Zoé repart pensive. Axelle gazouille en jouant avec son trésor imprévu. Si elle parle à sa mère, cette dernière n’en entend rien. Elle tourne et retourne ce visage dans sa tête. Il tourne et retourne, la retourne, la chamboule. Il lui colle aux yeux. Elle avance machinalement. Zoé rentre chez elle, à pied, évite le bus et le monde, ne pense plus à son dos qui la fait souffrir. Elle est indifférente à tout cela. Elle pense au grand drôle d’homme. Pas vraiment drôle d’ailleurs mais aspirant. Ses yeux bleus profonds comme ceux de... Oh non ! Pas encore ça ! Pas encore cette bêtise ! Son psy lui a bien dit de cesser de courir après son père. Zoé cesse cette lutte vaine ! Mais c’est bien plus fort qu’elle et ses années de thérapie ne l’empêchent pas de toujours vouloir cet homme-là. Merde et merde putain de merde ! Elle ne comprend toujours pas pourquoi il lui est si dur de s’en défaire. Il n’était pas extraordinaire, il n’avait rien de spécial. Apparemment du moins mais elle l’a toujours aimé comme son dieu. Sa mère reléguée loin derrière. Elle sait que c’est bizarre. Elle est prisonnière de cet amour. Elle aime ce mort, encore et encore. Quelle merde ! Fait chier ! Zoé s’emporte intérieurement. Elle est dans une colère folle. Pourquoi les choses se répètent-elles ainsi ? Pourquoi est-elle incapable de dénouer ce lien qui l’enserre et la ramène toujours à la solitude ? Les pourquoi ne servent à rien. Faux amis ! Encore des trompeurs ! Elle en devient aigrie. Parano même. Elle s’en fout. Elle doit bien trouver une issue pour évacuer. Remarque que ça ne doit pas être efficace vu les lumbagos qu’elle se cognent... Bref...
Aksel tremble. Il n’a pas peur. Il tremble. Sent que l’air siffle dans sa gorge. Sans doute imperceptible pour les autres qui le croisent sans lui prêter attention. Mais lui sait que sa gorge a rapetissé. Étreinte. Laissant passer le strict nécessaire. Filtre sans concession. Il n’est pas vraiment gêné. En revanche, il tremble comme un 40 de fièvre. Il a très chaud. Il ne transpire rien. Il est sec comme un bout de bois mort. La fièvre sèche de la rage. Alors Aksel, mon grand, tu vois bien que tu aurais dû. Tu aurais dû planter ce putain de crayon dans la putain de gorge de cette putain de gamine ! Te voilà fait comme un rat, dans les filets dont on ne sort pas. Tu ne t’en sortiras pas ! Tu le sais. Tu ne t’en sortiras pas. Te revoilà la victime ! Te revoilà la proie ! Quand vas tu donc comprendre que tu ne dois plus jamais, plus jamais petit con !, être celui auquel on manque de respect, celui qui se laisse faire sans rien dire ? Quand vas-tu comprendre que tu n’as pas le choix bordel !? Tu es la proie ou le prédateur, ne cherche pas la fameuse troisième voie ! Elle n’existe pas. Depuis 30 ans, tu devrais le savoir quand même imbécile. Tu as toujours été comme ça, à ne pas vouloir accepter le vérité. Espèce de lâche ! Un couard ! Un ô eunuque ! Tu as perdu tes couilles des milliers de fois et tu continues. On dirait que tu aimes ça. C’est peut-être ton kiff de te faire émasculer un milliard de fois dans ton existence de victime incapable. Je commence à vraiment croire que rien n’a changé depuis tout ce temps. Tu recules ! Tu baisses la tête ! Tu...
« TA GUEEEEEULE ! », hurle Aksel comme un fou. Pas un son n’est sorti de sa bouche mais il a hurlé si fort que l’autre se tait. Il s’assied dans sa voiture à laquelle il vient d’arriver sans savoir comment. Il est épuisé. Il a l’impression qu’il ne pourra plus jamais marcher. Il s’endort.
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