dimanche 30 juin 2019

Cuba et ses anciens

‪Les doigts sans sou tirent sur les poches, minuscules ailes impotentes ;‬
‪Plus qu'à se dandiner en clown le pied canard.‬
‪Mais les mains fières saisissent présentent au monde‬
‪Les vieux-naquis ridés de plus d'un siècle ‬
‪Guillerets au creux des leurs nouveaux-nés.‬

Capitaine ma capitaine

Femme chasseresse enfonce murailles mitrailles en bêtes à cornes.
Robin des bois ou Mariane des mers.
Dans son giron virile protège les éperdus.
Défie les lois des fiers, en genre et en nombre. 

30 juin

Tu ouvres les mains
En un nid et je m'y love ;
Soutien de mon souffle.

Giraffe

Lofty giraffe high and higher verticalled
But the animal softness defies the path and breaks thé neck
To cuddle the little beloved somehow. 

samedi 29 juin 2019

29 juin

L'enragée crache ses cendres
Arrache dents et craque
La peau reptile fumante.
Les cendres du jour
En tourbillons invisibles s'élèvent
S'étoilent et allument la nuit. 

vendredi 28 juin 2019

Les yeux saisis s'ouvrent grand
Sous le coup brûlant
Haut-le-cœur et cils luisants. 




Scintille au jour d'or
Miroite au crépuscule
Luisant dans la nuit bleue

jeudi 27 juin 2019

Sous pépiements bavards
Arabesques cryptées volutes illisibles
Dans le script secret s'écrit le monde.

Alexis Potschke, Rappeler les enfants – Editions du Seuil



L'école, ses habitants et rebondir vers l'avenir

Alexis Potschke nous livre un ouvrage sur l'école, suivant ainsi une longue tradition littéraire. L'école, l'enfant, l'enseignant, l'accoucheur de pensée, l'élève récalcitrant ou volontaire et transmettre pour aider à construire les adultes de demain. Texte positif et joyeux qui fera revivre les envies des plus désabusés.

C'est d'abord à l'enfance que l'auteur semble dédier son écrit. Il rend hommage avec tendresse et surtout humour aux petits 6èmes et aux moitié-grandis de 3èmes. Ils les dépeint dans leurs travers, leurs particularités, leurs irréductibles individualités. Chacun prend corps au sein de la classe et tient son rôle dans le groupe d'enfants comme un vrai personnage. Pas de caricature. Pas de ridicule. Pas non plus d'utopie. Un regard optimiste et bienveillant sur ces jeunes, turbulents, silencieux, agités, effacés, drôles, curieux, agaçants. Un peu de tout, l'arc-en-ciel d'une classe lambda.
Alexis Potschke avec beaucoup de justesse humaine remet à leur place d'enfants ces élèves encore petits derrière leurs grands airs. Ils sont fragiles, dépendants, et terriblement ou formidablement perméables à l'adulte qui leur fait face et à son message. En aucun cas, il ne s'agit de démagogie, de tout excuser. Ce livre est bien plus intelligent que cela. Il s'agit de la véritable bienveillance, sous-tendue évidemment par le désir de comprendre l'autre et de le respecter. Aussi de l'admirer, quelque âge qu'il ait, dans ses forces et ses combats.

C'est également l'occasion pour l'auteur de nous faire découvrir les coulisses des enseignants, ceux qu'on a imaginés tout au long de notre scolarité, dans leurs mystères qui nous paraissaient si lointains. La salle des profs, la correction des copies, les rentrées, les fins d'années etc. C'est un témoignage vivant et plein d'espoir de ce métier et de son quotidien. Les difficultés comme les plaisirs en sont dessinés. Ceux qui s'en sortent et ceux qui pataugent. Réaliste mais imperturbablement positif.

Rappeler les enfants octroie à chaque corps social en question une place importante. Une place de valeur. Sans doute comme il devrait en être aussi davantage hors de ce texte. Les discours ambiants aujourd'hui,qui ne l'a pas observé ?, blâment les enseignants ou les dénigrent, se plaignent de la médiocrité et du manque de respect des jeunes. Chacun a ses raisons et là n'est pas la question. Ici, l'auteur s'engage sous son ton léger précisément à soulager du poids de leur mauvaise image l'école et ses protagonistes. On y trouve un regard original et qui ne souffre pas, dans la souplesse pourtant, de hargne ni de rage aveugle. Ouvrir les yeux autrement et se décentrer de ses préjugés ou opinions trop longtemps remâchées, voilà à quoi nous invite M. Potschke. Pas de propagande tout de même ni de manifestation pro-Education nationale. Nous sommes dans une position éthique qui dépasse largement les querelles de clochers.

