mardi 25 décembre 2018

L'homme-pieuvre

Les bras lui poussent
En pieuvre,
Les deux minus
Sans horizon
Juste à petite portée de
Main
Petit demain
Jour après jour.
Voilà les tentacules jusque dans
Tous les mondes
Les temps espaces
Lointains
Les plus étranges
Étrangers
Dérangés
Étranglés.
Les bras aussi
En ailes au dos
Ailes à mains en aveugle
Tout sentir
Tout tâter
Tout tendre
Prétendre
Oser.

Les bras lui poussent
En pieuvre,
Possibles en puissance,
Attraper
Traquer les traces
Laper
Flairer
Poursuivre
Tous les
A-vivre
Ouverts.

samedi 22 décembre 2018

La bombe, en reponse de Frederic Pesquet

Kikou Cookie - La venir

Je la vois
Bien là
Autant qu’un cul
En gymnastique improbable
En mode border collie quoi
En bord de lit pardon
Contorsion
Déraillage
Dans l’aiguillage
Portes ouvertes
A toutes les fenêtres
Bow-windows quoi
Persiennes fermées
Siouplait affreusement

Je la vois
Bien là
Même si
Noeils fermés
Oreilles toutes
Folles
Mais assis
Posé
Sur le sien
Hein !!

Je la vois
Bien là
Toute proche
Même de
Loin
Autant que
Sans brouillard
Floutant aveuglant
Transparence
Rappel
Naissante
Clairvoyante

Je la vois
Bien là
En mode
Bienvenido ensoleillé
Il attend
Ce moment
Longtemps
Fuck off hier
Bien profond
Quoi
Et demain
Tout de suite c’est
Du poulet !

Je la vois
Bien là
Tourne
Et re-tourne
L’âne rené
Dans botte de foin
Perdue et laine
Chauffeuse assurante
Sans crêche noelleuse
L’année bientôt

Tic-tac
En troc
Sans tac-tic
Salé
Plein de toc
Sucrés
Et de « tuc »
Appétissants

Sans artifice des
Triques, traques
Trucs
Boum boum
Tic-tac
Cacolac et bam !
Bim boum ! Coucou coucou

Je la vois
Bien là
Renaissante en rond
Pendulante
Cartésienne contradictoire
Et son tout-venant
La venir

Ce moment
La bombe brasse
Les aiguilles
Du temps 😀

La bombe

La bombe
Tique et taque
Toque et traque
Toutes les
Portes,
La bombe
S’approche
À grands pas
Bruyante
Horloge tapante,
Tambours pan-pan
Le tic-tac
Se mue
En badaboum.
Personne à terre.
La bombe
Trépigne
D’impatience
Et tous les coups
Sont permis.
Les coups de main,
Les casse-,
Les passe-passe,
Les coups
De trafalgar
De maître
De théâtre.
Mais pas en douce.
Cette bombe-là ne se cache pas.
Elle reste une
Kamikaze.
Elle crie à tue-tête,
Aucune tête ne tombera,
Annonce
Augure
En grande déesse,
Elle joue son grand soir,
Elle qui s’est tant tue
Toujours.
Elle ne tient pas en
Place et poursuit
L’ameutage.
Non les portes ne
S’ouvrent pas
Encore,
Elle ne perd
Rien d’espoir,
Elle sautille
Vrille et
Retombe sur ses fils,
Elle tintamarre
Sans fin,
Elle sait qu’elle est toute
Prête
D’exposer.
Les verrous cèderont,
Les gonds gicleront
En bouchons
Champagnards,
Les poignées tourneront
Déclencheront
Elle engouffrera
Chaque trouée,
Aussi époustouflante
Qu’elle a
Rêvé.
Elle sait qu’elle
Tremblera les sols
En riant comme
Bossue.
Les amertumes dissolueront
Et elle crèvera l’écran
D’une pluie de
Plumes.

vendredi 21 décembre 2018

La main-araignée

Le cou se serre
La glotte s’agite,
Occiput plaqué
Écrasé
Craque le crâne,
Le menton pointu
Tiré
Sur une gorge à tous vents
A la recherche du moindre
Souffle,
La gueule bée.

La main serre
Crispée
Dans le creux
Fragile qui s’offre à elle,
L’interstice pharyngale
Asphyxie symphonique
Annoncée,
Adam et sa pomme impuissants,
Leur ressort pompe en-dessous.
Tous s’affolent
Et les pieds s’y mettent
En battant l’air en
Arythmie.

