mardi 23 août 2016

Le don la dette

Lire écrire,
Avaler recracher,
Consommer produire,
Absorber excréter,
Apprendre transmettre.

Entre les deux,
Penser,
Ruminer,
Reposer,
Se nourrir,
S’approprier.

A l’intérieur encore,
Décomposer,
Fragmenter,
S’étirer,
Diffuser dispatcher distribuer
S’imprégner.

Et dans cet aller retour
Incessant,
Faire son miel.
Besoin de personne mon cul !
Prendre et rendre,
Sans cesse,
D’avant en arrière
En bilboquet,
Ou plus téméraire
En dansant le tango.

Lire et écrire,
Recevoir puis donner,
Par nécessité
De tout organe,
Celle de partager,
Celle de se débarrasser,
Celle d’expurger ses bas-fonds intérieurs,
Celle de ne pas peser trop
Sur soi-même,
Les autres
Et le monde,
Celle de ne pas être boulet,
Par sens éthique,
Parce que le don la dette,
Va et vient
Incessant
Incontournable,
A moins de finir
Au bout d’une corde,
D’un fusil
Ou derrière des barreaux.
Je suis donc je dois.
Je suis donc je donne ?
Si je peux
Si je veux
Si je tiens à mes fesses.

lundi 22 août 2016

Vertigo au placard

La peur du vide,
Du trou,
Du nuage traitre,
Du sol meuble
Et du corps
Aspiré
Disloqué
Foudroyé.
Toujours eu ce vertigo
Ou peut-être envie de
Toujours l’avoir eu.
Pour la cohérence.
J’ai le vertige
Et décide par la même
Que :
- Je n’ai jamais fait d’escalade
- Je ne suis jamais montée sur le tabouret pour aller chercher les assiettes de famille tout en haut du placard
- Je n’ai jamais voulu même ma chambre au 2ème étage.
- J’ignore absolument pourquoi et quand le vertigo m’a prise
Toujours été comme ça.
Quoi donc de plus normal
Que de
Voir des chandelles
En me jetant dans ce même vide tant redouté,
Du haut d’un avion
Vrombissant ?
Lâche prise !
Cesse cette guerre intestine !
Profite au moins pour l’avenir
A défaut du passé !
Sans les mains mon amie !
Alors,
Comme c’est dit et redit
Avec une bienveillance
Et une conviction
Vivantes comme
Un coeur à mains nues,
Je saute.
Je frissonne et
Je saute.
J’ai peur,
De tout,
De tout le monde,
De toutes les heures
Surtout.
Parce que le vol
Ne sera pas un freluquet.
Il sera de longue haleine.
Quelques jours.
Quelques semaines peut-être.
Et il faudra bien,
A un moment donné,
Que j’aie moins peur
Et vertigo ira viendra.
Les vieux personnages
Haïs
Effrayants
Les sorcières de placard
(C’est bien le thème aujourd’hui,
Dites !),
Danseront dans mes rêves
Et même au réveil,
Et jusqu’au soir.
Ces gens qu’on a tellement haïs
Qu’on se demande si on ne les a pas
Aimés aussi.
En tout cas,
Ces furieux qui soutiennent la
Colère.
Ceux qu’on tabasserait aujourd’hui
Encore.
Mais qui ont bien servi.
Ceux qui
Plus sournoisement
Aussi
Ont empêché.
Ils sont tous là
De plein fouet
Et on aimerait
Les revoir.
J’aimerais les regarder
Dans les yeux
Et me voir
Dans ce miroir.
Pouvoir réparer
Mes douleurs
Face à eux.
Les regarder et
Qu’ils écarquillent les yeux
Parce que
Oui
Je suis devenue
Ce que personne n’imaginait.
Ni eux ni moi,
Surtout pas moi.
Surtout pas moi,
Et eux finalement,
Peut-être que
Si.
Mes sorcières de placard
Haïes,
Qui me font encore trembler de colère et
D’amertume,
Comme une toute jeune,
Peut-être m’estimaient
Davantage
Que moi-même face à elles,
Mesquines et tranchantes.
Le sens n’est jamais
Celui qu’on croit.
Grande réunion
En plein vol
Avec tous ces fantômes
Revenus pour de vrai,
En chair et en os,
Et je n’ai plus peur.
Je suis contente de les voir.
Pas une fin hollywoodienne
A deux balles.
La personne que je suis devenue
Que je n’imaginais pas.
Que je n’aurais jamais osée.
A force de tourner d’un millimètre
De mois en mois,
D’année en année,
Dans les périodes fastes,
De semaine en semaine.
A force de trouver,
Croiser,
Ou serrer fort
Dans mes mains
Ou mes bras,
Juste de loin
Ou tout contre tout,
A force d’entendre
Et de voir,
Toutes ces fées
Et lutins,
Nounours
Et rigolos
Autour de moi.
A force d’avoir toutes ces chances.
A force de les savourer.
A force d’être aimée,
Sans comprendre pourquoi.
Je suis devenue celle que je n’aurais jamais osée,
Imaginée,
Peut-être celle rêvée très fort,
Tapie honteuse
Et puis
Aujourd’hui
Sautillante,
Qui vole,
Qui a lâché toutes les amarres
En plein ciel,
Qui ne pourra pas remonter
Au bord du vionvion
De départ.
Vertigo se marre.
Moi aussi.
J’ai le souffle coupé, par moments.
Les sorcières
A coups de talons dans le nez les yeux le ventre,
Et ceux qui ont aimé de toutes leurs forces
Malgré moi,
En colère eux aussi,
Sont tous là
Pour signer l’armistice.
Tentons la paix sociale
Et les 30 Glorieuses.
Mais tout le monde joue le jeu hein !
Sinon, on arrête tout !
Et vertigo reprendra les manettes.
Mais voilà le plus improbable
Scénario.
Cette fois,
L’échec est impossible.
Parce que j’ouvre les mains
Et advienne que pourra.
Plus de podium ni de record à battre.
Quoi qu’il m’arrive,
Je le saisirai
Et en ferai mon grain
Et mes histoires,
Mes mots.