Rappeler les enfants se lit comme un roman. L'écriture fluide et habitée d'Alexis Potschke nous entraîne ou nous ramène plutôt dans l'univers du collège et peut-être nous réconcilie avec. A contre-courant du sombre ciel qui plane sur l'école et ses habitants dans toutes les bouches ou presque, une vraie bouffée d'oxygène.


Alexis Potschke, Rappeler les enfants – Editions du Seuil – 9782021420081 - 19

‪Fleur d'atome‬
‪Mer de sable alvéolée‬
‪Dunes liquides éclosent pétales.‬



http://www.nancywoodartist.etsy.com/
@nancywoodart1

27 juin : chaleur de ville

La ville et son bitume fument
Vapeur glisse enveloppe
Dope grise et veloute.

Gros bébés dirigent le monde

Sérieux costards
Grands cols blancs
Aux manettes du monde.
L’air noble et grandiose
En pompes et hymnes
Brillants.

Mais
Sérieux costards
En couches culottes
Et cour d’école
Dressés cahin caha
Grosses cuisses potelées
De gros bébé
Ouïn ouïn
Il m’a fait mal
Maîtresse maîtresse
Il est méchant
Caca boudin
Les bras croisés ronchons
Le col blanc toujours droit
Les yeux secs
Et le cucul à terre
De colère
Parfois tapent des pieds
Et grognent
En ventriloques.
Derrière le grand bureau,
Caché le poupon rose.
Le pas beau moche qui a tapé
Demain
A la récré
Tu verras bien
Coup de pied
Vengeur
Et nananère !
Maîtresse les yeux noirs
L’index moral
Non non non non !
Mais bébé-rage
En rit sous cape
Se retire bien à croupetons
Mais les yeux levés
Droits dans ceux
De Dame Justice.
Petit malin
Tu finiras sous les verrous
Ou à l’asile !
Ou grand homme en col blanc :
Même combat.




mercredi 26 juin 2019

26 juin : Été

‪Le jour chaud exhale ses trésors‬
‪De parfums effluves, éclosion capiteuse.‬
‪L'animal bondit jappe et chasse en tous sens ces mille amusoires.‬

Mohammed Ben Zayed

Blanc immaculé il ouvre des bras de christ
Et l'argent pleut ; 
Télépathe en dollars, 
S'enroulent les liasses 
Et d'un geste minime
Dans ses tunnels 
Tissés en toile
Tout autour de la terre
Les entube 
Filent
Comme la lumière.
Subtile araignée
Robe albinos
Fileuse hors pair
Joue les échecs 
Des puissants sous leur
Averse d'or.


mardi 25 juin 2019

La course à l'éléphant

Placide et loyal éléphant
A heures perdues, aussi piétine et charge.
L'homme en noir et blanc ne sait plus quoi d'aimer ou de haïr.

lundi 24 juin 2019

Hong-Kong contre la Chine

‪Lilliputienne piquants jaillis du sol grattent le ciel‬
‪Minuscule hérisson montre les crocs face au géant fâché tout rouge‬
‪Qui fond sur lui, dévoreur ; mais David contre Goliath.‬

dimanche 23 juin 2019

Forçats du jeu video

Fourmis ouvrières programment
Neurones vrombissants
Tournent et retournent
La tête en grand huit sur leur clavier.
Les yeux pâtés approchent dangereusement
L'écran,
Le cou tendu,
Les veines battantes,
Une à une disparaissent
Happées 
Slurp bon appétit monsieur l'ordi !
De l'autre côté du miroir
Cigales jouisseuses jouent 
Neurones tordus 
D'heure en heure
Jusqu'à 
Fondre rejoindre pixels.

Tout ce petit monde 
Glissé
En quatrième dimension.

Carrelage claquant sous les hautes arcades
Cathédrale aux échos de plumes et écoliers 
Revient l’enfance et ses odeurs en enfilade
Les rêves ancrés profond sans jamais oublier.

