment-là. Elle n’y peut rien. Elle ne trouve pas d’autres qualificatifs. Rien ne convient comme celui-là. Elle en prend son parti, et tant pis. Si c’est du bon, on profite et on n’attend pas d’assentiment. D’ailleurs, elle ne voit pas qu’on l’autorise ou félicite à s’ébrouer. C’est tout de même non conforme. Comme tellement d’autres choses qu’elle dit et fait. Après, toute la subtilité réside dans non-conforme et indécent. Sont indécentes pour elle de nombreux gestes conformes et vice-versa. Mais elle sait qu’elle a un autre genre de cerveau que ses pairs.
Elle a toujours trouvé étranges « ces pairs ». : elle les sent plutôt tiers. Mais ce n’est pas comme ça qu’on dit ou pense.
La douche attendra bien 2 bonnes heures.
Tout une épopée à accomplir auparavant.
Prochain chapitre, Messieurs Dames lectriteurs.
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