Le cou se serre
Et la main grimpe
Et s’étend en
Araignée bancale
Jusqu’au mur qu’elle
Englué de sa toile.
Le piège est refermé
Adam tourneboule sa pomme
Dans tous les sens
En glougloutant.
Le crâne craque,
Le menton pointu,
Les yeux ont la roulotte.

Mais la main-araignée
Ne s’entend pas en
Glissades et
Pentes savonneuses.

La tête grossit,
Le corps sous elle disparaît
Peu à peu
File entre les
Pattes,
Huilé patinoire
Anarachnidée.
Le crâne craque et recraque
Non plus de s’enfoncer mais
De gonfler,
Il globe
S’hypertrophe
Et se fait grosse planète
Anarchiste
Balle rebondissante
Aux quatre coins
Fuyarde cavale joyeuse
Ricaneuse.

Parfois,
Le cou serre encore,
La main-araignée est
Pugnace.
Alors aussi,
La pomme et son Adam
Rameute
La cavalerie en chef
Et beurre habilement
Sa route.
L’armée de tête
Redescend en goulot,
Étrécie condensée
Glisse vers son arrière et bas
Le long des parois immobiles
Du piège palmé.
On retombe tous sur
Ses pattes
Amortie maîtrisée,
Tout le monde encor-
dé,
Intègre intense.
On se relèvera
Plus loin,
La cavalerie repartira à l’assaut
Bille en têtes parce qu’elle ne
Cessera que
Dans sa boîte enterrée.

La main seule sur son mur
Imbécile
Carapate sa trappe
Évidée.
Elle va gronder sa rage
Dans son encoin
D’enfer.


jeudi 20 décembre 2018

L'organe vide

Le trou noir
L’organe vide
Surgit
Se loge au ventre
Reprend sa place
Chaude
Gironde
Chez lui
Comme chat pacha.

Sans complexe,
Cette pièce morte
Ras-bord
Ou
Table rase,
L’opaque serre
Les fesses
Et aucun regard n’y
Entre,
Pousse ses pairs
Vrais
Laborieux
Et
S’assied.

L’organe vide
Prend trône

Imbu
Il a son droit,
En abusé
En tyran pervers
Juste retour des
Choses.
Il inverse les aiguilles de toute la
Machine et ses lourds rouages,
Il les tourne et
Secoue
A son aise.

La pièce morte
Ne craint aucun
Échec et mat,
En intouchable
Fantôme.
Elle découpe
L’être
En ogre avide
Ou esprit pur.
Elle asphyxie
Affame
Et ensauvage.

On rêve
D’une boucherie à ciel ouvert,
Hara-kiri
Et écraser de
Pieds joints
L’assassin bout de vie,
Crève !


L'organe vide

Le trou noir
L’organe vide
Surgit
Se loge au ventre
Reprend sa place
Chaude
Gironde
Chez lui
Comme chat pacha.

Sans complexe,
Cette pièce morte
Ras-bord
Ou
Table rase,
L’opaque serre
Les fesses
Et aucun regard n’y
Entre,
Pousse ses pairs
Vrais
Laborieux
Et
S’assied.

L’organe vide
Prend trône

Imbu
Il a son droit,
En abusé
En tyran pervers
Juste retour des
Choses.
Il inverse les aiguilles de toute la
Machine et ses lourds rouages,
Il les tourne et
Secoue
A son aise.

La pièce morte
Ne craint aucun
Échec et mat,
En intouchable
Fantôme.
Elle découpe
L’être
En ogre avide
Ou esprit pur.
Elle asphyxie
Affame
Et ensauvage.

On rêve
D’une boucherie à ciel ouvert,
Hara-kiri
Et écraser de
Pieds joints
L’assassin morceau,
Crève !


mercredi 19 décembre 2018

Je prends ma route (1)

Le grand virage
En arrivage
Atterrissage
Très imminent.
Mes yeux rivés
A la formidable
Sortie de route,
Je m’approche
Plus près que jamais
De l’épingle à cheveux
Détressée :
Elles sont trois
Au carrefour
Que dis-je elles sont
Mille mais ne brillent pas
Toutes
Pavées à la mesure de
Ma voûte
Pédestre.
Elles sont trois brins
Trois branches
Trois tranches
Choix
Voies
Couleurs
Odeurs ;
Trois grands tunnels
A chant de sirènes sans tragique,
La fée sans Grimm
Et fins grinçantes,
Tubes
Gainés de noir
Aux effluves
Caoutchouc,
Pneumatiques
Faux dur
Faux mou,
Protecteurs
Des innombrables
Filaments
Fluorescents
S’entrefilant.
Se laisser
Entourbillonner
Dans leur texte
Toujours
Singulier.
Je chausse mes espoirs,
Déroule mes
Pas
Sans perte d’une miette
De touche touche
Au sol et
Chaque infime point
Palpe
Couche
Et peut-être éveille
Un lumineux...
Il rejoindra
Les méandres des lampions dans
La nuit enneigée,
La ronde des lucioles,
Des ors précieuses
Richesses inviolables
En-dedans.
L’empreinte reste plate
Sur l’asphalte
De la route
Mais ondoyante
Dans l’ombre
De mon for-
t.
Au microscope,
Un seul allèle
Fera la différence