Cloche-nid tête en bas berce
Doux et frais bronze d'éternité
Puis réveil sur pied joyeuse cloche ricoche trapèze de ding en dong.

samedi 22 juin 2019

22 juin : ring-monde

Tambouriner l'air bleu
Provoquer le soleil
Prêt à boxer la cour des grands.

Bas les masques !

‪Vierge douce bleue grande menteuse des siècles et des siècles ‬
‪Chausse le virtuel et ses lumières ‬
‪Se redessine branchée en habit de‬
‪Mais la Faucheuse qu'elle abrite en ingénue ‬
‪Cynique rit de toutes ses dents‬
‪Sous l'énième masque de la Madone.‬


by Ron English in Montreal, 6/17 (LP‪)

En famille

Petits chéris de sortie
Famille clopin clopan
Les bambins babillent 
Billes boules balles
Badaboum.
Le couple épaule contre épaule
Se sourit complice.
Maman c'est où qu'on va ?
Maman s'arrête et corrige :
Où va-t-on.
Maman ouvre en secret sa grande robe noire 
Le tout petit se faufile dans le giron doux.
Pourquoi t'as mis ta bouée Maman ?
On va à la piscine ?
Ils pouffent les parents.
Le gamin vexé.
Il va Boudet plus loin devant.
Reviens-là toi !
Papa Maman et le plus beau feu d'artifice 
Jusqu'au plus haut des cieux.
Les yeux gosses brillent 
Grands comme soucoupes.
Guilleret,
Rejoint ses frères 
Gambadent sur la route.
Passent la grande porte vitrée
Enfin arrivés 
Et Papa dit :
Tout le monde ensemble
On ouvre les mirettes et
Remercie Allah.
Les enfants s'impatientent 
Le temps d'un long regard.
Et boum la bombe humaine
Et tous ensemble
Aux anges.



vendredi 21 juin 2019

‪Petit homme qui monte qui monte‬
‪Couronné de son feu impitoyable‬
‪Les astres à portée de mains toujours plus haut dessus des nuages.‬


Photo de Kai Yhun


21 juin :

Colère noire sous ciel lumière 
Soleil flambant joueur et rage carabinée
Entrechoc bourdonne et darde.

jeudi 20 juin 2019

20 juin : Vent

Siffleur souffleur batteur
Vent fouette l'air feuilles tourbillonnent
Et tournent et s'emballent fourmillent mes rouages intestins.

mercredi 19 juin 2019

Le bon aloi, Arabie Saoudite

Petites souris bien sages
Garde-à-vous de laboratoire
A la chaîne 
Pays-usine
Idéale
À crever la bouche ouverte.
Tous idem
Sans bouger.

Fiona Kidman, Comme au cinéma, traduit de l'anglais (Nouvelle-Zélande) par Dominique Goy-Blanquet, Éditions Sabine Wespieser


Comme au cinéma ou le film du temps


Aux antipodes, le tableau de plusieurs époques successives à travers la vie de plusieurs générations d'une même famille. Le temps file et les personnages glissent d'âge en âge, de ruptures en retrouvailles, de partages en solitudes.



        C'est une sorte de fresque que construit Fiona Kidman dans Comme au cinéma. Elle traverse la fin du XXe siècle et le début du XXIe comme dans un traveling en effet cinématographique. La caméra sous nos yeux saisit la vie d'une mère puis de ses enfants, de leurs familles propres et de ces enfants-là à nouveau. Le temps s'enroule sur lui-même en arabesques infinies et le roman s'arrête mais pourrait ne pas. Le lecteur se projette en refermant le livre et poursuit cette course de générations en générations.

Ici, il n'y a pas réellement de héros. A choisir, il s'agirait davantage d'héroïnes d'ailleurs : les femmes prennent une place importante dans la narration. Belinda oui s'impose comme figure centrale autour de laquelle se tourne le film. Mais encore une fois, ce n'est pas elle dont il est vraiment question. Le temps, la famille et ses relations sont les véritables héros et héroïnes de ce texte. Les personnages restent floutés et même en premier plan, finalement secondaires.

      Le portrait de la famille que l'autrice brosse est sombre, c'est peu de le dire. La violence y prend grande part. Le besoin de s'en libérer, de s'en échapper. Vivre sa vie semble s'opposer à vivre sa famille. L'authenticité de l'individu ne s'y retrouve pas, pour diverses raisons. Les ruptures s'accumulent. Même si l'affection y est, elle est souvent brisée dans l’œuf. Loin de l'idéologie souvent à l’œuvre dans notre société contemporaine, d'une famille foyer, refuge, protectrice et pleine d'amour, c'est dans une optique plus réaliste que Fiona Kidman aborde le thème. La bienveillance, le lien puissant contre vents et marées n'existent pas ici.



