C'est
une gosse.
Elle
a des seins comme des melons
mais
elle suce son pouce
pour
s'endormir.
Elle
parle comme un ministre
puis
pleure de ne pas avoir le joujou
qu'elle
avait capricé.
C'est
une gosse.
Pas
voter Mademoiselle !
Pas
conduire Mademoiselle !
La
société lui dit qu'elle est encore
petite
et linotte.
Trop
petite,
trop
linotte.
Pourtant
c'est elle qui dit,
sans
manière
sans
colère :
« Les
mecs me traitent de pute ?
Ils
peuvent.
Ca
m'est égal.
Je
sais moi qui je suis.
Et
puis au fond,
qui
sont les putes dans l'affaire ?
Moi
et mon plaisir ?
ou
eux qui font tourner les filles ? »
La
conclusion,
implacable
tombe :
« C'est
eux les putes.»
La
plus paradoxale,
la
plus révolutionnaire,
de
toutes les phrases que j'ai
retenues
de ma vie.
J'ai
ri.
Et
je l'ai regardée,
la
gosse,
la
sacrée gosse qui a
osé
penser
le monde à l'envers.
Elle
a pris le sablier.
Et
d'un coup,
l'a
retourné
sans
crier gare.
Elle
a fait marcher
les
gens sur la tête.
Sur
le pas de la porte,
elle
a hésité et puis dit
s'adressant
comme à la poignée
qu'elle
tenait dans la main :
«c'est
quoi en vrai une pute ? »
La
société dit d'elle :
« Elle
est trop petiote.
Elle
ne sait pas penser. »
Et
aussi :
«Ces
jeunes qui coûtent si cher au contribuable...
Quelle
tristesse...»
Ou
pire :
« C'est moche... »
« C'est moche... »
Sauf
qu'elle,
a
pensé plus loin que
tous
les horizons qu'on
offre
à
ruminer
ou
croire
découvrir,
et
qui s'autorisent
en
maison bonne famille.
Elle
a fait sauter
tous
les gonds,
elle
a payé pour ça
et
calmement un jour,
a
demandé si
celui
qui dans l'affaire
se
manquerait le plus de
respect
ne
serait pas
plutôt
couillu
que
mamelue.
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