mardi 18 décembre 2018

Anarchie d'un jour

Tourner les talons
et le dos
au grand patron
à la cheffe cheffe
à la tête reine
aux règles
toutes belles toutes
sages
saines dit-on
vaines souvent
ou même
invalidantes.
Et l'envie
folle
richement naïve
sans innocence
d'un bain de minuit
midi
nu comme un ver
frais
gai
défaire le nœud d'
énièmes
rituels
de jour en jour.
Sauter en pleine flaque
éclabousser sans gêne
en rire fou lui
aussi
et tomber le
carcan.
Rire,
même seul
et ne laisser
quiconque
trancher soi de soi-même.

lundi 17 décembre 2018

Plongée en grand tapis volant

Plonger
Jusqu’à couler
L’eau
Bain
Le vin
Le lait
Jusqu’à la lie.
Les eaux
Les sangs
Les lymphes
Et tout autour
Tournoyantes
Tourbillons
Sans cyclone
Torsades
Caresses
Tressantes
Tissantes
Grand tapis
Liquide
Volant
Paré à tous les
Longs courriers
Voyages au
Bout
Des univers.
L’ondulant
Liquide
Épais
De toutes les
Humeurs,
Promesse
Enroulante,
Escaladeur
Escapateur
Carapateur
Carapaceur,
Jusqu’aux sommets
Dans son
Fluide
Et puissant
Rondoiement.
Tapis volant coulant
Glissera
Jusqu’au grand
Flamboyant.

dimanche 16 décembre 2018

Baptême de l'air

Il fait le tour
De son repaire.
De coin en coin
Coin-coin
Oui oui
Aussi gracile qu’un gros
Canard
Le cul trop lourd
Pour notre gravité terrestre
Ecrouleuse.
Il se dandine
De mur en mur
Pic et pic du pain dur
Aussi futile qu’une poule
Mouillée
Le cou tendu
Vers un sublime mirage
sans désert.

Le repaire
Tout en rond
S’encroûte.
Il chasse les moisissures
Bleuies.
Son antre est un
Roquefort
Froidi,
Sables mouvants
A l’abordage.
Il sent qu’il pourrait
S’y
Empreindre
Tout collé comme
Un incongru
On verra sa grande joue
Étalée en profil
Plaf
L’oeil encore incrédule,
Instantané
Hiéroglyphe.

Il sort sur le pas de
Porte
Et salue les volants.
Il les regarde avec envie
Fendre l’air,
Le défaire
Et refaire,
Repaires
Repères
Roulants
Les règles
Rouages du
Monde
A la mesure du
Rêve.
Il dit qu’il se
Hisserait tout d’un
Bloc
A bout de pieds
A bout de bras,
Il n’y parviendrait
Rien.
Il croit encore être trop court
Pour le sommet.

Et voilà qu’un des
Envolants
Stoppe à son porche,
Plane devant lui
Et s’émerveille
De sa sortie en ciel.
Lui ne dit mot
Mais ce n’est qu’au pas de
Porte que je
Plante.
L’autre n’en démord pas.
Il voit l’élan de
hors les murs,
Il n’entend rien voir que
L’extraction
Qui fera pousser des
Ailes.
Il ne parle pas
De canard pataud
Ou poule atrophe.
Il accueille le nouveau venu
Qui s’ignore,
Clap clap
Une deuxième vie
T’enlève.
Porté disparu au
Roquefort
Croûtifiant :
Tu es Volant
Tout neuf.

Le cul trop lourd
A évanoui.
Le cou de poulette
A remplumé.
Il batifole
Et fuck ! loopings !

jeudi 13 décembre 2018

la grande Bêtise humaine

Colère aveugle
qui se prend
fanfaronne, pour
super pouvoir
rayon X.
Occulte
Opaque
Pleine
les mailles serrées
jusques aux yeux,
Colère beugle
Comme un gourmandeur
affamé.

Elle fait de toi
l’imbécile qui
sommeille
et que
de coutume tu
musèles.

Elle fait de toi
L’égoïste dos
au monde
et que
de coutume tu
exècres.