     Pour parvenir à cela, l'écrivaine maintient de la première à la dernière page une distance, un flottement qui semble retenir l'attachement que l'on pourrait ressentir pour les personnages. Cela paraît même surfait, cet attachement, à la lecture de ce livre, comme superficiel et un peu inconscient. Le lecteur-spectateur doit entendre la vraie mélodie derrière les humains qui s'agitent en marionnettes. La nostalgie soutient ce recul permanent que l'on garde face à la narration. Nostalgie la tête un peu penchée, trop inquiète, trop réfléchie. Inévitable, semble-t-il. La poésie des paysages notamment nourrit cette nostalgie et sans doute alors, le temps-héros se voit adjoindre l'espace et son infinité vertigineuse.



     Ce qui interpelle dès le premier chapitre, c'est avec une certaine évidence le rythme de la narration. Il ne suit certainement pas un rythme littéraire classiquement retrouvé dans les œuvres françaises d'aujourd'hui. Peut-être le rythme est-il marqué d'  « anglo-saxie ». Cela m'en donne le sentiment. Toujours est-il que l'on n'a as le temps de s'apitoyer et, je le répète, de s'éprendre des personnages. La narration coule en rapides. Elle bouscule le lecteur, le pousse d'emblée dans ses retranchements. Abrupt, le récit ne concède pas de pause. Rien d'effréné, ne nous y trompons pas. Mais derrière un masque tranquille, des cassures au couperet et la vie qui avance sans concessions. Peut-être cette violence faite au lecteur fait-elle écho à la violence de l'existence en famille, de l'existence dans l'absolu, sous ses airs impassibles, ses airs de rien.



    Tel un long-métrage en effet, Comme au cinéma, roman qui s'enfuit et claque l'impitoyable temps qui passe. Sous couverture mais sans pitié.



Fiona Kidman, Comme au cinéma, traduit de l'anglais (Nouvelle-Zélande) par Dominique Goy-Blanquet, Éditions Sabine Wespieser, 9782848053271 – 23

lundi 17 juin 2019

Bac

Juin
Et resurgissent les flashs
Du grand lycée
Grouillant,
Fébrilité excitée
Impatiente,
Les salles de classe rangées
Comme en 40
Sur le pied de guerre,
On s'est senti un peu soldat.
L'attente
Le stylo voltigeur entre les doigts.
Puis la fameuse feuille encore interdite
Les jambes gigotent
Et le silence pointe.
Toutes les têtes commencent de
Ronronner
Qui en diesel
Qui en pétard.
Puis au signal,
Les nez piquent vers la table
Certains dangereusement
Mais s'approchent des mots qui désignent leur quête.
Soufflent
Tiquent
Dodelinent
Craquent.
Les dos ronds
Les plumes grattent.
Jusqu’au gong final.
Rituel ritournelle
De jour en jour
De juin en juin.
L’odeur cahin caha
De l’entrée dans
La cour des grands.

Liberté

‪Foule poulpe noir aux mille bras grouillants‬
‪Glisse aux pieds des gratte-ciel les enlace siffle sonne‬
‪Prêt à dresser ses têtes, épris de liberté.‬
‪S'envole et dessine ses battements a tue-tête ‬
‪Squelette de plumes, arêtes de lumière‬
‪La terre qui fait des bulles qui poussent qui poussent et retrouver son air.‬


17 juin

Invisibles piaillements
Remplissent l'air qui enfle en presque palpable ;
 L'espace ploie plein sous becs et plumes en planque.

jeudi 6 juin 2019

‪Cygne de ciel et glace miroite scintille le soleil vert‬
‪Dans son trône de lianes l'œil sévère ‬
‪Les champignons en chapeaux rouges fanfaronnent en bouffons.‬



Street Art by Jerooone in Stuttgart

Eric Pessan, L'homme qui voulait rentrer chez lui - Éditions L’École des Loisirs


L'homme qui voulait rentrer chez lui ou la rencontre de l'étranger.


