jeudi 26 juin 2014

Porc soleil

Elle veut oui faire un dessin,
euh oui,
je ne sais jamais qui parle,
si elle dit vraiment oui,
si elle m’entend vraiment,
si elle n’en entend pas d’autres que je n’entends pas moi-même,
des habitants intérieurs
qui lui parlent plus fort
que moi.
Je les imagine
l’insultant
ricanant
et
elle,
tellement accoutumée,
qu’elle ne bouge pas,
qu’elle reste figée dans son sas,
le seul possible
pour elle
pour survivre,
à toutes petites respirations.
Elle s’empare
franchement
de la feuille.
Elle s’y met,
comme si elle se jetait à l’eau.
parce que rien n’est fluide,
rien ne coule,
rien ne s’enchaîne.
Son univers
est un hoquet permanent,
qui l’empêche de finir ses phrases,
la force à lutter contre sa langue
ses lèvres
et toutes ses dents.
Elle dessine en rose
tralala lala !
léger
on pourrait le croire
un rond
un autre rond dans le premier,
deux ronds dans le deuxième rond,
tout s’emboîte.
Les ronds sont fluides
eux.
Puis deux autres ronds
plus haut,
qui sont clairement
des yeux.
Des yeux de cochon
au-dessus d’un groin.
Puis les yeux sont remplis,
grandissent
grandissent,
jusqu’à déborder sur les narines et les remplir
à leur tour,
les noyer
elles aussi.
Tout s’efface derrière le rose ravageur,
qui détruit la forme,
le sens,
le vivant
et ses douleurs.
Le rose ici
d’une chair à vif,
comme une peau retournée,
invivable
puisqu’à l’envers,
inacceptable
puisque c’est l’intérieur au grand jour,
le monde à l’envers.
Il n’y a plus que le premier rond rose,
entame d’une tête cochonne.
J’exprime ma frustration,
envie de taper du pied,
du poing
pour que l’image et son impact
reprennent leur place.
Mais ce n’est ni mon œuvre,
ni ma vie.
Je ne suis qu’un interrupteur,
qui ne marche pas toujours,
et qu’elle n’actionne
que si
elle le désire.
Elle ne le désire pas.
Elle ne peut pas le désirer.
Elle l’a sans doute désiré
sans le savoir
pendant la première minute du dessin,
pas davantage.
Les forces qui recouvrent
ont rappelé leur loi
et dompté
les échappées.
Le rond devient un astre
et ses rayons
poussent
peu à peu.
Ils commencent par pousser,
germer, pourquoi pas ?
Puis ils inondent,
se tassent,
s’entassent
dans un espace bien trop étroit
pour leur nombre
aberrant.
Un déséquilibre
qui fait
tiquer,
claquer les langues
et compatir.
Et c’est un vrai cancer
qui se propage,
sans s’arrêter,
les rayons dardent
et sortent des mains,
obligatoires.
Ils doivent ne rien laisser
s’insérer
entre leurs racines,
être en rangs
pas serrés
en rangs collés.
Et attention !
Le trou,
la brèche,
l’espace sur la feuille blanche,
ce blanc immaculé
c’est l’appel à la pénétration et à l’effraction.
C’est la virginité intouchée
dont le père abuseur peut s’emparer et modeler à son sens.
Et faire perdre tout le sens de l’être qui
se trouve
manipulé
comme un vulgaire objet.
Comme si elle
n’était qu’une coquille vide
sans esprit,
inhabitée.
Alors,
elle remplit l’espace blanc de la feuille
à dessiner
avec
des traits
compacts,
les uns au contact des autres,
sans pouvoir respirer
entre eux,
toute aspiration est encore un espace offert au remplisseur
dévoreur
ogre
paternel.
Avec
aussi
des couleurs,
une couleur,
la plus vivante possible,
qui brille plus fort
que le symbole solaire
qu’elle masque
et montre à la fois.
Cette puissance du psychisme
qui se défend en
exposant ce qui est censé ne pas
exister,
du moins,
être atténué
jusqu’à l’invisibilité,
être
rangé
dans un tiroir
qu’on n’ouvre pas.
Ce fameux tiroir
propre et figuré
qui brûle les doigts,
qu’on laisse s’empoussiérer.
Ce combat
si intense
du psychisme
qui luttera
jusqu’au bout de ses forces
en étant incapable d’être malhonnête.
On pourrait dire qu’il l’est
puisqu’il inscrit et recouvre
dans le même temps.
Mais d’abord,
et avant tout,
il inscrit.
D’une manière ou d’une autre,
il portera l’empreinte
au sol
au corps
au ciel
au cul
de la blessure
et
du persécuteur.
Le soleil est immensément
douloureux,
sa brillance
s’étend,
au-delà des tentacules
mal intentionnées
même rose bonbon
layette
ou PQ.
Un rose écœurant,
un rose sale,
un rose qui dégueule
un rose porcin.
Un rose qui donne envie
de noir.
Un rose qui agresse
qui n’est plus à sa place.
Qui prend tout la place
dans son impudique nudité.
Un rose
agressif de
chair et de peau.
le grand soleil est là pour lutter
tout comme il est l’ennemi,
et tout s’entremêle,
mais aussi grand
que sa forme s’étale,
le rose dégouline.
Ce n’est pas du sang,
c’est pire que le sang,
c’est le corps à corps
obscène.
La blessure n’est pas ouverte.
Elle toupine
comme une enragée
dans l’intérieur
ravagé,
déserté
dorénavant.
Adviendra-t-il
une nouvelle vie
après la mort ?