Elle fait de toi
l’insensé sans
poème
et que
de coutume tu
piétines.

Colère sourde
qui se croit
Folle bouffonne, digne
Belle guerrière
Amazone.
Bouchée
Bouclée
Autarce
les nerfs grillés
circuit fermé.
Colère lourde
Comme un boursoufleur
abusif.

Elle te fait
laid.
Et tu n’es plus mon
Prochain
ni mon
pair.
Je te renie
toi
ta colère cancer,
peste révolte,
guerre amère.
Tu n’es qu’un autre
que j’ai fini
d’essayer
d’écouter.
Tu te sens
juste
intègre.
Tu es seulement
triste
et pingre.
Éloigne-toi
Dans ton apocalypse.
Tu ne sais plus
offrir.

Ta colère sourde aveugle
s’orne
sans vergogne
des oripeaux de la
saine foudre
en rage de vie.
Elle pavoit
Pathétique
Pestilente
et
Mesquine.
Elle te retirera
Tout
parce qu’elle connaît
ta béance par coeur.
Ton combat est
un faux,
Usurpateur
mais le vrai
te fait peur.
Tu ne peux dire ce mot,
trop fière et haut
et c’est là
ton immense
Bêtise humaine.
Tu recules
te protèges,
la dure loi de la vie.
Mais tu continues
vociférateur
comme un damné
haineux et
improbable.
Tu te caches
Malhonnête
dans la guerre qui
t’épargne.
Tu fuis
en assurant
sauver les tiens.
Et c’est bien

cette arrogance
qui te laissera
pauvre.
Et tes mains seront
vides.

lundi 10 décembre 2018

Grand matin

Tous les possibles à
Être
S’offrent
En étal
Libre-service.
De grand matin
Nuancier infini
En éventail
Sous les yeux
Gourmands
Un peu dépassés.
Debout
D’un pied sur l’autre,
Indécisive,
Je finis par m’asseoir,
Tailleur,
Prête à écouter leur histoire
Et promesses,
Prête à entendre mon grimoire
Et secrets
De ce jour.
Je me perds
Dans le dédale du désir
A tout faire et tout vivre,
Dans la course effrénée
À tout apprendre et gagner.
La couleur
Que je traque
M’échappe
Joue belle
De grand matin.
Je la vois
Disparais
Ne l’empoigne
Jamais.
Elle attend mon regard
Et mon souffle
En-dedans,
Loyaux enfin
A la grande machine
Humaine
Que je suis
Pour me sauter en
Main.
Et qui sait si
Elle ne fuguera pas
Jusqu’au prochain
De grand matin.




Et tout recommencer enfin !

Il ferme les yeux
Et il
Redescend au
Zéro,
Au tout départ
D’avant,
Parti de rien,
Enfanton en couffin.

Il recommence
Tout tout et tout
Peut-être certaines
Ne changeront.
Peu importe
Il
Redémarre
A genoux.

Il a perdu
Son temps,
Ses précieuses jeunes
Années
A ruminer
Et croire
Son impuissance
Fatale,
Cloué christique
En son microcosme
Prudent.
Il a rêvé,
Ca oui encore avide jusqu’à
L’excitation démesurée
Et la chute
Vertigineuse
Hémorragique
De retour dans sa cage.
Il a grondé en
Solitaire
Comme un vieux
Lion rassis
Pourtant tout frais éclôt.
Chenu
Ventripotent
Chaire molle fripée
Et malade,
Grattée jusques aux sangs
Avant même
Aucune vie.
Il vomit sur cette
Vie
D’endeuillé de soi-même.
Il hurle enfin
Que plus jamais
On ne l’enfermera.
Le grand fauve
Redevient roi-soleil.

Les portes vitrées
S’ouvrent
Comme une onde
Sourde.
Il pénètre dans
L’antre
Grouillante
De la foule globe-trotteuse.
Il cesse de s’en
Tenir aux songes,
La tête trop pleine
Et les choses si vaines.
Il les prend en pleines mains
Et ne reculera pas.
Il passe les examens
De routine
Et le dernier portique
A peine franchi
Est oublié.
Le plafond de verre
Sur cette immense salle
Oblongue
Bruyante
Criarde
Odorante
Bigarrée.
Tous les motifs
Inassortis
Indécents
Impolis
Imprudents
Enivrants,
Tous les possibles
Débordants
S’offrent à lui.
Il lève le nez
Pointé tout au-dessus.
Pas de couvercle,
Rabat
Ou opercule
Obliterreur
De désirs,
Fous !
Tu es fou !
Point trop n’espère.
Point trop ne rêve.
La vie n’est pas une joie
Mon p’tit monsieur !
Il rit de ces mots
Étriqueurs.
Il les valdingue
Violemment
Avec un cri de rage
Puissant et inaudible dans le
Brouhaha des vivants
Là,
Dans cet immense sol
Sans murs.
Il pointe son nez aussi loin
Que ceux-
Là,
Vivants et
Machines volantes
Prêtes à
Toutes les
Aventures.
Il se cesserait plus
Jamais
Et rira à la face
De tous ses détracteurs
Qu’il est le grand
Explorateur
Vagabond
Migrateur
De ses rêves
Et des leurs,
Atrophiés et geignards.
Il barrira
Fera vibrer les terres
De sa vie
Aussi folle qu’elle le
Peut.

