lundi 11 septembre 2017

Carotte sans Patate


Carotte est restée de marbre devant la métamorphose. Elle fait comme si elle s'en fichait, comme si cela lui glissait dessus. Je la connais depuis tellement d'années que je décrypte le moindre de ses rictus. Elle n'est de marbre que de façade. Elle est éberluée. Je ne sais pas si ce qu'elle ressent est à envier ou pas. Je ne crois même pas qu'elle en soit là. Je crois qu'elle est est perdue, perdue car l'ordre du monde est bousculé. Sa petite Patate bien gentille, prête à être frite ou écrasée, merdique, n'est plus. Elle a perdu sa plus fidèle alliée. Peut-être la personne sur laquelle elle comptait le plus, comme ces hommes violents qui ne sont plus qu'épaves lorsque enfin leur femme les quitte. Ils n'existent plus. Parce que dans l'histoire, c'est le bourreau le plus faible des deux, toujours. Le bourreau est l'homme fragile, le cristallin qu'un coup de pouce fait glisser et se briser. Je crois aussi que Carotte a peur que je parle. Que je raconte toutes ces histoires chez elle, cette folie. Que je révèle sa famille en putréfaction. Je n'hésite pas à lui laisser croire que. Je n'ai plus peur d'elle. Je n'ai plus peur. Je ne le ferai pas, bien sûr. Je préserve quelques principes de respect, même avec les plus méprisables comme Carotte. Je les garde pour continuer de me respecter moi-même. Vous me direz que ce que j'ai fait à Patpat n'était pas très éthique. Il y a des exceptions. Celles qui confirment la règle. N'est-ce pas ainsi que tout le monde se dédouane de se erreurs ? Carotte est seule. Son clébard est mort et enterré. Elle doit très vite s'en trouver un autre. Heureusement, en légumescence, il n'est pas difficile de trouver son bonheur. Carotte me regarde beaucoup, en coin, sans en avoir l'air. Mais j'ai gardé mon âme de parano et je la sens. Je sais sans avoir à bouger qu'elle m'épie, qu'elle m’ausculte devrais-je dire plutôt. Elle ne comprend pas, elle n'en revient pas. Un morceau de son univers s'effondre. Moi-même je n'ai pas tout de suite compris ce qui se passait, je n'accordais pas tant d'importance à la Patate. Mais après avoir fait le tour de mes hypothèses, seule reste celle-ci et elle explicite tout. Je me suis cru devenue complètement narcissique. Mais j'ai dû finalement me plier à la réalité de cette importance. Ma chance est que je n'ai plus du tout le même attrait pour Carotte et que je sois devenue tout à fait égale à une autre. Mais elle n'avale pas la couleuvre on dirait. Je pourrais presque m'inquiéter pour elle. Est-ce qu'elle en deviendrait la victime de sa mère ? Est-ce qu'au contraire elle en viendrait aux mains ? Est-ce qu'elle exploserait enfin en plein vol la Carotte ? Râpée et tout à reconstruire. Un vieux tas de Carotte creux et léger comme une plume. Oui, cela me fait rire. Et non, je n'en ai pas honte. Je suis Pitayak et je n'ai plus de scrupules.

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