lundi 30 juillet 2018

Kate Di Camillo, traduit de l'anglais par Antoine Pinchot, Little Miss Florida – Didier Jeunesse


Little Miss Florida parle de l'enfance, de la douleur de l'abandon et de l'importance de toutes petites choses qui changent tout. L'amitié, le respect, la douce folie quotidienne et l'espoir coûte que coûte restent les meilleurs pansements de l'existence. Et l'on peut grandir, alors, encore et encore, ensemble.


Romy, Beverly et Louisiana ne se connaissent pas. Elles se retrouvent au cours de t de twirling d'une ancienne championne de la discipline aigrie et assez ridicule, il faut bien le dire. Chacune a son caractère, bien trempé et singulier. Elles sont toutes trois apparemment inconciliables. Le trio semble improbable. Pourtant, les voilà qui se lient d'amitié, un peu malgré elles. Ou peut-être qu'en fait elles se ressemblent beaucoup plus qu'on ne le croit et se complètent dans leurs différences. Romy et Louisiana tiennent à leur rêve. Elles se battent pour le réaliser. Beverly préfère jouer la carte du détachement, teinté d'authentique désespoir. Mais les trois fillettes finissent par faire équipe et s'entraider. Chacune a sa façon de faire, de s'exprimer, de vivre sa vie et ses douleurs. Mais elles parviennent à se comprendre les unes les autres, à force de tolérance et d'affection.
La fantaisie, qui frise souvent le délire, de Louisiana et de sa grand-mère sont d'abord tournée en dérision par les deux autres, rationnelles, terre-à-terre qui croient voir leur salut dans leur maturité. Ce n'est qu'une intelligence d'adulte très normal, trop normal qu'elles imitent. Mais la famille Elefante, Louisiana et sa mamie folle-dingue vont entraîner la petite troupe dans un monde un peu magique, un peu factice mais qui va inciter tout le monde à rester vivant et ne pas perdre espoir. C'est un monde plein d'affection et qui n'a pas peur d'avoir foi que le monde des Elefante. Le désabusement n'y a pas sa place. Il n'y est pas interdit. Il n'y existe pas. Alors, il s'agit de continuer de croire et de se battre, prendre des risques et enfin rire ensemble.
Ces deux personnages, et quelques autres plus secondaires, donnent une nuance féerique au roman. Il ne s'agit pas de rêves qui font s'échapper du réel, même si ces derniers ont toutes leur utilité pour les petits et les grands. Mais ici au contraire, c'est cette féerie qui permet d'accepter le réel et sa dureté et de finalement reprendre goût aux choses.
L'on suit dans ce récit les va et vient de l'âme de Romy qui a pris conscience de sa vie intérieure et de ses remous suite au départ de son père du foyer familial. L'on est bercé tout du long par cette image de marée, de flux et reflux de l'âme, qui traversent l'histoire. Romy expérimente la compréhension de ses émotions et leur force, leur violence parfois. Elle en décrit la variété avec une poésie aux allures d'enfant plus parlante que bien d'autres.
Ce qui fait se rejoindre ces trois enfants, derrière leurs dissemblances, c'est l'expérience de l'abandon et de l'absence. Le père ou les deux parents, pas de frère ni de sœur. La solitude est leur lot à toutes les trois. Elles doivent vivre avec et chacune a là aussi sa façon de faire et toutes sont respectables. Elles se conjuguent, à trois pour réparer les blessures.

C'est un roman de la résilience enfantine, dans l'amitié et l'intensité des sentiments de cet âge. Et les adultes qui soutiennent ne sont pas ceux qu'on attend : ce sont les plus extraordinaires, les plus fous et les moins conformistes. L'adulte normal ne sert de rien. Alors, qu'attend-on ? Soyons fous !


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