Il a refait
Le monde
Au commencement
Du sien.
Il rejoue son histoire
A sa juste
Mesure.
Sus aux censeurs et
Damnât euros.


Poésie

Faire taire
Sans ménagement
La raisonneuse
Perceuse bétonneuse
Arrogante.
Elle se croit invitée
À tous les râteliers,
La sermonneuse
Classeuse sérieuse
Pavanante.

Mais la faire taire
Coûte que coûte
L’assasineuse
Millimétreuse
De poésie.

Et elle,
Poésie folle chérie
Serrée à étouffer !
Elle ne perd jamais
Souffle
Non non non non !
Elle est la
Survivance
Insaisissable.
Elle s’échappe
Se faufile
Souterraine
Rejaillit
Libre comme l’air.
Elle ne se laisse
Ni ne se laissera
Aimer
Qu’à condition
De fuguer,
De coq en âne
Bondir
Loin devant
Minuscule perdue
De vue,
Sans jolie sage logique
Lisse d’homme
Moderne.
Elle poursuivra
Délinquante
Viscérale
D’incendier toutes
Les routes,
Sans danger autre
Que de devoir encore
Tout
Des racines
Recommencer,
Toujours creuser
Bâtir
Ériger
Du fond des
Entrailles.
Accoucher
Chaque jour,
Recréer
Le même monde
En nouveau,
Toujours plus
Galactique.
Encore gagner une
Profondeur
Et sa hauteur.
Les temps et
Chrono
Cartésiens
Au point mort.

Ils reviendront
Tiqueter
Aussitôt que
Jolie sage logique
Reprendra
Ses faux droits,
La
Braconnière
Du grand Imaginaire.


dimanche 9 décembre 2018

L'arbre interieur

Je tranche
L’arbre
En plein coeur.
Une branche
Scieuse
Du haut de
Son vertige.
A l’aventure,
Je fouine
Le tronc-corps.
L’écorce neutralisée
L’armure à bas
La pulpe claire.
Les cernes
Psychédéliques
Sillonnent
Leur lit
Ondulent
Géant
Vivant
Roulé cannelle.
Chacune dessine
Sa marche,
Son degré,
Sa couleur.
Chacune destine
Son trésor
A son idoine place
Du grand
Puzzle.

Je plonge
Ma main
Dans le cours d’une
Puis l’autre,
Chaque cercle
Cerne
Attrape
Un morceau de
Vie,
Une lame
Aussi fine
Et subtile
Qu’au microscope.

Je reprends
Perspective.
Et encore
Il faudra apprendre
L’emboitement
Des mondes,
Puiser au sein
de plus en plus
Profond
Des courbes des
Innombrables
Rivières
Épicées.




La loutre et la poule : Les Familiers Fantastiques (6)

Elle glisse
Plonge
Roule
Passeuse
Messagère
Acrobate
Caméléon.
De l’un à l’autre,
Elle pirouette
Joue
Jongle
Pourtant sérieuse
Émissaire.
Elle n’est pas
Femme à barbe
Mais c’est bien
Soyeuse
Loutre à moustaches
Guillerettes
Qui
Primesaute
Derrière la conscience
Et les droites lunettes
Appliquées
Qu’elle arrondit
Arabesque.
On dirait
Qu’elle sourit
Toujours,
Même quand
Non,
Les lèvres tranquilles.
Les billes noires veloutées
Le museau rigolard,
Elle adoucit les mœurs
Sans musique ni
Sirène.

