On les a vus se haïr cracher jurer boire pour oublier.
On les a vus dans un éclair de complicité secrète ineffable au détour d'une conversation anodine et crispée selon l'usage
On a entendu les pleurs de rage de la femme soumise à son mariage argenté et aventureux devenu traditionnel et avilissant.
On les a entendus prendre soin l'un de l'autre le yeux ronds comme s billes dans une tête de poule dégénérée. On n'en a même rien dit.
On a souvent cru que le tapis allait prendre feu et qu'ils allaient se livrer à un duel de kung-fu fatal.
On a cru en leurs yeux brillants quand ils parlaient ensemble de leurs exploits vertigineux.
On a presque toujours baissé les yeux pour ne pas assister encore une fois à une scène de cette douleur de deux vies échouées. Deux grands cachalots inutiles.
On a baissé la garde quand enfin on pouvait s'en délester entre nous. Les mots n'ont pas tout dit. On a fouillé partout sans comprendre au final. En se demandant si on ne se trompait pas sur toute la ligne avec notre histoire de haine.
On s'est inquiété des heures passées côte à côte solitaires s'imaginant la destruction massive en notre absence.
On s'est inquiété chacun pour soi quand il est tombé malade. Elle s'est effondrée ridicule poterie en toc incapable de se tenir sans lui ; on y voyait un être d'indépendance révoltée.
On a écouté la souffrance des enfants coltinées à ce combat quotidien brandissant courageusement leurs drapeaux de toutes les couleurs, optant en désespoir de cause pour le Bordeaux.
On a écouté la vieille femme qui a dit : "ce qu'ils pouvaient s'aimer ces deux-là ! " ça nous a déchaussé la langue.
Depuis, on a réfléchi à deux fois.
Aucun commentaire:
Enregistrer un commentaire