Dans un roman d'apprentissage et d'aventure, Eric Pessan nous propose Jeff, Norbert, puis Julie et Eliott adolescents comme les autres ou presque. Leur monde s'apprête à changer et de multiples façons. Drôlement sans aucun doute. Entre fantastique et réalisme social, un texte étonnant et sympathique.



     L'adolescence en toile de fond certes mais pas franchement un roman à propos de l'adolescence comme il s'en publie beaucoup à notre époque. Du moins, pas clairement. Davantage une aventure originale et ses péripéties inhérentes. L'apprentissage aussi. L'expérience qui fait changer. Ce classique de la littérature quel que soit le public visé. En revanche, sans aucun doute, ce roman s'adresse à l'adolescence contemporaine avec aisance et finesse. Il nous replonge dans cet univers plus ou moins lointain mais marquant toujours. L'atmosphère sous-jacente est teintée tout de même de cette pâte adolescente : un quelque chose de sombre et la solitude, les secrets et les mots qui se cachent. Pourtant il n'y a pas de pathos ni de grands sentiments. Ne vous attendez à aucune effusion. On agit, on découvre et on s'initie dans L'homme qui voulait rentrer chez lui.



    Le héros, Jeff, qui nous raconte cette histoire a un frère, Norbert. Ils sont aussi dissemblables que possible. Ils ne se parlent pas, se croisent et ne partagent pour ainsi dire rien. Jeff ne tient pas son frère en haute estime et ne s'en cache pas. Cette relation fraternelle d'abord creuse va peu à peu s'étoffer et se muer à travers cette aventure partagée. Il n'est pas question ici de s'apprécier ou non. Plus en profondeur Eric Pessan suggère les malentendus qui sous-tendent le désintérêt mutuel des deux frères. Au fur et à mesure, ébahi, Jeff va comprendre qui est Norbert et se rendre compte de son erreur de jugement, injuste. Une tendresse de frères tous deux ados va naître, à mi-mots dans les dires de Jeff, en silence dans la réalité romanesque de leur relation. La pudeur de cet âge et l'émotion pourtant puissante sont transmises avec grande justesse.



      Le titre L'homme qui voulait rentrer chez lui aussi prosaïque qu'il soit masque un ouvrage aux nettes allures de fantastique. D'abord l'action se déroule dans un réalisme social affiché. Le lecteur est plongé dans un monde qu'il connaît bien, quotidien et familier. Il s'agit aussi de parler de la ville et de la place de chacun dans les meubles de la cité. Et puis, on est amené tout doucement, habilement c'est certain, vers une autre dimension du réel. On aura peut-être tendance à résister à ce glissement vers le fantastique car il semble tout à fait incongru. Mais n'est-ce pas là sa particularité précisément ? Il apparaît là où l'on ne l'attend pas et l'auteur exploite cela avec brio. L'on finit la tête dans les étoiles, dans tous les sens que peut revêtir cette image.



       Une narration juste qui entraîne tranquillement le lecteur. Calme et pourtant surprenante lecture avec des personnages attachants et un univers spécial. L'homme qui voulait rentrer chez lui intrigue et fait sourire. Une lecture fluide et agréable pour les jeunes.





Eric Pessan, L'homme qui voulait rentrer chez lui - Éditions L’École des Loisirs – 9782211239899 – 14,50

mercredi 5 juin 2019

Silk City

En mer de sable pays d'or noir et de Coran 
Chine déroule tapis de soie
Drape peu à peu sa ville, un deuxième coeur pousse pique les arabesques éternelles.

‪Leurs masques d'arlequin géométrie parade de tous les tons du monde‬
‪Aspirés par leurs pores patineuses‬
‪Se plient à l'ondulant bouche-à-bouche salvateur.‬



New Street Art by the brilliant Eduardo Kobra

mardi 4 juin 2019

Tracy Chevalier, Le nouveau, Editions Phebus


Quand le théâtre classique s'invite en modernité



Un monde d'enfants. Un monde pourtant loin d'être pur et la vérité non ! ne sort pas de la bouche des petites têtes blondes. Anges et diables, comme partout. La tragédie classique a sa place à tous les âges. Le Nouveau revisite le genre pas si suranné qu'on pourrait le croire, sur fond de racisme. Enjeux sociaux en cour d'école.



