dimanche 30 juillet 2017

Patata couillue

Patata-Pitayak comme elle se prénommait elle-même désormais prit peu à peu de l'assurance. Que Mme Mango ne lui ait pas ri au nez, que les autres se mettent à la regarder autrement, qu'on s'interroge... Elle n'est plus Patate, c'était clair. Elle devenait. Un jour, Carotte vint s'adresser à elle, moins conquérante qu'avant et plus curieuse, presque ouverte :
« Dis donc, Patate, tu changes de style ...
  • C'est ça.
  • T'as l'air d'un mec.
  • Voilà.
  • T'aimes ça ?
  • Oh que oui !
  • Mais tu ne seras jamais un mec Patate.
  • Merci je suis au courant.
  • Eh, t'énerve pas, je m'instruis c'est tout.
Elle sourit.
Elles sourient.
  • Tu as bien raison. On a toujours à apprendre des autres, n'est-ce pas ?
  • Pas toujours non. Y a des pauvres cons.
  • Et alors ? Cons un jour, cons toujours ? Regarde-toi. T'aurais jamais fait un truc aussi intelligent y a quelques semaines.
  • Eh ben, tu t'affirmes ma grande.
  • Arrête de faire ta grande gueule en me rabaissant. Arrête ça, tu te crois innocente en plus. Tu crois que les autres n'ont qu'à être plus forts. Pffff ! Mais quand on tape sur les autres, faut s'attendre un jour ou l'autre à un retour de bâton.
  • Oh non ! Y a les victimes pour la vie.
  • Non mais toi t'es une vraie désespérée en fait. Les gens ne changent pas ?!
  • Pas désespérée. Réaliste.
  • C'est ta réalité. Pas la mienne.
  • Tu fais de la philo maintenant.
  • Ca fait longtemps !
  • Pas moi et ça m'intéresse pas.
  • C'est ce que tu dis oui. Bref, qu'est-ce que tu veux Carotte ?
  • Que tu m'expliques.
  • Que je t'explique ?
  • Ben oui, la métamorphose, chenille papillon tout ça.
  • Tu me fais rire. Ben, envie de changement. De plus être une looseuse à la con et qu'on me prenne plus pour de la merde.
  • Quoi ?
  • Quoi quoi ? Te fous pas de ma gueule Carotte, tu vois très bien de quoi je parle.
  • Je vois que toi aussi tu te plantes Patata.
  • Patata... tu fais quoi là ?
  • Rien, c'est comme ça. C'est comme ça que je t'appelais quand on était petite non ?
  • Oui, et ?
  • Ben, ché pas.
  • T'es trop bizarre Carotte.
  • T'as des couilles Patata. Je l'ai toujours su.
Et elle part sur ces mots furtifs. Patata-Pitaya est sonnée. Elle ne comprend plus rien. Que s'est-il passée ? Elle a toujours été sûre de ce que Carotte la méprisait au dernier degré. Elle pense que là encore elle s'est foutue de sa gueule. Pourtant, elle avait l'air d'y croire. Elle était sérieuse. Il n'y avait pas ce petit sourire ironique si habituel chez elle. Abasourdie et sans y penser, remplie de fierté et de désir. Elle avait envie. Envie de tout, elle y croyait enfin. Un immense horizon s'ouvrait à elle. C'est le moment d'aller se renseigner à la Préfecture. Elle va se faire recevoir ! C'est sûr. Peu importe, c'est le jour. A la sortie des cours, elle va faire sa demande, savoir comment tout cela se passe. Elle va tout préparer. Elle sera fin prête pour la guerre à la maison. Les absents ont toujours tort.

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