dimanche 10 novembre 2013

Mon alchimiste

Je pourrais dire ou même écrire,
De tout mon cœur je t'aime.
Je pourrais aussi répéter jour et nuit,
Je t'aime je t'aime je t'aime je t'aime
Je pourrais bien sans m'arrêter,
Je pourrais ne plus dire que cela.
Je pourrais également fleurir un long poème épris et éloquent, me pâmer à tes genoux, regard éperdu baveux.
Je pourrais toujours pleurer de joie et de douleur d'aimer.
Je pourrais promettre de t'offrir la lune.

Mais tous ces romantismes butent et rebroussent chemin. Ils n'ont pas dit les mots magiques. Le cœur se drape dans l'assurance de sa beauté incomprise et gâchée. J'en ai bien échangé avec lui à travers la cloison. Il y avait un petit peu trop de passage et c'était bruyant mais j'avais eu la prudence d'emporter mon cornet. Détails techniques. Il est resté inflexible. J'ai prôné la souplesse et la richesse des inter-tout ce qu'on veut. Peine perdue. Il tonne qu'il ne veut pas de ribambelles et tralala. Il vitupère contre toutes ces faussetés. Il dit que j'oublie la tendresse, la colère, le désir, le doute, la haine, la volonté de puissance (il a beaucoup lu ce cœur-là, trop de flux et reflux, il ne s'arrimait pas et vomissait ses tripes (les colocataires râlaient de plus en plus sérieux), il est devenu si ce n'est serein, plus calme et m'y emballe), le désarroi heureux et malheureux, les paradoxes et l'évidence.
Alors,
Oui.
Je ne peux que l'admettre.
Je ne dis vraiment rien
quand répéter je t'aime
quand généreux "de tout mon cœur"
quand promesses usurpées
quand exercice de style.
Mais c'est tellement plus simple de ne pas dire le reste,
que j'ignore comment prendre
par dessus
dessous
dans les bras
sans zip à ouverture facile.

Un jour, je me demande quelle est ma direction.
L'impression de poursuivre ma queue.
Et puis, ce jour-là même, l'énorme poids inconnu se décroche.
Je le jette à nos pieds.
Tu t'en saisis.
Me le retends.
Ne le lâche pas.
Pour qu'on regarde ensemble, je m'y écluse. Un gros étron qu'on prendrait à pleines mains et qu'on inspecterait.
Et la merde se changea en or.
Mon alchimiste adorée.
C'est toi qui m'a offert la lune,
incidemment.
La route s'était insidieusement obscurcie.
Les lampadaires rallumés m'apaisent.
Et,
je peux prendre mon temps,
admirer,
décortiquer,
le paysage.
Quelque chose est tracé,
marquage assuré,
piste verte bleue rouge noire.
Piste.
Moi qui savais mon avenir accidenté, toujours en mal de mer,
mais
mon cœur et ses lectures,
et toi et ta confiance.
Je ne dors toujours pas sur mes deux oreilles.
Ni toi ni rien n'y fait.
Mais je m'éveille
la solitude domptée
les gouffres escaladés,
l'amertume rabougrie,
dans le coin du passé.
Quand le canyon s'ouvre à nouveau sous mes pieds,
tu m'y retrouves
tu t'y retrouves,
tu ris, ce n'est pas si mal ici. Pas tout confort c'est sûr.
L'absurdité nous sauve et
zouip
l'ascenseur refile à la surface.

Maudit soit le jour où tu t'envoleras.

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