mardi 24 juin 2014

Comme on n'y croyait pas

Le cœur s’ouvre
et on se dit
qu’on arrive
à aimer
aussi fort
qu’on croyait pas.

Le cœur s’ouvre
et le trafic explose,
périphérique
parisien
de chair et d’os.
On se demande même
comment ça ne se voit pas
tous ces échanges
de lourds.

Le cœur s’ouvre
et le poids qui
soulève
et décolle,
qui empêche de
s’ancrer
et même de
toucher
par terre,
s’envole.
Pas d’un coup
comme par magie
mais goutte à goutte.

Le cœur s’ouvre
et on pardonne
on dépasse
comme
on n’y croyait pas.
Comme
on s’y croyait pas.
Comme
on avait juré
que ça n’arriverait pas.
C’est pas qu’on voulait
à tout prix
grogner
et en vouloir.
C’est que c’était
comme ça
et qu’on n’y voyait
rien
d’autre.

Le cœur s’ouvre,
on est resté
la même
mais
on a concentré
l’univers.
Ou il s’est resserré
lui-même
autour de soi.
Les mailles sont
pleines,
pas un froid
ne traverserait.
Les rancunes qui
à un moment
ont creusé une place
ont donné un sens,
perdent leur raison
d’être.
Elles ne s’effacent pas,
elles reculent
et
patientent.
On le sait,
on n’est pas idiote.
mais ,
elles n’avaient jamais rien cédé
qu’un
demi-millimètre
jusqu’à présent.
C’est leur trou
leur patrie
qu’elles abandonnent
aux nouveaux venus.
Ces nouveaux
et
nouvelles
qui parlent
des racines
qu’on
avait aborrhées
et vomies.
Les nouveaux venus
du fond des temps.
Les plus anciens
qui attendent
leur heure.
Parce qu’on n’est rien sans eux.
Déjà qu’on ne veut pas dire grand-chose.

lundi 23 juin 2014

Un doigt de magie

Immense
et « ça finira ».
Moon Walk
sur place
parce que
la vie
ne recule pas
mais que je ne veux pas
vraiment
avancer.

Immense
de tendresse
et « ça finira ».
J’en perds le souffle,
sa régularité
n’est plus assurée,
je ne sais plus
comment laisser
battre simplement
mon cœur.
Il virevolte
tamponne ses parois
et me glisse
entre les doigts.
Il entraîne
toute la bande
des organes
sérieux
ou
grincheux
le plus souvent.
tous
se découvrent
une âme
de
joie
et turbuleuse.
Les plus discrets
s’animent,
ceux que je n’entends
jamais,
tapis au fonds
du corps,
se manifestent aussi,
à leur manière,
pas toujours agréable,
mais je me sens vivre
et danser
en infinies guirlandes
de chair
aimante.

