Petit et plat, il lui fallait un corps tellement normal qu'on l'oublierait. Que même ses propres monstres l'oublieraient. Un tronc fondu dans n'importe quel paysage. La surface plate la plus insipide inattirante possible.
Pas pour ou contre les autres.
Pour et contre elle-même et les voix du coeur.
Du coeur malade jusqu'à la fin.
Elle acceptait d'été fille. La longueur d'un membre en opus entre les jambes à éradiquer l'aurait sans aucun doute horriblement gênée. Les seins, les seules vraies accidents de son pieds à tête. Le reste se creusait à merci. Toujours plus s'il le fallait. Les jours où il était nécessaire d'exister moins, voire plus. Elle avait peu d'armes à sa disposition. Très peu d'armes d'autant qu'elle était à tâtons quatre pattes dans la vie. Les yeux peureux à se cloîtrer et le dos d'os sans muscles pour articuler.
Petit et plat, riquiqui, à sa mesure. Elle n'avait jamais honte d'être minuscule. Elle avait honte de tout ce qui passait. Et espérait dans tout ce qui s'abrasait. Elle aurait pris le grand couteau de bouchère pour raser les mamelons. Si. Encore si. N'étant définitivement pas une amazone moderne, elle ne s'approcha même jamais du tiroir concerné. Elle ne regarda pas, pas plus cela que les autres. Elle aimait ces femmes décriées, méprisées, au corps de petit gars. La rectitude verticale du torse, sous tous les angles, sans vagues, sans choix. Elle aimait en secret ces filles sans symptômes de leur état fertile. Elle aimait ces filles sèches. Elle les trouvait parfaites. La géométrie calme de l'asexué. Elle n'avait, elle, que ce moyen pas vraiment réfléchi, d'user du dedans, travail à étapes, les voltiges de son corps exposé. Elle rameutait vers l'intérieur les morceaux de corps et leurs velléités à fleurir aux yeux de tous. Les yeux tournés sur l'invisible, blancs en-dehors, perçants dedans. Chefs officiels de chantier.
Tout cela, elle n'en laissait paraître une once : elle était une fille sage, correcte. Mais, tout cela, elle-même n'en savait rien. Elle n'en comprenait rien. Elle ne cherchait pas à saisir. Tout le monde la prenait pour une fille, une future mère. Tout le monde y voyait ce qu'il voulait y voir. Elle rêvait en silence, au fond de son lit les filles fortes aux muscles détergents, sans souvenir au lever. Nuits blanches.
Jusqu'au jour où elle se vit rabougrir en flèche. C'était là un soulagement que d'avoir enfin le droit de se recroqueviller. C'est en vieillesse qu'elle se trouva enfin protégée, toute belle recroquevillée. Elle ne fut pas plus heureuse mais assurément plus spontanée. Le vrai mouvement de son corps en spirales concentriques eut enfin droit de cité. Chacun autour d'elle s'en attrista, y voyant la fin de ses efforts pour lutter dignement. Elle sentit en son for intérieur une part de son véritable être s'épanouir caché au creux des tourbillons de sa coquille.
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