vendredi 19 août 2016

Chronique d'épuisée

Essoufflée avant d’être partie,
Avant d’être levée.
Essoufflée seulement d’avoir
Pensé.
Incompréhensibles tête et corps.

Quand l’armure est déposée,
Je ne sais plus même
Respirer.
Entourée de tous côtés,
Bordée comme un coq en pâte,
Douillette
Et pourtant
Épuisée de haut en bas.

Épuisée-désarmée ?
Épuisée-hébétée.
Épuisée-nouveau-né ?
Épuisée-enragée.
Dans une colère noire,
Celle d’un affamé,
Contre des forces obscures
Qui m’abattent,
Me fatiguent,
M’épuisent.

Frapper les murs
Et espérer magie.
Froncer les sourcils
Jusqu’à s’en meurtrir
Le front.
Je ne sens plus rien.
Je veux sortir des boues
Ramollissantes.

Tout est là
Tout autour !
Que te manque-t-il encore
Sale gosse ?
Qu’exigeras-tu cette fois
Pour sucer toute la moelle ?
La tienne propre, imbécile !
Je hurlerais
Si j’étais chiche.
Je dégainerais
Les poings.
Mais non, pauvre dinde !
Trop fatiguée même pour la colère !

Épuisée
Jour et nuit.
Même en dormant.
Même avec tous mes doudous
Joujoux
Ronrons.
Donnez-moi la formule
Et pas en barre chocolatée !



jeudi 18 août 2016

Etre et avoir

Bordée de toutes parts.
Entourée de tout le possible.
Toutes les nuances,
Toutes les textures.
Plus un poil de vide tout autour
De moi.
Je suis choyée.
J’ai tout récupéré.
Ce qu’il fallait,
Par-ci par-là
Pour pouvoir arrêter le train
Et m’asseoir en tailleur.
En tailleur
Parçe que c’est plus calme
Et plus lointain.
Parçe qu’en tailleur
Déjà en maternelle.
Déjà j’existais,
J’en suis bien sûre
Ainsi.
Sûre et certaine.
On n’est sur de rien.
Pas même d’avoir été.
Encore moins de ses souvenirs de tout-petit
Que personne ne partage.
L’enfant est le plus seul au monde.
Mais me voilà
Parfaitement entourée.
Parfaitement calée.
J’ai tout ce dont je rêvais.
Avoir ne suffit pas pour être,
Heureux en outre.
Mais c’est un bon début.
Pas question d’être matérialiste,
Consumériste,
Objectiviste.
Absolument pas ça !
C’est au contraire qu’il faut
Stopper,
Quitte à faire crisser les rails
Et faire beugler toutes les vaches
Alentour,
Le fou à 300 à l’heure
de la relativité,
De la subjectivité,
De l’éventualité.
Pas un cours abscons
De philosophie.
Pas non plus un manuel.
Non, pas très poétiques
Tous ces mots en « ité ».
Nécessité
Oblige.
Justifier les cercles concentriques
Arc-en-ciel,
Dégradés,
Au complet.
Et moi au doux milieu.
Pas pour encore une fois,
Egocentrer la chose.
Bien au contraire,
Pour sauter hors des murs
Et revenir au creux
Quand on aura bien ri,
Bien aventuré
Tout le jour.
Pour pouvoir enfin
Jouir de la vie
Parce qu’on sait que le foyer
M’attend.
Tout est en place.
Plus à courir partout
Toute la nuit
A la poursuite.
J’ai et je peux enfin
Etre en entièreté.
Avoir pour être ?
Toi qu’on croyait fille des profondeurs !
Eh oui,
Avoir pour être,
Avoir tout enroulés autour
Tous les outils,
Tous les amis,
Tous les joujoux,
Tous les doudous,
Tous les ronrons,
Tous les froufrous
Qui bouchent les trous.
Les trous normaux,
Les trous d’humains,
Et les trous malins,
Les trous marteaux,
Délires,
A la kalach.
Ceux qui gâchent
Tout.
Alors oui,
Avoir tous ces bouches-trous
Pour se permettre de courir
Libre comme l’air,
En tourbillons,
Et être
Comme on n’a jamais pu.
Parce que
Manquez manquez manquez
Et vous n’êtes plus rien !
Un déchet,
Une ordure,
Pas même bon à suicider.
Vous n’êtes rien !
Dépouillez-vous
Et manquez !
Encore et encore.
Vous verrez bien
Qu’avoir donne à être
Et être avoir.
La langue est un génie.

