Elle sort précipitamment, en pleine voie rapide, en plein boum. A-t-elle voulu se ranger sur la bande d’arrêt d’urgence ? Peut-être. Elle laisse tout en plan. Elle s’en serait cogner la tête au volant si elle avait continué.
Elle avance à travers les voitures. Elle ne pense plus à rien. Et puis, elle se souvient de ses pieds. Elle les pose aussi proche du sol qu’elle le peut. Mais il manque quelque chose. Alors, elle enlève ses chaussures. Elle doit sentir la terre sous elle, la porter, celle sur laquelle s’élancer. Celle qui génère et rattrape au vol même si parfois avec quelque fracas. Elle marche, se déroule, se relève, se décreuse. Elle n’entend pas autour d’elle le concert de klaxons. Elle entend sa marche qui rythme ses poumons.
Est-ce que les klaxons la klaxonnent ? Est-ce qu’ils la chantent ? Es-ce qu’on est pleine comédie musicale où tout le monde danse sur son capot et loue l’héroïne libérée ? Sûr et certain qu’on n’en sait rien et qu’elle s’en contrefiche, elle les ignore : elle a trouvé sa bulle. Elle y roule et les autres n’existent plus.
La voilà sur le bord du ruisseau, le tout petit ruisseau qui traverse la ville. Elle est assise par terre, en tailleur et talons à la main. Probablement la culotte à l’air. Elle ne sait pas l’heure qu’il est. Elle ne sait pas pourquoi ici. Les gens la regardent bizarrement. Elle pourrait aussi se regarder bizarrement. Elle aurait pu. Mais elle s’admire maintenant. Non ce n’est pas ça. Elle ne se regarde plus. Elle s’est trop regardée. Elle se contemple de l’intérieur. Elle, la femme accomplie, working girl qui ne doit rien à personne, libre comme l’air. Mensonge éhonté qu’elle a nourri tendrement.
Elle a fini ce temps-là.
Et c’est ici qu’elle respire de ses propres ailes.
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