Matin bouchon
Pointe à 14’ à l’heure !
Première deuxième ?
Le coeur balance sur le cran du levier de vitesse,
Vitesse...
Qui est ici automobile ?
Je me retourne et vois
Devant
Derrière
Latéral gauche
Latéral droit
Même obliques nord-est ou
Sud-ouest,
Points cardinaux tout autour de
Moi au volant de
Mon monde
Roulant.
On est chez soi
Dans cette cabane
De grand.
Majeur et vacciné.
On s’y sent sérieux
Et libre arbitre de
Son destin,
Si l’on a l’âme
Lyrique.
Mais arrivé
Dans l’énorme accordéon
De toutes les autres machines roulantes
Immobilisées,
Immobilisantes,
On est handicapé,
On est outil de la machine
Et qui est de moi ou d’elle
L’intention
L’intuition
L’esprit,
Qui est le maître ?
L’angoisse du bouchon matin.
On voudrait qu’il
Reste,
Comme dans les petites rues
Voisines
Le prolongement douillet du foyer,
Voire même si l’on a poussé le vice jusqu’à s’envelopper
De son plaid de voiture,
Celui du lit
de sa couette accueillante.
Nostalgie du matin...
Mais
La claque du matin bouchon
Réveille digne
D’un patron brutal.
Accueillant lui comme une porte de
Prison.
Coincé entre d'innombrables
Congénères inconnus,
L’on doit se battre pour la
Survie.
L’on n’obtiendra sa place que
Si et seulement si,
Petite touche mathématique,
L’on roule en
Prédateur.
Menacer suffira.
Pas besoin d’attaquer,
Quoi que quoi que...
Pas d’attaque trop frontale
L’automobile est en plus un
Précieux et cher objet
Qu’il ne faudrait pas érafler
Sous peine de...
On ne sait trop quoi au juste...
Bref,
Fuir vous crèvera,
Cela ne fait aucun doute.
A l’arrêt,
L’on observe ses pairs.
Ils ont l’air tout aussi
Déçus d’avoir
Perdu
Leur petit paradis.
Pas tous,
Il y en a qui sont comme de gros poissons
Dans l’eau.
Il faut être gros très gros pour
Se sentir dans son eau.
Alors on se prend à
Rêver,
Les yeux se ferment dangereusement,
D’un peu d’air frais
À bicyclette...
L’on fredonne,
L’on s’évade.
Le collègue bobo bio écolo
Tous les jours invariablement
Ébouriffé par son casque
Vélocipédique.
Et pourtant,
L’on se prend à penser à lui.
L’envierait-on là juste là ?
L’envierait-on... ?
Dans l’habitacle qui pourrait si
L’on se laissait prendre par les tentacules du
Matin bouchon bouchon matin
Devenir cage,
Dorée mais cage quand même,
L’on se sent terriblement
Hétéro !
On nous avait promis auto mais
La gageure !
Jamais aussi hétéromobile,
Machino-dépendant.
Moi homo sapiens
Devenu hétéropitèque.
Ce soir,
En s’endormant,
Il faudra songer
À tout ça
Et demain ?
Qui vivra verra.
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