Puis,
Brusquement,
Un mot de trop,
Le mot honni.
Tout le monde
Insouciant
Quant à elle
Pas tout à fait comme eux
Imperméable entière
À la guerre sous ses yeux,
Qu’elle ignore
Comme une bêtise de
Gamin
Puérile.
Mais le mot de trop
Et s’évanouit
La soyeuse
Loutre à moustaches,
Incongrue
Apaiseuse.
Les yeux se fendent
Et morts,
Sans éclat,
Juste sombres.
Le bec pousse
Et elle se dresse sur ses
Deux pattes griffues
Le cou tendu
Prête à piquer
Mille et mille
Coups
Sans autre forme de
Procès.
Elle n’entend plus.
Fonce.
Tend son clapet
Claqueur.
Entêtée,
Ne recule miettes,
Hoquète vers le
Profanateur.
Poule
Imbécile,
Insoumise,
Marche arrêt sans
Nuances.
Inoffensive ?
Mon oeil !
Criblera
Sans vergogne
La chair à vif
Jusqu’à
Ce que l’ennemi
Supplie,
Geignard,
De toute sa moelle.

samedi 8 décembre 2018

Rage de vivre

La pellicule bactérienne
Au fond du ciel
S’approche.
Assombrit
Grise
Lumière fantomatique.
Les couleurs se faussent
Se délavent
Pâteuses.

L’atmosphère alourdie
Colle la peau aux tissus
Trempés.
Sales.
Poisseux.
Les fourmis montent
Dans les membres
Et l’on voudrait
S’arracher à
Ce corps.

On se démène
Contre la camisole qui
Menace.
On s’énerve
Les pieds frappent le sol
De plus en plus
Électriques.
Et la tête dans les épaules
Happée
Par le spectacle
Écœurant du corps souillé.

Mais la rage
Reprend les
Rênes
Et relève
Le chef en
Dignité.
La rage grogne
Et avance droit
Sur le voile noir.
L’affront brutal
Surprend
Émiette en mille
Poussières
La pellicule sourde.
Elle rentre dans sa lampe de
Génie.
Terrassée.

La rage de vivre
La dévorera
Jusqu’au
Dernier.

vendredi 7 décembre 2018

Violeur d'âme

Non tu n’as l’air de rien.
Tu es Monsieur
Tout le Monde.
Ni brillant
Ni brisé.
Un peu comme
Tous les tiens.
Tu t’es évertué
Toute une vie
À ressembler à l’autre,
Ne pas être toi
Devenir lui.
Tu es de ceux qu’on croit
Discrets.
Pas un casseur.
Pas un cogneur.
Un intello
Inoffensif.
L’air un peu à côté,
Jamais vraiment dedans,
Alors
Pas bien méchant.

Et puis,
En bon pair de tes
Frères,
Tu cultives ardemment
Quelques grandes
Valeurs,
Loyal au bout du monde,
Tu donnerais ton
Froc
Sans te soucier
Du reste.
Attachement sans failles
Des pauvres
Destinataires.
Et
Aussi
Parfois
Admiré.
Car tu sais
Ton air très sérieux,
Bonhomme digne
De leur confiance.
Et puis,
Tu n’en dis rien,
A eux,
Ceux du dehors.
Tu te tais.
Tu te bouffes les poings
Jusques aux phalanges.
Et tu recommences
La même danse
Insatiable,
Avec chaque nouveau venu.
Non que tu n’y
Comprennes
Rien.
Tu es mû par plus fort que
Toi
Et sans te départir de ta grande
Illusion,
Affirme
Tenir ton cap.
A ceux du dedans,
Tu
Craches ta rage,
Tu
Honnis les méconnaissants,
Tu
Voues à tous les diables
Le monde entier
Et
Toi
Sauveur incompris
Et victime de la noirceur
Humaine.
Tu vomis défiltré
Ta haine et tes rancœurs.
Tu
Retournes
Chaque matin
Au front
Espérant l’ovation
Et tous les mercis
Que tu
Mérites
Si fort.
Tu reviendras
Le soir,
Amer et poisonneur.
Tu déverseras ton fiel,
Celui que tu
Réserves
Tendrement
Aux grands chanceux
De ton intimité.
Et après avoir
Rendu tripes
Et boyaux répugnants,
Fait taire toute
Objection,
Abolir la liberté de
Penser,
Tu chercheras le réconfort.
Tu iras
Petit homme sombre
Insignifiant
Sucer ce qui reste
De moelle à
Tes intimes
Assommés.
Tu dicteras leur place
Et leur voix
Et leur non
Ne te parviendront
Plus.
Parce que pour
Encore un jour
Survivre
Tu dois agencer
L’univers
À ton
Délire.
Tu poses celui-là
Loin de toi,
Tu sais qu’il te résistera.
Tu assis celle-là,
Elle doit te regarder
Car ses yeux te font
Étinceler.
Tu t’empares des deux autres,
Sages comme des images,
Doux et tendres moutons,
Et les ouvrent
En grand
Nus
Et
Leur manges
La vie
Qui animait
Encore.
Toi tu ne
Remercies pas.
Ce n’est que ton
Droit dû.
Et tu les félicites
De t’avoir
Auprès d’eux.
Voilà qu'elle est leur heur !
Se faire
Sucer
Prendre
Jusqu’à plus soif
Effracté
Pour leur bien.
Tu n’es pas un brutal
Qu’on ne tombe dans ces
Idioties
A la mode.
Taisez-vous
Et
Laissez-moi
Vous honorer
De ma présence
En tout votre être.
Nous nous appartenons
Vous êtes ma chair
Je suis la vôtre,
Dis-tu en gourou
Messianique.