mercredi 17 août 2016

La fin de la guerre

Lâcher les rênes
Et laisser se cabrer la monture,
Hennir comme une folle,
À nous faire valdinguer
Sur la terre froide et dure.
Lâcher tout en sachant
Qu’on retombera
Sur le même sol
Amer.
Pas cruel,
On n’en a fini de croire
A la cruauté
Du méchant monde
Dans lequel
On n’aurait,
Pauvre petit être fragile
Et brimé,
Pas sa place.
Fini les jérémiades de jeunesse
Mais la terre
Mère
Peut être toujours aussi
Dure,
Intransigeante.

Ne te repose sur rien !
Ne t’arrête jamais !
Bats-toi et ne vois que le but !
N’écoute pas les douleurs !
Elles trompent et ralentissent !
La vie est une guerre !
Entraîne-toi sans relâche !
Dès maintenant et pour toujours !
Pour les siècles des siècles !
Prie si tu veux mais ne t asseoir pas pour pleurer !
Si tu pleures, laisse rouler les larmes sans cesser de frapper !
Laisse les yeux s’embuer si tu veux mais ne faiblis sous aucun prétexte !
Tu es une amoindrie !
Tu n’es pas une vraie.
Tu dois te battre plus !
Toujours plus et encore !
Ta vie sera sans aucun doux repos !
Ou ce sera la mort.
Ou tu t’embourberas.
Ou tu verras, les mains stupides,
Tes pieds s’enfoncer
Dans le sol meuble qui t’aspirera
Vers le fond.
Pas les beaux fonds marins,
Colorés,
Poissonneux,
Caressants.
Les sables mouvants qui
Asphyxient
Et tout petit à petit
Attirent vers la boue merdeuse
Et brûlante ou gelée
Du fond du trou.
Tu verras ton corps disparaître
Centimètre à centimètre,
Impuissante
Et tu hurleras de rage.
Alors, pour tout cela, ne cesse jamais de t’apprêter
Au combat !
En armure coûte que coûte !
Debout !
En mouvement !
En courant !
Dépêche-toi !
Agis avant qu’on ne le fasse pour toi !
Et sommeille le moins possible !
Ou,
Souviens-toi !
La terre t’aspirera.

Lâcher les rênes
Et ne pas courir,
Ne pas agir,
Ne pas tournicoter.
Pour voir si
Oui ou non
Ce salaud de sol s’ouvrira
Sous soi.
S’il est si violent qu’on nous l’a fait
Accroire.
Si la catastrophe arrivera.
La guerre ne tient pas toute une vie,
Ou elle finit en meurtre.
Alors lâché les rênes
Désormais,
Dit la mer
Apparue à l’horizon.
Lâche les rênes .
Le sol est dur,
La monture sans pitié.
Mais tu ne mourras pas.
Tu seras seule.
Tu seras à nouveau l’enfant.
Tu seras à nouveau lave
En fusion,
Exaspérée,
Acculée.
Mais la terre ne s’ouvre que
Dans la Bible.
Tu n’es qu’humaine.
Grand bien te fasse
Et laisse-toi tomber au sol dur,
Les couteaux pleuvoir de toutes parts.
Regarde-les.
Retire-les un à un.
Et moi la mer,
Je serai à tes pieds
Pour te caresser
Jusqu’au bout du monde.

dimanche 14 août 2016

Nouveau-né

Ne plus céder,
Ne plus tomber,
Ne plus sombrer
Et s’aveugler.

Relever la tête,
Les cervicales rouillées,
Qui grincent,
Qui pincent.
Salopes !

Mais,
Quitte à jurer,
Ne plus céder,
Ne plus baisser
Les bras et le dos
S’affaisser.

Les poings levés,
La pose est bête
Mais aide la tête
À reprendre place
Capitaine en chef.

Ne plus ouvrir
Les mains vidées,
Regarder les doigts mous
Céder à l’arme facile
Qui berce dans son giron
Loveur.

Découvrir sa poitrine,
Crever d’envie de se recroqueviller
Mais bomber le torse
Sans y croire
Au début.

Ne pas croiser les bras
Et se cacher,
Écraser ses seins
Et poumons.
Ne pas cesser de respirer.

