Maman Tata
Tata Mamoune
Tatamère
Tamère
Té mare
Tintamarre
Y en a marre
Marre au diable
A bas la famille !
Mes amours
Maman Tata.
Quand elles apparaissent
dans un angle mort
je m’approche pour bonjourer
cérémonieuse
bien élevée
comme il faut
oui Madame
mes hommages Monsieur
le Directeur.
Bonjour Ma tante.
Elle se récrie.
Elle a envie de me claquer.
Je le fais exprès,
elle est à cheval sur les principes
elle chevauche politesse et courtoisie
au grand galop.
Mais avec moi, tout aux ordures,
et nouveau règlement intérieur.
Sauf que c’est trop facile.
Et elle est tellement drôle
quand elle s’enflamme.
Tout le monde rigole
même Maman,
elle dit que c’est communicatif.
Et donc, je m’approche d’elle
et je divague
ça zizague
jambes de coton,
je manque de l’embrasser à pleine bouche
à chaque fois.
Elle ne le sait pas,
elle ne l’a jamais vu, personne d’ailleurs.
Puisque tout le monde hilare.
C’est toujours un
Voilà que l’autre jour,
avec Maman,
rebelotte la pleine bouche.
J’ai pris un peu de temps pour réfléchir
aux toilettes.
C’est fédérateur les toilettes,
ça ficelle les idées.
Et donc, ce qui venait de se passer
en boucle :
je me penche vers Maman
pour un bisou salut,
idiot en somme.
Et là, je réprime violemment le pivotage
en direction des lèvres.
Pendant quinze ans, je n’ai pas touché ma mère.
Elle sentait mauvais,
elle baladait ses seins en marchant,
vulgaire et tellement claire dans son jeu.
Stupide,
Je ne voulais pas qu’elle contamine
ma peau et mes os.
Parce qu’on sait tous qu’une fois la peau et les os,
c’est trop tard,
on est cancer.
Et puis, la phobie est passée,
pas complètement mais mieux.
Elle a presque pleuré la première fois que je lui ai fait un bisou.
Mais moi, dès cette première,
un truc bizarre.
J’avais failli lui rouler un patin,
une pelle,
un énorme rouleau dans sa bouche de maman.
Je ne devrais peut-être pas donner autant de détails.
Il y en a qui seront choqués.
Ils diront que je suis folle.
Mais pas toujours.
Ce jour-là et les suivants,
Quand j’ai eu très envie de langourer Maman,
Je ne perdais pas la tête,
pas de cosmos et autres gouffres à l’horizon.
j’étais lucide.
C’est ça qui m’a le plus bafouée,
j’en ai pris une claque,
j’ai bafouillé pendant une heure après,
la première fois.
Et puis, je m’y suis presque habituée
à cet élan
craqué.
Ceci dit, je ne suis pas sûre d’utiliser les bons mots
quand j’explique.
du coup j’embrouille.
Mais ça, c’est une fatalité,
Je n’arrive pas à me rappeler les mots que je dis.
Il me faudrait mon assistant
toujours sous main.
Sous la main ?
Sous-marin ?
Soudain ?
Sourdingue ?
Je m’y perds.
Quand je parle de ça,
je ne dois pas aller chercher les mots.
La chasse de trop.
Donc,
je finis mon histoire de bisou Ta-Mère.
Aujourd’hui, chaque fois que je les salue ou remercie,
je voudrais les embrasser amoureuse.
Pas un bisou maman mignon tout doux.
je suis attirée par leur bouche,
par le milieu de leur axe,
être au centre de leur préoccupation,
prendre leurs mots,
les museler,
les éteindre
les étreindre de la langue
sans les bras
sans les mains.
Et en même temps, c’est répugnant.
Ce n’est certainement pas pour le plaisir.
C’est
pour
étouffer
dans
l’œuf.
Bouche-œuf.
Bouche bœuf.
Bouche bée.
A l’attaque !
Boucher un coin
et assaillir
jusqu’à plus soif.
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