Tu n’es qu’un
Vulgaire
Violeur d’âme
Qui cessera
Son labeur
Nihiliste
Quand il
Crèvera
Regrettant de
N’avoir pas assez
Répandu
Ta beauté.

Ils pourront enfin
Dire
Qu’ils t’auraient
Tué
Si seulement si.
Semeur de terreur
Grand maître écarteleur
En col blanc.





jeudi 6 décembre 2018

L'arpenteur des coulisses

Le devant de
La scène
L’appelle,
Les lumières
Et regards
Sur lui,
Le touchent,
Caressent,
Et lui
Offert et
Grand ouvert.

L’emmitouflé
Ganté
Voilé
Oignon à poings
Fermés
Rêve de
Parades
Et
Pavanes
Nu comme
Etrange
Chat Sphynx.
Tout l’attirail
En rond autour
A terre
En tas,
Nid de fortune
Témoin fidèle
De la
Métamorphose.

L’arpenteur des coulisses
A tombé la
Cuirasse.
Il rit de tout son
Corps
Libéré
Au vu et su de
Tous.
Les bras en croix
La tête en ciel
Il a fini son
Sacrifice
Et remercie
Son dieu
De ne l’avoir pas
Abandonné.
Il n’est le fils
De personne,
Égaré.
Et la honte
Gluante
A fondu
Aspirée
Dans les volcaniques
Profondeurs
Du globe.

Le spectacle peut enfin
Commencer.

La vraie vie est une sauvage

Recule
Grogne
Mord
L’air
Mauvais
Secoue
Trépigne
Frappe
Le sol
Et
Tourne
Tourne
La trace
La même
Creuse
Sillon
Troue
Perfore
Piaffe
D’encore
Répète
Devient
Fou d’
Im-
Patience.
Et
Stoppe
Et
Rue
Et
Hurle
L’insou-
Mission
Et
Fonce
Bélier
Brise
Les chaînes
Barreaux
Lambeaux
Derrière
Passée
La cage
Menteuse.

Et
Sauvage
L’animal
Renaît.
Éclatant.
Etoile
Filante.

mercredi 5 décembre 2018

L'indomptable

Jongle
Gicle
Gêne
Pousse
Cogne
On grogne
Il
Rit
Roule
Boule
Joue
Salte
Vole
Poursuit sa route
Quoi qu’il en coûte
Traverse la foule
Sa lourde houle.
Inarrêtable.
Irraisonnable.
Fol indomptable.
Troupeau en masse
Tissé en nasse,
Ignore et fonce
Et sans semonce.

Jongle
Joue
Gicle
Sur son passage
Fête sauvage
Tempête arrache
Ronron se cache.
Il
Déchire
Dévêt
Dévie
Le réel évideur
D’anormal
D’animal
D’animé.

Il
Se fout contrefout des
Bousculades
Sans parade,
Fonce et dégonce
Toutes issues
Les jette au ciel
Qui fait son miel
Et suce ses doigts
En fou du roi.

Il
Rêve
Que lève
Soulève
La foule
Que la masse
S’éparpille
Décadenasse
Et brille.
Une seconde,
Il la
Remue
Remous
Marins
Désamarrés.
La tête en bas
Les pieds à l’air
Ouvrent grand les bras
Et prennent la terre
Comme une boule
A neige,
Une boite
A vache,
Secouent secouent
S’écoulent
Le bruit
Les rires
Et la neige
En été.




mardi 4 décembre 2018

Opportuniste ambitieux

Taiseux,
prudent,
aiguise l'oeil et le
flaire,
acère griffes et
poigne.
Il observe.
Sans se dérober
réellement.
A moitié là.
A moitié hors.
Crépusculaire.
Il ne s'assoit que d'une
fesse.
Il ne fixe que d'un seul
dard.
L'autre surveille,
balaye
ses alentours.
Il est armé.
Vigile.
Sourire en coin.
Il n'a pas peur.
Il ne tremble
pas.
Il a oublié
ça.
Il cherche
en fin stratège
la meilleure voix,
celle qui paiera
plus.
Il ne croit rien
ni
plus personne.
Il attend l'occasion,
la saisira au vol,
il sent l'air qui se charge
et la lumière flottante.
Il sait quand il
devra
bondir
s'engouffrer dans
la brèche.
Sur le qui-vive,
jamais repus,
toujours avide,
plus grand,
plus haut.
Ne lâche aucune
prise.
Et sans crier ni loup
ni gare,
déjà à
tire d'aile
au très loin
à se croire
plus beau.