Et comme un nouveau-né,
Crier de douleur à la première
Goulée,
Meme aux suivantes,
Jusqu’à trouver le cran,
Le rythme.

Et ne plus céder
Désormais.
Parce qu’on a affronté
Poings levés.
La machine bloquée
Ne coince plus.
Le cou faut des tours
Et la tête caracole.

Ne plus céder
Jamais.

mercredi 10 août 2016

Tout oui mais pas la Lune

Tout fairevoircomprendre,
Traverser le monde de part en part,
Connaître les lieux les plus reculés,
Les plus grands secrets,
S’aventurer sur toute la terre.
Mais, se contenter de regarder la Lune.

Tout direexpliquervomir,
Tout sortir de son sac
Et se sentir léger comme une plume,
Se sentir solide sur ses pieds
Et volant comme un gymnaste chinois.
Mais, laisser la Lune à sa place.

Tout apprendrelireécrire,
De toutes les langues
Et de toutes les sciences,
À sautiller de joie,
Toujours émerveillé du nouveau livre en soi.
Mais, ne pas rechercher les étoiles.

Tout expérimentervivresentir,
Dans le corps et l’esprit,
Les mânes des ancêtres
Et les bêtabloquants
Pour être un légitime et intègre sachant.
Mais, revenir de la Lune.

On se croit raisonnable
Dans ses désirs
Parce qu’on a su dire
En grand sage :
« Non pas la Lune,
Je ne suis pas fou. »
On a cru que tout le reste
Ca n’était pas trop.
Humain oui
Mais pas débile.

« Je veux,
Je veux pouvoir,
Donc je peux...
- Tout ?
- Oui tout !
- N’essaye pas de tout réussir,
Tu n’auras plus le temps de rêver.
Ton esprit et ton corps mourront d’épuisement.
- Mais si bien sûr, je rêve aussi !
On ne meurt pas de fatigue. On n'en meurt plus.
- On meurt de tout mon cher.
- Je ne demande pas la Lune.
- Et qu’est-ce donc que la Lune ?
- Arrêtez !
- Qu’est-ce donc que la Lune pour nous humains ?
- Trop haut, trop loin, trop...
- Trop tout. La Lune c’est tout. Et ce n’est pas pour nous. »

Ce sera donc un peu,
Ce sera déjà bien,
Paraît-il.

Risque à trous

Ne pas risquer
Le manque,
Le gouffre,
L’attente
Impuissante,
Le trou au ventre.

Ne pas risquer,
Alors,
Tout collectionner
Accumuler
Superposer
Entasser
Jusqu’au haut du plafond,
Jusqu’à avoir l’air
D’un
Bibendum,
Jusqu’à ne plus pouvoir
Marcher.

Ne pas risquer
D’être honnête,
D’être réaliste,
De saisir les faits
Et d’accepter
Comme une grande.

Ne pas risquer
D’être honnête
En mémoire,
En souvenirs,
En histoire,
Comme la plupart
Pour cesser
De ressasser,
Dit-on, pas faux
Mais pas non plus exhaustif :
Aussi pour effacer
Les passés.

Ne pas risquer
De revivre
Le manque de l'enfant,
Du tout-petit,
La détresse,
Car elle est innommable
Et intangible,
Infernale
Et parfaitement
Comme une bulle
Sans issue.

Ne pas risquer
Tout cela,
Jusqu’au jour
Où l’on se rend compte
Que toutes les heures d’éveil
Que Dieu fait,
Ou le Diable
(Pourquoi d’ailleurs ne pas l’appeler
Diable,
Tout court ?),
Sont usées
À jouer le manque,
Le trou,
Les trous,
À jouer à vider
Reboucher,
Comme au bac à sable,
Comme le cracheur de feu,
Comme la mer.

Quelle connerie !
Tout ça pour ca !
A l’attaque alors !
Vive le manque et qu’il meure
Dans un duel à la régulière.
J’en sortirai
Aventurière,
Peut-être amazone
Sein manquant,
Et !
Honnête femme
De pied ferme.





