Elle
décide de se rendre chez Haricotte.
Haricotte
appartient à la même engeance que Patate. Pitay s'en sent déjà
plus détachée désormais. C'est sans doute la raison pour laquelle
elle se dirige vers chez elle. Elle s'en sent capable. Parce qu'au
fond, elle a beau être devenue Pitayak, elle a peur de ce qu'elle va
trouver derrière le décor. Elle n'a connaissance de rien de la vie
de Haricotte. Elle n'a jamais voulu demander. Et Haricotte n'est pas
bavarde sur le sujet. Comme Patate, elle essaye de faire avec le
principal et le présent. Ce qui se passe avant et après sera géré
avant et après, chaque chose en son temps car chacune est une
épreuve. C'est l'impression que donne en tout cas Haricotte. Non pas
qu'elle ait l'air débordée, elle ne laisse pas l'air se dévoiler,
mais elle est secrète et concentrée. Toujours concentrée.
Haricotte est une très belle fille. Vraiment très belle. Des
cheveux sublimes longs bouclés, des yeux verts perçants, un sourire
Colgate, un corps sans accrocs. Ni trop ni trop peu. Patate l'a
souvent regardée avec envie. Mais elle est sans doute la seule.
Haricotte a beau être si belle que cela, elle ne le sait pas, elle
n'y croit pas et c'est comme ça qu'elle perd la partie. En
légumescence, tout est encore davantage question de croyances qu'à
n'importe quel autre âge de la vie. Haricotte n'a foi qu'en les
autres, Patate n'a foi en personne, et le tour est joué. Elles sont
nécessairement perdantes. La seule foi réellement utile, c'est
celle qu'on se donne à soi-même. Mais les deux-là en sont
parfaitement incapables. On ne leur a pas appris ça. On les a
lancées dans le monde sans avoir foi en elles. C'est comme ça.
Elles devront apprendre sur le tas. Pitay a déjà bien avancé mais
pas la foi. Les deux filles devront la conquérir.
Pitay
arrive chez Haricotte. Elle connaît bien le chemin. Elle y est
souvent allée. Elle aime bien voir Haricotte en-dehors du collège.
Elle se sent en sécurité avec elle. Et Haricotte est rigolote quand
elle est toute seule. Elle n'a plus tous ses secrets. Et elle est
encore plus belle. Patate le lui a dit un jour. Elle voulait qu'elle
le sache, elle trouvait ça important. Eh bien, Haricotte a éclaté
de rire, un vrai rire franc, même pas amer, et a dit : « c'est
ça Patate, arrête tes compliments à la noix. Ca se saurait si
j'étais une belle fille. » Et elle a changé de conversation,
toujours sans aigreur. Patate était restée silencieuse. Sa parole
ne servirait à rien. Elle a mesuré ce jour-là l'écart des
regards, et l'incommunicabilité, parfois, la force des croyances.
Elle a espéré qu'un jour Haricotte se rendrait compte.
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