Immense
de
délicate
tendresse
et « ça finira »,
dit la petite voix.
La petite voix et moi.
On est comme les deux doigts
de la main.
Elle est devenue moi
ou j’ai toujours été elle,
je ne sais plus cela
non plus.
On s’aspire l’une l’autre.
Et même si je peux la détester
souvent,
je suis d’accord avec elle.
Sauf là
où elle me semble bien
arriérée.
Moi qui la croyais si
sage !
A trop dézoomer,
elle en a le nez dedans
et les yeux tout bouchés.

Immense
comme les 360°
d’une mouche
sans rien tourner
de la tête.
Bien sûr que la vie
ne durera pas
avec un cœur
en boîte de nuit
tout le jour.
Ca finira
mais je n’échouerai
pas
comme beaucoup d’autres
fois
comme une débile
baleine
sur une crique
de moineau.
Ca finira
mais je suis déjà
empreinte
de cette
immense
fête
imaginée
de rêve en rêve
de scène en scène.
Lourde chute
au plancher
des vaches,
même !
trouée
honteuse,
maintes et maintes fois,
par le passé.
L’immense
fête
à laquelle
je rêvais
d’assister
se déploie
sous mes seins
et ma gorge
nouée
d’envie
et
d’amour.

L’immense
soin
dont tu caresses
chaque minuscule
morceau
de l’univers ;
l’immense
douceur
dont tu apaises
chaque chose
qui nous entoure,
ne bercent
que
le sous-sol de mon être.
Le reste,
tous les étages,
décompensent
en folie
bienheureuse
sous tes doigts
de magie.







dimanche 22 juin 2014

L'âme aux mains

Je voudrais m'attacher
à toi
ton corps
ta main
ta forte main.

Je voudrais que la mienne
et la tienne
s'aimantent
sans besoin,
ni boutons
ni agrafes
ni pressions,
d'une quelconque
fermeture
mécanique.

Je voudrais que nos peaux
s'appellent
et se trouvent
par un chemin
qui leur
appartient
à elles seules
et que je suis
incapable
de penser.

Je voudrais un éclair
invisible,
un chemin allumé
par ses lampions
dans une sombre forêt
où je suis interdite
de raison.

Je voudrais devenir
un être d'intuition
intelligent du tréfonds
du corps,
comme toi,
un être intelligent
de toutes mes mains,
agile et solide
du plus creux de la paume,
au bout le plus sensible
des doigts.

Tu es un de ce serres
qui comprennent le réel
comme du braille
décrypté
à la baguette.
Tu poses les yeux,
imposes les mains,
les dégages,
les engages.
Tu te mets au travail
avec l'infinie douceur
de ceux qui savent
toucher.
Sans peur.
Avec les mains
mais avec tout le reste
aussi.
L'âme aux mains.
Tu embrasses,
enlaces
les objets,
toutes les plus petites choses
avec le respect
que d'autres
n'offrent pas même
à leurs pairs humains.
Tu ne prends
jamais
sans délicatesse.
Tout devient
digne
à ton contact.
Je suis moi-même
précieuse
quand tu t'approches
et me saisis,
me serres
et me caresses.
Précieuse
vivante
entière
lourde et légère à la fois.

Je voudrais qu'un fil
de soie
aussi implacable
que l'araignée
étoilée
nous relie
jour et nuit,
parfois ténu,
parfois lâche,
parfois vibrant,
parfois secret.

Je voudrais
je voudrais
encore
je voudrais
toute la magie
d'une poésie
et ses images
et envolées.

Tu me touches
et tous mes
'je voudrais'
prennent vie.

lundi 16 juin 2014

Chemin bonheur

Ces moments absurdes
de lutte pour la survie.
Tout est un mal.
respirer exaspère.
Bouger sauve
pourtant.
Pour personne.
Juste pour soi.
Pour pas moisir.
Pour pas vomir.
Pour ne pas fondre.