dimanche 7 août 2016

Satine Glavial

Elle est comme n'importe qui. Elle est tout le monde, vous et moi, tous autant que nous sommes. Elle est Madame Tout le Monde. Unique et noyée dans la masse. Elle ne paraît ni plus ni moins que cela. Comme nous essayons tous de le faire, sauf quelques individus, ou trop fous et bons gestionnaires de leur folie muée en originalité, ou trop inhibés et douloureux aspirant à la transparence. Elle n'a l'air de rien, voilà le fin mot de l'histoire. 
 Elle n'a l'air de rien quand on n'a pas franchi les portes de l'intimité. Mais dès lors qu'on s'immisce dans ses narines, le monde devient un vrai dingue sans queue ni tête. Ces narines-là s'agitent, frémissent, se trémoussent, vibrent, pour des odeurs étranges, pas celles de tout le monde, précisément. Celles de personne. Ou plutôt celles de tout le monde mais la tête à l'envers. Les Beurk et Pouah sont des Mmmmmh et Sniiiif pour elle. Elle aime les odeurs bizarres vous dis-je ! Ca ne peut pas être si bizarre que cela ? Si quand même Messieurs Dames, bizarres bizzaroïdes. Vraiment. Enumération en bonne et due forme :
- caves, parkings et toutes sortes de souterrains bien fermés depuis des décennies
- fromages forts...
Bon, pas la merde et le vomi quand même hein !
     Elle aime par-dessus tout l’odeur des vieux escaliers, cette odeur de vieilli propre oui bien sûr mais vieux et à la poussière indélébile. Comme si jamais plus la poussière ne laisserait lui échapper ce territoire, par son odeur, à défaut de ses moutons. L’odeur indéfinissable de sous terrain, de parking, de cave, de caché, de monstre invisible qui se terre, dans cette odeur précisément.. L’odeur, pas de petits vieux hein !, ne lui faites pas dire des bêtises. Ce n’est pas une odeur de vivant. Ce n’est pas non plus une odeur de cimetière. Une odeur d’espace, une odeur de lieu, d’ici, de là-bas. Pas très exotique non, mais de quelque part qu’on ne contrôle pas. Introuvable en pharmacie, en nulle part. Qui surgit. Certaines plantes dégagent cette odeur, certaines plantes qui débectent la gentille petite femme rangée, que d’autres abhorrent parce qu’ils croient que c’est le sale. Parce qu’ils disent, pardon, que c’est le sale qui s’est incrusté. Satine, elle, les soupçonne d’avoir peur. Elle les soupçonne et puis elle le sait un peu aussi parce que le dégoût, ça vous protège de ce qui est dangereux, ce que votre cerveau croit dangereux. Cette odeur, c’est le noir, l’agression dans le parking désert,  le sombre, sous le lit, derrière les meubles, dans la grande maison de la grand-mère, les angoisses de tout-petit et les rires des adultes idiots.
Elle, Satine Glavial, elle se délecte de cette odeur, celle-là en particulier. Elle la fait sentir vivante, entière. Elle s’arrête dans un escalier, dans un parking, même tard le soir. Elle n’a pas peur. Pas par défi, pas par inconscience. Elle sent que cette odeur est pour elle, qu’elle y retrouve de l’être. Elle ne sait ni lequel, ni quand ni comment mais elle sait. C’est étrange. C’est inattendu. Satine est inattendue.
Il y a aussi l’odeur sans pitié de bouse de vache. Celle qui prend au nez en TGV quand on traverse la campagne d’un fin fond de la France. Celle qui fait s’exclamer tout le wagon et rire Satine. Elle se laisse plonger dans cette odeur alors que les autres tentent de s’en dépatouiller, en gigotant (drôle d’idée quoi de gigoter pour se défaire d’une odeur mais bon, il faut faire deuil de la rationalité de certaines attitudes humaines courantes), en se pinçant le nez si fort que les ongles laissent des traces. Ça ne fonctionne jamais, tout le monde le sait. Mais c’est plus fort que l’intelligence. C’est le besoin de ne pas se noyer dans cette merde qui leur monte jusqu’au cou. Ils barbotent comme perdus au beau milieu d’une mer de bouse. Ils font le petit chien, ils ne savent plus nager. Peut-être qu’on ne peut pas nager, brasse ou crawl, nages réelles, dans une mer de bouse, c’est une bonne question ça ! Bref, elle, elle aime sentir la nature plus forte que tout, cette odeur qu’elle n’assimile en rien à des déchets mais au contraire à la fertilité. Elle s’en abreuve, on ne sait jamais, si elle en es sortait plus riche et plus forte. Elle est au moins sûre que personne ne lui volera cette odeur-la. Elle peut disposer de tout en toute la liberté.
 Et le Monsieur le Roquefort ? Même catégorie de ces odeurs puissantes, qui envahissent les narines et tout l’intérieur si l’on ne lutte pas contre. Moins intrusive que la bouse quand même. Mais tenace. Tenace comme un pou accroché à son cheveu ! Comme la glu à tout ce qui passe ! Tenace comme une folle ! Le Roquefort oui, mais pourquoi pas Une Folle ? Hein pourquoi pas ? Pourquoi la ténacité serait-elle si virile ? C’est une folle le Roquefort. C’est dit. Le Roquefort qui reste sur les doigts, qui se colle, qui s’insinue en serpent fourbe. Elle le sniferait le Roquefort. Parfois, les jours moroses, elle s’en achète un petit. Et zou ! Elle en a plein les mains ! Elle ne s’en tartine pas non plus. Elle, Satine, n’est pas folle. Mais elle ne l’avouera qu’à mi-mots mais elle ne se lave pas les mains tout de suite. Elle n’en fera pas de saletés. Elle aura tout préparé à l’avance. Elle snifera son Roquefort et se sentira pousser des ailes.