       Ce roman remonte cinquante années en arrière pour nous rappeler peut-être, même s'il ne semble pas avoir vocation moralisatrice, ce que fut d'être noir aux Etats-Unis dans la petite bourgeoisie blanche. Comme une question qui pique. Un tableau littéraire, très littéraire, de ce phénomène social. Il ne s'agit pas d'un manifeste mais il n'empêche que les mots interpellent. De nombreux films mettent ce thème en scène. Le cinéma nous en abreuvent même. Mais les insultes noires sur blanc ne sont pas chassées par le son des mots suivants et elles attirent l’œil encore et encore même quand la page est finie d'être lue. On y revient. Les mots clignotent et sans doute interpellent d'autant plus.

Rien de nouveau a priori donc dans cette toile de fond. C'est sans compter sur l'identité forte de ce roman.

      En effet, il y a tout d'abord l'enfance et la manière de l'auteure de mener une tragique danse dans une cour d'école. Elle n'hésite pas à désacraliser l'enfant bon et pur et se montre ici originale. Elle n'excuse ni n'explique les tenants et aboutissants des perfidies et coups portés. Elle raconte ce que l'enfant est, dans une variété de personnages qui apportent chacun leur touche au portrait de cet âge de la vie. Elle met l'accent sur les petits détails, les plus insignifiants pour des yeux d'adultes oublieux de ce qu'ils furent, détails qui font pourtant la différence. Le monde des petits précisément se joue sur des points infimes et subtils. L'intelligence de ces mécanismes éclaire l'ouvrage.

Il y a également cette forme très osée que prend le roman. Tracy Chevalier s'empare de la tragédie classique et l'adapte. En préservant la modernité de son écriture, elle fait de l'école primaire d'Osei, Dee, Ian et les autres la nouvelle scène du théâtre d'antan. Peu à peu, la structure du roman apparaît. Au fur et à mesure de la lecture, l'on perçoit cette dimension qui dépasse le cadre du simple roman d'enfance. Cela donne un aspect plus dur, plus rugueux à l'action et à son cadre. La portée et le sens en sont d'autant élargis.

La règle des trois unités est respectée : temps, espace et action. Cela crée cette impression de flottement, d'instantané suspendu dans le temps et l'espace que l'on peut ressentir au théâtre. Tout s'étire dans un lieu confiné et un temps où chaque tient son rôle. Chacun des protagonistes a sa place, attitrée et sa fonction. Bien entendu, tout cela n'est pas clair jusqu'à un point avancé de la lecture. Et puis toute cette ossature se fait jour et la deuxième lecture s'ouvre alors.

     Les symboles et images fortes s'égrènent au long du Nouveau. Ils restent comme imprimés : le bateau dans la cour, le filet sur lequel les enfants grimpent, le sable, le ballon, la trousse évidemment etc. Et ces images lancinantes d'objets notamment par leur couleur, leur forme, leur usage construisent l'édifice de la pièce de théâtre qui se joue sous nos yeux.

L'on est forcé d'entendre la tragédie d'Othello à travers cette histoire. Les deux textes se font écho avec intensité. Et là aussi l'intertextualité offre une profondeur à ce roman cette fois au sein de l'histoire littéraire.

     Un roman osé de Tracy Chevalier sous couvert d'une thématique classique. Riche et édifiant littérairement parlant.



Tracy Chevalier, Le Nouveau, traduit de l'anglais (Etats-Unis) par David Fauquemberg-Editions Phebus – 9782752911636 - 19

lundi 3 juin 2019

‪En robe d'étoiles les yeux charnus les lèvres globées‬
‪Femme sauvage son ombre forêt et sa biche d'Athéna‬
‪Chasse les mots sur le livre du temps.‬


German Artist duo street art Mural 


‪Cœur de corail poilu pierreux ondule‬
‪Tentacules fleurs de mer‬
‪Comme un bouquet final pétarade de couleurs.‬


Street Art o Louis Masai Found in Paris

3 juin

Mer s'essouffle terre s'évapore forêt prend soif
Peau de chagrin se corne
Humain croco mâche son monde.

dimanche 2 juin 2019

2 juin

Le souffle court
La cage resserre
L'esprit s'envole.

Florence Hinckel et Clothilde Delacroix, Renversante, Editions L'Ecole des Loisirs


Renverse le monde, ris-le et pense





Voici un petit ouvrage jeunesse qui met le monde sens dessus dessous. Pas de métaphore ni de jeu de mots. C'est bien l'envers et l'endroit dont les autrices, comme elles l'écrivent elles-mêmes, échangent les places. L'homme devient femme et vice-versa. Le genre questionné sans concession.



