Ils montent ensemble
aux portes du ciel.
Il est un être des
hauteurs.
il ne se laissera pas
diminuer.
Il n’aime ni la terre,
ni le plancher des vaches.
Il veut être Jules Verne
et toutes ses aventures.
Il ne rêve pas.
Il exécute.
Il ne reste pas
les bras ballants
comme son idiot de frère.
Il montera jusqu’au
sommet.
Et il y emmènera
ceux qu’il voudra.
Il est le chef
désormais.
Le chef de la
famille.
Le chef de la
firme.
Il ne sait plus être autrement.
Il l’a toujours été
et on l’a freiné.
Sa mère voulait lui claquer
le bec.
Très vite,
elle s’est vue dépassée.
Il a dû se taire.
Longtemps.
Aujourd’hui,
il tonne
ses ordres
et directions,
il foudroie
celui qui n’y consent pas,
il méprise
celui qui conteste,
il n’entend que
le son de sa voix.
Il a raison.
Il n’en démordra pas.
Il n’y mord pas
d’ailleurs
puisqu’il ne doute pas.
Il est le chef,
il organise
comme il le faut.
Ils montent ensemble
aux portes du ciel.
Elle a suivi
sa décision.
Comme toujours.
Après avoir dit non.
C’était pour le plaisir.
parce qu’elle
raffole
des hauteurs
qu’ils franchissent.
Elle grimpe,
elle se retrouve dans sa
forêt
de princesse
enfantine.
Elle attaque les
pentes
et leur
ardeur.
Elle s’essouffle
jusqu’à la limite.
Sa limite est bien loin
derrière celle des autres.
Elle le suit.
Parfois même,
il la suit.
Elle reprend sa liberté
sans soupçons
de quiconque.
Il joue le chef.
Il est le chef.
Et elle l’égale.
A cette hauteur-là,
les dimensions
se tordent.
Ils montent ensemble
aux portes du ciel.
Il la fait monter
avec lui.
Il la veut
avec lui.
Elle le
galvanise.
Elle est ahurissante.
Elle n’est pas comme
les autres.
Il a choisi
cette femme.
Et chaque fois qu’ils
s’en prennent
aux immenses
montagnes,
il se souvient
pourquoi.
Elle est femme
mais elle
aurait pu être
chef
elle aussi.
Il lui manque
le cerveau
mais elle a le cran.
Il a honte d’elle
souvent
quand elle
n’y comprend
rien. Elle fait exprès
pour lui faire
honte,
pour l’humilier,
pour que sa bêtise
rejaillisse sur lui.
Il le sait,
il la connaît
comme sa poche.
Mais aux sommets,
il brille avec elle.
Ils montent ensemble
aux portes du ciel.
Jour après jour,
il se rapprochent.
Dans la neige
jusqu’aux genoux
et
sous le soleil bruleur.
Ils se soutiennent sans mot dire.
Peut-être
qu’elle ne l’aime
pas
sur la terre ferme.
Elle s’attendrit
aux confins
des gouffres
et
des avalanches.
La violence sublime
l’entoure.
Elle n’est plus l’héroïne
tragique
de Paris.
L’Himalaya
la mate,
la plaque,
elle ne peut plus que
respirer,
sans masque.
Il tombe tout seul.
Elle se sent
un peu reine,
aux côtés de son roi.