L’odeur souterraine, l’odeur de bouse, l’odeur de Roquefort, elle ravive les nerfs. Elle ouvre les bronches et elles obligent à quelque chose. Elles obligent à une certaine honnêteté. C’est farfelu. C’est étrange. C’est son étrangeté à elle. Chacun à la sienne. Chacun la garde secrètement. Presque chacun y trouve son compte à l’avoir et à l’aimer. Sauf l’étrangeté qui fait mal. Mais ce n’est pas là le sujet. Satine Glavial dorlote son étrangeté.
      On a parlé des odeurs, parce que c’est le plus intime, le plus caractéristique aussi et que ca parle bien de Satine. Mais il n’y a pas que ca. Il y a les quatre autres sens aussi. Il y a l’odeur poussiéreuse des vieux escaliers, et dans le même thème mais pas aux mêmes endroits, il y a les moutons de poussière. Les jolis nuages qu’on peut attraper et caresser ceux-là. Ils sont tout doux, ils tiennent dans la main, ils ne s’évanouissent pas, ils ne trahissent pas comme les vrais nuages qui font croire qu’ils sont douillets et à travers lesquels on passe comme dans de l’air sans fard. Ils se maquillent en gentils doudous et ne sont rien d’autre que le vide. Satine prend à pleines mains les moutons de poussière sous les meubles, les canapés que on ne bouge pas assez souvent pour que dessous, tout soit nickel. Elle s’assoit en tailleur et elle joue avec. Ils se dénouent un peu mais pas tant que ca. Plus solides qu’ils n’en ont l’air. Elles les caressent. Ils ne sentent rien eux. En tout cas, rien de notable pour une Satine qui aime les odeurs décapantes. Ah mais oui ! Mais oui bien sûr ! On a oublié l’odeur de l’eau de javel ! Le chlore ! L’odeur qui lui a appris à faire le ménage, comme on appâte un animal. Parce qu’elle l’aimait tellement qu’elle aurait lavé sa douche, non elle lavait réellement sa douche tous les jours, à chaque douche, l’eau de javel dans tous les recoins et cette odeur enivrante après cela. Une odeur de perfection, quelque chose comme ça. Une odeur forte et droite, qui ne trompe pas et qu’on peut laisser derrière soi les yeux fermés. Pas d’inquiétude, elle s’occupe de tout. Bah ca pue la piscine ! Ce sont les autres ca. Elle sourit. Oui j’adore cette odeur. Ah bon ! T’es chéloïde toi ! Peut-être... Moi,c’est bizarre, j’adore l’odeur de la banane pourrie. Arrêtons-nous là mais la conversation peut être longue sur le sujet. Tout le monde, a un moment donné, aime parler de soi, du soi profond dont il ne parle jamais, qui est tout seul avec ses bizarreries et ses amours odoriférantes intrigantes. Un peu animales.
Celle du Destop ? Satine n’a pas fini sa réflexion sur le sujet. Encore à l’étude. Elle ne sait pas quoi en penser. Elle est dure à penser cette odeur-là. Moins fréquente déjà et un rien dramatique. Dure à penser, comme les autres vous me direz. Oui, mais là, elle sent combien se mélangent ses ressentis. Parçe que là, l’image correspondant au tuyau bouché de merde surgit. Desolee, ce n’est pas joli joli mais on parle en toute franchise et puis, Satine ne veut pas y aller par quatre chemins. On a d’autre temps à perdre avec des bêtises. Autant la bouse, l’image ne la gêne pas, elle n’est pas là. C’est beaucoup plus dissout que cela. Il y a plein d’images. Le Roquefort, pas d’images à bannir. L’eau de javel, encore moins. La poussière, rien de grave non plus. Et là, pour le coup, on l’a compris, c’est une odeur qui dépasse toutes les visions terriblement terre-à-terre qui peuvent se présenter. C’est une vague alcoolique qui l’enveloppe. Mais le Destop... Envie d’aimer et rebutée sans pouvoir vraiment résister. Encore une complication humaine. Ca a tendance à la mettre en pétards la belle Glavial. Elle voudrait qu’on soit plus souvent aussi simple que les animaux qu’il reste en nous. Mais ça ne marche pas vraiment.
Les carreaux sales ne lui font pas davantage peur que tout ce qu’on vient d’énumérer. Il y a ceux qui s’en écartent, qui s’en tiennent bien à distance. Entre nous, il ne faut alors mieux pas être parisien, ou alors avoir tout l’argent pour se payer le taxi tous les jours. Parce que bus, métro ou RER ! vitres dégueugueu, soyons clairs. Elle, Satine, elle aime ca. Elle attend d’être seule dans le wagon. On pense que c’est dangereux d’être seule dans le wagon du RER en grande Banlieue Parisienne. Mais c’est quand on ne connaît pas. Il y a les gentilles banlieues toutes mignonnettes à la petite maison dans la prairie et on n’en parle pas de celles-là. Et puis, on la lui fait pas à Satine. Elle est costaud sous son petit poids. Elle se bat sans problème et sans hésitations..C’est ce qu’elle a toujours fait toute sa vie. Elle est née dans une poubelle. Enfin non, ce n’est pas possible parce que la maman n’a pas pu se mettre dans la benne ou encore moins la poubelle de trottoir en vue d’accoucher. C’est quand même trop fou. Sauf si ! Sauf ! Si elle habitait dans la poubelle la maman. On peut bien imaginer une jeune ou pas jeune femme vivant dans la rue qui a élu domicile dans une grosse benne à ordures. Ca protégé du vent, du froid peut-être, du chaud sûrement pas. Mais Satine n’est pas née sous les tropiques alors tout va bien. Cette femme, elle aurait pu tout vider, tout nettoyer bien, comme une petite fée du logis. C’est ironique ? Non pas vraiment. La qualité de la fée ne dépend pas de celle du logis. Bien au contraire. Si elle a réussi, cela devait être une sacrée fée du logis. De quoi être fier. Alors elle aura construit un cocon accueillant même dans sa benne. Des rideaux en tissu recyclé, des meubles de rue, des objets réutilisés et même du coup un style vintage carrément marqué. Bref, ça, c’est dans le meilleur des cas. Et il ne faut pas se leurrer quand même, il y a des chances que cela ne se soit pas passé comme ça. Les trucs moches et qui puent trop, pas Lépine de s’y étendre, on sait bien comment ça se passe. Le conte de fées de la maison-benne était beau lui. Donc, Satine a été trouvée dans une poubelle. Elle en est restée imprégnée comme ca, par les odeurs de, sale pour les autres, énigmatique et vivant pour elle. Elle trouve d’ailleurs, soit dit en passant, qu’aucune odeur n’est sale. Ce qui est la pure vérité, puisque l’odeur en elle-même