C'est
peut-être finalement Litchi qui lui plaît le plus, le premier venu
à l'esprit. Cet peut-être celui qui lui ressemble le plus, au fond.
Ce n'es pourtant pas celui qui la satisfait vraiment, parce qu'elle
ne veut pas être ce qu'elle est au fond. Pas encore. Il n'est pas
temps pour elle de l'admettre. Elle n'aime pas, pas du tout ce
qu'elle se sait être au find, ou croit être. Tout cela est d'un
flou désespérant. Elle ne s'y attarde plus, elle avance vers
l'Autre, l'Inconnu, elle va oser, elle va se jeter du haut de la
falaise, comme une légumescente bien digne de ce nom, sans peur,
brutalement, risquant le tout pur le tout. Elle s'est muée en
non-Patate, garçon manqué enfin. Survie putain ! Elle se sent
manquée, c'est ça, manquée et manquer (d'où Messieurs Dames
l'importance notoire de l'orthographe et de son sens véritable. Même
si nous serions d'autant plus finauds si nous n'avions as besoin
d'elle pour intuitionner le sens, mais cela...). Elle pourrait se
nommer Litchi, un ou une, ni l'un ni l'autre, un peu des deux. Elle
pourrit mais, là elle veut être plus forte que ça, même si e
n'est que face à elle-même, toute seule, dans sa piaule en bordel.
Elle s'en fout, elle a envie comme rien d'autre de s'en foutre au
dernier degré, de s'en branler absolument. Elle pourrait s'appeler
comme un balaise, un gros plein de muscles qui n'a rien à craindre
de la force des autres et qui ne pense pas vraiment plus loin que
cela, un Pitaya, Fruit du Dragon, à pics verts, rouge gros, étrange,
on ne s'en approche pas, on ne connaît pas. Elle rajouterait bien un
petit K, Pitayak pour piquer davantage, toujours plus. Elle ne sent
pas de limites à ça. Elle veut cracher du feu, elle veut être
couillue comme ça. Elle devient vulgaire, elle devient sombre, elle
ose trancher dans le vif : Pitayak. Qu'on se moque et elle
passera son chemin parce qu'elle sait que c'est ce qu'elle doit
faire.
« Bonjour
Madame.
- Bonjour Patate. es-tu sûre que tout va bien ?
- Tout oui. Pourquoi ?
- Tu ne te ressembles pas. Pourquoi as-tu rasé tes cheveux ?
- Et les habits aussi non ?
- Oui... Je m'inquiète pour toi.
- C'était avant qu'il fallait s'inquiéter pur moi, Madame Mango.
- Pourquoi dis-tu cela ?
- Tant pis maintenant, c'est trop tard.
- Bon... Tu m'as l'air en colère.
- Bien sûr.
- Ah ! Ce n'est pas ton genre ça non plus.
- Mais mon genre est fini Madame M ! La Patate débile souriante que vous avez connue est finie. Oubliez-la ! Elle ne sert à rien !
- Qu'est-ce que tu racontes !? Tu es quelqu'un de bien Patate.
- Mais je me fous d'être quelqu'un de bien ! Je veux être quelqu'un tout court. Vous ne voyez rien, ni vous ni les autres. Je perds mon temps à vous expliquer ! Pffff !
- Reste polie Patate je te prie.
- C'est ça oui.
- Polie ou tu sors !
- Polie. Désolée.
- C'est bon, pourquoi ce rendez-vous Patate ?
- Pourriez-vous modifier mon prénom sur mon dossier pour l'année prochaine ?
- Modifier ton prénom ?
- Oui, le remplacer par un autre. Effacer Patate et la remplacer par Pitayak.
- …
- Qu'est-ce qu'il y a ? Pourquoi me regardez-vous comme ça ?
- Parce que je m'inquiète encore plus pour toi Patate.
- Je vous l'ai dit, il est trop tard pour s'inquiéter.
- Je ne peux pas faire autrement.
- Ok. Mais ma question ?
- Non je ne peux pas faire ça Patate sauf si tu fais des démarches pour changer de prénom auprès de la Préfecture, de manière officielle. Étant mineure, je pense que tu dois être accompagnée de tes parents et avoir leur autorisation. Cela coûte très cher qui plus est.
- Mes parents ne sont pas des gens qui comprendront cela. Ils ne voudront jamais. Je peux avoir l'argent. C'est tout.
- Pourtant si tu veux vraiment le faire, il faudra en passer par eux.
- Oui. Ils ne respectent rien et pourtant il faut toujours en passer par eux. C'est normal ça ?
- C'est comme ça. Tu ne te sens pas respectée, cela ne veut pas dire que 'est la réalité.
- C'est la réalité. Ils n'aiment qu'eux-mêmes et leur carrière. Je gêne.
- Tu ne peux pas savoir ce qu'ils pensent Patate, tout comme ils ne savent pas ce que tu penses.
- Eh bien ils devraient au moins essayer.
- Peut-être qu'ils essayent.
- Peut-être pas.
- Peut-être en effet, je ne les connais pas.
- Ne vous donnez pas cette peine, ils n'en valent pas le coup.
- Patate, ne te laisse pas avoir par tes démons. Ne les laisse pas vouloir être quelqu'un d'autre.
- … Les démons sont les plus forts. Ils ont raison. Ce sont eux qui gagnent au final.
- Pas toujours.
- Pour moi, si.
- Ne laisse personne te faire croire qu'il te faut être quelqu'un d'autre.
- Personne n'a besoin de me le faire croire. Je sais qu'il le faut.
- … Je ne sais pas quoi te dire.
- Je sais. Il n'y a rien à dire. Ni à faire. Je sais ce dont j'ai besoin.
Patate
sort et sourit doucement à Madame M. C'est une gentille Madame M.
Mais elle reste comme les autres. Au moins, elle est gentille. Un peu
moins conne, bornée, sûre de savoir que les autres. Elle ne
comprend rien quand même. Mais elle n'avait rien dit sur Pitayak. C'est vrai. Patate-Pitayak sourit encore. Un peu de chaleur.
Patate
était triste en sortant. Elle ne savait pas pourquoi. Elle ne s'y
attarda pas et se promit au nom de Dieu qu'elle mènerait son projet
à terme, quoi qu'il en soit. Qui que soient ses parents de malheur.
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