Ce matin, elle se réveille.
Et sans bouger, les yeux au plafond, elle sait qu’elle sera une autre.
Peut-être seulement aujourd’hui.
Peut-être pas.
Elle qui prévoit qui et comment elle vivra chaque minute de sa vie, sait qu’aujourd’hui dérogera à
la règle.
Hier était l'un de ces jours où l’on tombe de haut.
Où la confiance si longtemps travaillée s’est brisée.
Ni la première, ni la dernière, peu importe.
Elle ne restera pas les bras croisés sans rien faire à remettre l’ouvrage mille fois sur le métier car
C’est la vie...
Car elle en a pris son parti.
Aujourd’hui, elle n’en prend pas son parti.
Elle retrousse les babines.
Elle fronce les sourcils.
Sans cruauté.
Ou bien...
Mais sans pitié sans aucun doute.
Aujourd’hui, elle sortira l’animal muselé les quatre pattes attachées,
ridicule étalon impuissant,
sur le flanc,
comme prêt à crever ;
Il a fini par attendre sans bruit les yeux dans le vague,
esclave révoltant.
Quand ce qu’on a cru intègre
se désintègre,
l’animal reprend ses droits, défend sa terre.
Elle ira monter le noble cheval ébène
Et elle galopera partout où elle ne le devrait pas.
Elle ruera au premier emmerdeur qui se pointera.
Et elle gueulera comme une folle diront certains.
Mais en réalité, chacun saura qu’elle dit ce que tout le monde tait.
À tous, ce qu’elle criera du fond du bide, enfin fière sur sa monture somptueuse
c’est :
Pas un seul d’entre vous ne me connaît,
Peut-être oui la soeur d’âme
Mais elle, elle aura l’honnêteté d’avouer l’implacable perplexité,
Parce qu’elle, elle sait qu’on ne connaît jamais quelqu’un,
Absolument jamais,
Aussi loin que les mots aient été échangés.
C’est cette personne qui doute sans cesse
Qui me connaît le mieux
Messieurs et Dames qui Vous targuez de savoir qui
je suis.
Je ne sais pas davantage qui
vous êtes.
Mais peut-être qu’au moins moi je cherche derrière tous les voiles, les spectacles et les silences.
Alors non !
Pas un seul d’entre vous ne me connaît et ceux qui le croient le plus sont ceux qui me connaissent le moins.
Celui-ci est doux comme un agneau, ferait pas de mal à une mouche ?
Il vous écrasera comme une merde le jour où vous aurez touché comme un connard à sa limite que vous n’avez même pas sentie venir ni vibrer sur l’instant.
Celle-là gueule et joue la grande prêtresse arrogante, on attaque sans merci, elle ne sent rien ?
Vous la suivrez le soir rentrant chez elle, seule comme un rat, aux aguets d’un quelconque message sur le répondeur, sur l’I-Phone qui brille inutilement. Et vous verrez qu’elle chiale comme une môme en s’endormant pelotonnée dans sa couette en serrant fort son petit coussin fétiche.
Celui-là très discret, parfois d’un coup dans une colère noire sans qu’on s'en doute et on se moque des plombs pétés ?
Il se bat nuit et jour contre la maladie, il dort deux heures par nuit, il suit à la lettre son traitement et un nouveau régime qui devrait bien l’aider dit-on. Les jours de colère, il roule en voiture toute la nuit. Il n’y a que comme ça qu’il pourra sourire à nouveau le lendemain.
Celle-là, tout l’aime bien. Elle est toute calme et agréable. La bonne copine. La bonne ambiance. On ne s’inquiète pas pour elle ?
Tous les soirs, elle laisse surgir son génie fielleux et maléfique ou euphorique et rieur, surprise, étonnante, tout ce qui mûrit jour après jour sous son masque impassible.
Elle ne s’arrêtera plus.
On ne l’arrêtera plus.
Elle hurlera dans un dernier râle de guerre :
Personne ne sait qui est, bande de connards !
Aucun commentaire:
Enregistrer un commentaire