n’a pas de valeur sinon celle de nos narines. Donc ce sont nos narines qui se sentent sales. De nos jours, les narines sont dUne sensibilité ! Des vraies fillettes ! Elles se révoltent pour un rien, toutes syndiquées, toutes négationniste de leur passé, de leur appartenance au règne animale. Elles se voilent la face et avec l’approbation de tous qui plus est ! Oui, la société hygiéniste construite par des narines invisibles, mais sans concession, paranoïaques et délirantes parfois. Elles aiment le plastique et le transparent. Satine ne se sent pas concernée par l’hygiénisme. Elle n’est pas crade comme on pourrait s’exclamer. Elle se lave, elle frotte, elle récure son logis à elle, même si elle fait joujou avec les moutons de poussière. Elle est comme tout le monde. Elle s’adapte à son environnement social, comme on dit. Mais elle refuse de s’exclamer à chaque effluve de vivant qui s’exprime, à chaque caca de chien dans la rue, à chaque poil qui dépasse. Elle n’a pas peur des poux. Elle ramasse le vomi s’il le faut. Elle rit quand elle se tape une merde de chien au petit matin. Elle n’en veut à personne de sentir la transpiration. Elle est comme ça.
Et donc, les vitres de RER attendent : elle vérifie que personne ne peut la voir. Elle ne veut pas passer pour une folle. Elle fait de grands dessins sur toute la vitre sale, avec son index. Elle dessine comme une pro. Rien d’étonnant à cela, elle l’est. Au boulot, c’est pas comme dans le RER, moins excitant que cet art éphémère. Elle espère que certains verront sa petite oeuvre et s’en réjouiront. Avant qu’elle ne disparaisse. Elle monte parfois sur les banquettes pour atteindre le haut de la vitre et compléter son dessin. Elle s’amuse. Elle fait des dessins qui blaguent, qui parlent des voyageurs assis sur les banquettes. Elle leur parle à eux. Elle ne fait pas de tags. Mais elle ne s’en sent pas si loin. La grosse différence, c’est le noir et blanc et le propre et sale. Elle provoque comme ca. Pas avec de grosses lettres colorées définitives. Mais en jouant avec la saleté des autres.
Les moutons de poussière, elle se permet de les admirer quand elle est chez elle. Il y en a plein qu’elle aperçoit sur les quais de Paris. Mais elle ne va pas se mettre à faire la dans se de la poussière en pleine bonne société. Elle fait son ménage, elle récure, et sous le canapé, le meilleur endroit, elle découvre toujours des jolis moutons. Ils ont le nom d’un tout gentil, en plus, d’un tout doux, pas puant, pas sauvage. Alors, les autres aussi pourraient faire un effort au lieu de trouver ça répugnant. Elle s’assoit en tailleur et elle les fait virevolter dans la lumière. Elle regarde la lumière les traverser et les englober. Ils sont fragiles. Comme leurs homonymes. Ils suivent le vent qui passe, eux aussi. Ils se laissent faire, dire et obéissent. Leur dignité n’est pas là. Elle est dans leur volatilité. Ce sont de vrais gymnastes, moins peureux, moins couards que leurs aînés du ciel.
      Sur le fait que Satine Glavial soit née dans une poubelle. Ca n’est pas un drame n’est-ce pas ? N’allez,pas en pleurer et trouver tout cela bien sombre. Ni qu’elle aime toutes ces odeurs que personne n’aime. Ce n’est pas grave tout cela. Ou alors on s’épanche aussi sur celui qui, adulte, retrouve en enfance à l’odeur de la lingerie pour bébé et se met à la snifer tout heureux. C’est tout pareil. Juste un enchaînement  logique des sens. Juste l’assurance que Satine vient bien d’où elle est née et c’est plutôt une bonne nouvelle. Surtout pour elle.
         Il y a aussi, il est vrai que le ménage n’est pas bien rapide avec elle !, les poils de ses chiens et chats. Elle en deux de chaque. Malgré ses bizarreries, elle aime l’ordre. Les animaux par paire par exemple. Et pourquoi pas ? Les poils de chien et chats, de toutes les couleurs, noirs pour Francis le chat panthère, marron glacé pour Marcel le braque de Weimar, blanc et roux pour Maurice le cocker, gris immenses et moirés pour le « chat » Jean-Claude un peu persan mais pas seulement. Elle les mélange tous les poils, elle peut en faire un gros mouton, c’est tout à fait possible. Un gros mouton presque vivant. Les 4 la regardent et s’apprêtent à entamer le jeu du mouton de poils. C’est toujours les mêmes qui gagnent mais tout le monde participe. C’est une institution du dimanche de ménage dans cette famille. On joue à l’attrape-mouton. Qui gagne ? Les chats ? Pas les non. Francis le chat panthère bien entendu. Jean-Claude n’est pas vraiment efficace dans sa chasse. Mais contrairement à nombre de ses congénères, pas susceptible pour un sou. Surtout pour un mi-persan, c’est étonnant. On sait qu’ils sont prout-prout ceux-là. Mais Jean-Claude est aussi de la poubelle, alors il est comme qui dirait quelque peu singulier. En plus, on ne le dit pas tout de suite, parce que ça ne se fait pas de parler en premier lieu du handicapés de stigmatiser la différence, mais il est borgne et les moustaches en moins du côté droit. Il perd l’équilibre et vise à 10 cm près. Bon, pour un chat, c’est du sacré handicap. Mais Francis est un chic type, il le laisse essayer quand même. Donc Francis gagne souvent mais Maurice le cocker peut ébranler parfois sa suprématie. Il est agile. C’est un chien volant. Il décolle les oreilles et ajuste le vol grâce à ces outils subtils. Il se jette d’un meuble. Il n’a pas peur. C’est sur qu’a ce jeu-là Marcel est dépassé. En fait, il joue pour faire plaisir mais avec son grand gabarit, il préférerait un autre sport. Plus musclé. Mais en famille, on s'adapte. Lui aussi c’est un chic type. Ils sont tous chics d’ailleurs.  C’est pour ça que Satine les a choisis. Et ils sont tous rigolos. Faciles à la bidonnade.
Après le jeu de l’attrape-mouton, il y a Satine en tailleurs encore qui dessine sur le parquet clair avec les poils de toutes les couleurs. Elle peut faire de vraies fresques, là encore éphémères. Tout le monde sait qu’il ne faut pas marcher dedans ni déranger. Tout le monde se couche autour d’elle et observe. Chacun y participe à sa manière. Chacun est concerné.
Elle finit par finir son ménage quand même. Mais longtemps après parfois.

