Elle a beau dire Non et Non.
Elle a beau.
Beau jeu.
Ses mots lui semblent vides. Personne ne les entend. On croit qu’elle est une reine. Que l’argent lui suffit. Que les colliers brillants lui comblent le cœur. Elle s’en repaît un peu. La journée oui s’en satisfait. Le soleil s’y retrouve. Quand vient la nuit et ses chats noirs, tout ça est à jeter. La lune n’aime pas les projecteurs.
Elle mettrait tout aux ordures et immondices, si elle ne se maîtrisait pas. Mais elle prend prend sur elle.
A l’aide du p’tit r’montant.
Elle détourne l’envie et la rage. Elle abreuve toutes ses soifs. Elle fait tout ce qu’elle peut pour revenir en elle sans briser les beaux colliers d’or et de perles. Sans briser le rêve qu’on voit. Sans briser les deux enfants. Et même sans briser son mari. Elle détesterait être si responsable et tout briser. Elle dilue toute cette pierre dans ses tripes pour ne pas la jeter contre les têtes qui l’entourent. Elle rêve de fracasser les crânes. Elle rêve de massacre. Elle rêve de ses mains toutes-puissantes. Elle se réveille en sueur, trempée d’angoisses. Elle se lève et arpente la maison.
Elle et son p’tit r’montant.
Elle marche.
Elle fait le long, le large, et les travers.
Elle ne s’arrête que quand le cœur s’apaise, palpite moins dur, cogne moins méchamment. Le cœur peut être un assassin. Elle ne dit pas ce qu’elle pense. Elle doit encore faire croire à la jeune reine en fleurs, romantique spirituelle. Elle laisse le monde y croire. Quand les guibolles aussi s’arrêtent de trembler, elle retourne dans son lit. Il ronfle sereinement. C’est en tout cas ce qu’elle croit. Elle aussi.
Tout le monde croit des choses.
croit ce qu’il aime à croire.
Tout le monde se fourvoie.
Et tout le monde le sait.
Au fond, non ?
Elle se rendort sur ces considérations, maintes et maintes fois déjà avalées, régurgitées, ruminées en somme. Et elle recommencera sans doute demain et le jour d’après. Parfois, elle peut dormir du soir jusqu’au matin. Sans la balade.
Et sans le p’tit r’montant.
Parfois. Elle reprend espoir. Elle n’ose pas tellement l’avouer mais elle remercie Dieu. Elle se sent idiote.
Ca fait du bien de parler à quelqu’un.
De plus grand que soi.
De certainement plus fort.
De qui on peut tout imaginer, autant qu’on veut, aussi loin, aussi énorme qu’on veut. Elle sent alors que l’énormité ou la multitude, rien n’est bien clair, qui l’habite se déverse.
Parfois aussi, elle parle au p’tit r’montant. Elle n’a plus rien à perdre quand elle est face à lui, les deux mains bien enveloppées autour du verre. Bien chaudes. Bien serrées.
« Je ne dois pas briser.
Je ne dois pas tomber.
Je chute, tous les jours et surtout toutes les nuits.
Et c’est toi qui m’attends au fond du verre.
Les autres jouent l’équilibre sur le bord et font chanter la matière.
Je glisse toujours au fond du verre.
Dans ta douceur.
Dans ta chaleur.
Dans ta violence qui tue la mienne.
Tu es le seul qui me maîtrises.
Tu apaises tous ces Non ignorés.
Tu es un monstrueux Oui, aussi cruel qu’un Non.
Tu me sauves et me perds.
Je me perds avec et sans toi.
Mon p’tit r’montant.
Je te chéris.
Je te bénis.
Bientôt, tu seras mon meilleur amant. »
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