C’est parce qu’autre part,
juste à côté,
on sent le grand bonheur.
Et encore quelques heures,
il faudra patienter.
Mais parfois,
la coupe est pleine
ou la cuve vide.
On racle les
raclures
et on trépigne.
On piétine ces devoirs
auxquels nul n’échappe.
C’est
encore
plus
énervant,
rien
qui
console
de
nous
savoir
tous
à la même enseigne.
Franchement,
« T’es pas la seule ! »
ça aide qui ?
Si je pouvais
tout balancer,
tout valdinguer
et rire
de l’immense bazardite.
Aiguë !
Et le cri
stridulation
victorieuse.
Il faut
tout
de
même
patienter
tout
dou
ce
ment
ma p’tite
dame.
on
ne
fait
pas
ce
qu’on
veut
dans
la
vie.
Les horloges
deveinnent
de sadiques
manipulatrices.
Elles-mêmes
regardent le chemin bonheur
d’à côté
et prennent tout leur temps.
Elles ne changeront rien
à leurs manières.
Elles sont fières.
Elles se disent absolues.
Elles se targuent
de hauts principes,
perchées sur leurs aiguilles.
Des mégères
en bel habit.
Le chemin bonheur
d’à côté
se prélasse
sans moi.

Je rage
et je sais pourtant
que
le savoir
le sentir
tout juste
à côté
à un pas
dans deux heures
m’enveloppe de tendresse.
J’enrage
et me love
dans l’envie
et désir
qui serpentent
tout au long de ma
journée.
Je les rejoins
le soir.
Dans ses bras.
Dans les miens.
Quoi est à qui ?
Je ne sais plus
alors.

Feu et courage

Reculer,
même à tout petits pas,
pour ne pas y toucher.
Trop brûlée,
mille et mille fois,
à vif,
pendant
des jours entiers
lents et
poignardeurs.
Aujourd’hui,
je me tiens prudemment
à côté
du brasier.
A côté,
en deçà.
Il y aura un moment
où,
je devrai
traverser,
malgré tout.
Un court moment à passer.
A passer.
Une énième brûlure.
Comme tout le monde.
Je jouis
de ma petite marge de
manœuvre,
même minime,
elle me semble
formidable.
je la savoure
dans tous les sens
et je contourne
les flammes
dans tous les sens.
Ma quiétude commence à
s’amenuiser.
Tous les chemins sont
épuisés.

Il faudra du courage.
Le courage est un
être fantasque.
Un lutin.
Facétieux.
Il surgit
sans crier gare.
il faut l’attraper
et entendre son rythme.
faire comme lui.
Le suivre.
Pas le rater.
Parce que traverser sans lui,
c’est la bombe assurée.
En mille morceaux
de bouts de chair
cramées
à reconstituer
en puzzle.
Le courage
c’est le bouclier.
Sans lui,
du suicide.
Mais
il n’est pas encore arrivé.
On en a moins
quand on n’est pas
désespéré.

Le courage est un lutin
facétieux
qui surgit
de son trou
de lapin
et se gonfle
en quelques instants.
C’est un brutal.
il tire un coup
et puis s’en va.
Un passeur
qui ne tend pas de main.
Il est fort
entier
énorme
mais
il ne propose rien.
Il s’impose
et puis s’en va.
Le feu ne bougera pas
mais lui
s’envolera.
Jusqu’à la prochaine fois.
On ne sait pas quand.
Il hiberne et
ça n’a rien à voir avec les saisons.

Le courage
me tombe dans les bras,
sur les épaules
s’infiltre jusqu’au bout
des doigts
et me redresse.
Ils ne sont plus ballants,
les mains ne tâtonnent plus.
Elles sont agiles
et sûres.
Elles dentellent
dans l’air.
Maîtres d’œuvre
armées
de Lutin courage
et sa magie d’un jour.
Il force
pieds
et mains.
Les quatre s’appuient
à l’air
au monde
s’accrochent
et se balancent
arabesquent
avec la souplesse
des gymnastes
roumaines.
Flips et saltos,
l’énergie
du combattant,
confronteur
à pleines mains.

Le feu finira par
danser avec moi,
moi en lui.
La vie est un cirque.
Lutin Courage y gambade
et dompte les
brûlures.