       Sur sa table de nuit, elle garde un mouton d’un peu de tout. Pas sale. Il est dans une bulle de verre, pas d’inquiétude pour les hygiénistes. Un mouton plein de toutes les vies qu’elle trouve chez elle. Il est beau comme un coeur. Elle l’a modelé amoureusement. Et les gens ne savent pas que c’est un mouton. Ils ne se rendent pas compte tellement elle l’a fait beau. Sinon, ils ne lui diraient pas qu’elle est une vraie artiste. Elle regrette seulement de ne pas pouvoir le toucher. Mais on ne touche pas aux œuvres. C’est en gros dans les musées. Elle applique la même règle. Pas folle la guêpe.

Le soir, après avoir fait tourner dans ses mains la bulle de verre et son mouton, elle se borde, elle respire le douillet de son lit. Le douillet sent tellement bon ! Elle s’entoure de ses 4 fidèles. Elle a besoin d’eux pour dormir. Il y en un à chaque point cardinal. Quand elle perd un peu pied, ils se resserrent et font la ronde. Un sur deux, un chien-un chat,  un chien-un chat. Sinon, Francis est à l’Est, Marcel au Nord, Maurice à l’Ouest, Jean-Claude au Sud. Ils n’en changent pas. C’est important. Ils ne bougent pas quand elle dort. Cela ne dure pas si longtemps d’ailleurs, pas tellement assez pour les matous. Ils savent qu’elle est légère comme les moutons dans son sommeil et que le moindre souffle la ferait chavirer.