       L'on lit les quelques premières pages surpris et souriants. Florence Hinckel et Clothilde Delacroix se sont prise au jeu de faire de la femme l'homme et de l'homme la femme tels qu'ils se situent dans la société. L'on voit tous les masculins devenir féminins et inversement bien entendu, à tous les niveaux possibles. Rien n'est omis et les plus petits détails sont réglés sur ce nouveau pas.

Il n'est pas aisé de décrire ce livre, même d'en évoquer le contenu. Il s'agit d'une atmosphère, d'une structure interne à explorer par la lecture. Il se peut seulement affirmer que nos repères se perdent et que voilà une expérience qui conduit toujours à une fin intéressante.

       Quoi qu'il en soit, on a beau tenter d'imaginer notre quotidien en tant que femme dans une position d'homme (ou le contraire bien entendu) dans une société qui l'a instauré comme sa loi, on ne pousse jamais l'exercice jusqu'à l'extrême. C'est ici un exercice intellectuel qui nous est proposé qui nous oblige à tout repenser. La réalité s'éclaire alors sous un autre jour.

Sur la longueur, on peut un instant penser que le procédé s'essoufflera et qu'il devient trop systématique. C'est lorsque l'on est un peu comme dans le creux de la vague de la mi-lecture, vous savez bien vous qui lisez. Et puis, survient le regain et voilà que les mots prennent de l'ampleur. La réflexion à laquelle ils mènent s'avère bien plus profonde qu'elle n'a pu le paraître auparavant. Il s'agit du pouvoir. Il s'agit de la marche du monde, celle de tous les jours, parfois, souvent, invisible. Ce texte a une dimension polémique voire même politique certaine.

       L'accent est mis sur la langue, la langue française ici, qui emploie pour exprimer le genre neutre le masculin. Les autrices se saisissent de cette particularité de notre langue latine pour rire. Peut-être que même convaincu de la légitimité de la lutte antisexiste on n'avait pas jusqu'à présent penser cet épineux problème de la langue, se cachant derrière des considérations rationalisantes. Ici, rien ne permet de se cacher et d'échapper à la langue et son inhérente voix politique. Vous êtes immergé dans l'autre, l'étrange autre et cessez donc de battre des mains et pieds comme un petit chien. Cela est purement vain.

Les dessins essaimés au fil des âges animent joyeusement les mots. Ils redoublent le langage avec finesse et par un autre biais qui nous parle plein les yeux. Ce qu'on ne voudrait peut-être pas entendre ne se peut plus !

      Cependant, une fois qu'on a passé en revue toutes ces sérieuses considérations, l'on se doit de parler du rire. Chaque page a sa sortie saugrenue, son bon mot et une saillie inattendu. Saillie précisément : ce texte est rempli de petits reliefs drôles et intelligents. L'on ne peut pas s'ennuyer et l'on attend la prochaine bouffonnerie.

Car c'est le fou bouffon du roi auquel on pense ici, celui qui renverse le monde et se joue des lois du monde. Celui qui a le droit d'avancer tête en bas pieds en l'air et de moquer le monarque et tous les seigneurs messires. Celui qui assure de ne pas perdre la raison en croyant absolues règles du jeu. Fou bouffon garde-fou. C'est le rôle que peut endosser ce petit livre.

     Adressé aux enfants. Réellement, il vaut la peine d'être lu par tout adulte. Il n'est pas de petit genre. Et pas de petite pensée. Je vous jure en tout cas mes grands dieux que je le prêterai sans hésiter à ces adultes qui m'entourent. Tout comme moi, ils en ressortiront un point d'interrogation en plus dans la tête.




Florence Hinckel et Clothilde Delacroix, Renversante, Editions L'Ecole des Loisirs, 9782211239387, 10

samedi 1 juin 2019

‪L'œil myrimorphe claireur goutteux réflexe de verre et d'eau‬
‪Soufflé branché implacable cils de biche‬
‪Pièce puzzle mouvante.‬


MyDogSighs creates a new mural for Upfest in Bristol, UK

Bras ballants timide hula hoop
Enfant inquiet 
Gobe le vide et le soleil mûrit l'avenir.