Chacun son masque

Tu suis le fil des visages qui
tout autour,
Collier de
perles
hétéro-
clites
clac
boum
paf.
Nuancier éventail
360°.
Gammes épliées
toutes décibels dehors.
De l'une à l'autre
figure,
semblables
désaccordées
insaisissables mêmes.

Chacun a chaussé son
masque,
unique.
Chaque expression
chaque trait
témoigne
raconte
et se montre et
se cache,
brandit
et efface,
expose
et enterre
fier et
honteux.
Et tout ce qui n'a pas de mots
et qui entre-deux,
étire
la ribambelle des
tons,
courts et souvent
invisibles,
imperceptibles et
pourtant
bien inscrits
à l'encre indélébile.
L'encre aussi
sympathique,
le masque à revers offre
le texte
original.
Mais il colle à
la peau
et gare à toi
la chair à vif et
le souffle coupé.



lundi 3 décembre 2018

La Nonne moderne ou Narcisse en soutane

C’est
Le beau milieu de la
Fête,
La chaleur tout juste
Pointe,
Au détour des
Petites grappes
Papoteuses.
Les sourires fusent,
Les voix commencent
De chanter
Chavirer
De tout en haut
En bas.
La tessiture des êtres
Double
Triple
Druple !
Peut-être
Plus tard
Les corps se délieront
Et bondiront
Joyeux lurons
Dansants.
Tout cela s’annonce
S’entend
Résonne déjà
En sourdine et coulisses.
Encore.

C’est
Le beau milieu de la
Fête,
Et elle toujours
Grande impassible.
Elle ne rit
Pas.
Elle ne rentre
Dans
Aucune danse.
Elle ne saisit
Jamais la balle que l’on
Lui lance,
Se dégage et
La laisse
Tomber.
Un autre,
Un rigolard,
Une feufollette,
La ramasseront
Et reparti comme si
De rien.
Elle est grise.
Elle est froide.
Immobile.
Elle observe et
Avec une humilité
Ostentatoire
Se terre dans son
Silence.
C’est bien le sien
Et personne d’autre.
Elle le borde
Jalousement
Et de sa grandeur
Magnanime
Regarde
Ses con-
génères dépravés
Accepter tous
Les
Compromis.
Elle ne mouille pas
La chemise
Ne se salit
Les mains.
Vade Retro Satanas !
Le plaisir nuit
A sa santé.
Le sourire dégoûté
Qu’elle arbore
Croyant bien faire
La trahit.
Elle est peut
Même seule-
Ment là
Se fondre au
Pot commun.
Elle ne partagera
Pas.
Au mieux
Convertira
Une brebis égarée.
Dans son enclos,
Ne vivent que des
Mêmes
Purifiés.
On voudrait
L’ignorer
La pousser loin
Voire la...
Mais l’humeur trop normale
Du troupeau est
À la fête
Et réprime son
Jugement
Irrité.
Ni le lieu
Ni l’heure.
Parfois,
Qui baisse les yeux
Poli,
Gêné,
Qui se détourne
Ah bon ?!,
Qui jette un oeil
Et tique,
Le cou nerveux,
Peut-être le sourcil
Hautain.
Elle voit
Entend
Et l’autre et ses vies
Tamponnent son
Dôme irréfragable
Et retour flash
À l’envoyeur.
Elle refuse d’être
Un quelconque in-
terlocuteur
Et affiche mine
Contrite
Et douce de
Martyr innocent.
Elle stoppe
Nette
Toutes les armes.
Les siennes
Enveloppées de
Tendre velours et dentelle
Surannée,
Règnent en
Tyrans
Mielleux.
La nonne moderne.
Moraliste muette.
Ascète.
Pure.
Un peu morte.
Fantôme
Narcisse
Grossièrement
Caché
Derrière
Sa soutane
Informe.
Mais dis,
Est ce que tu baises ?





Flamboyance

Un coup
Un tir
Un flash.
Claque
Toque
Frappe.
Flamboyance
Brute
Crue
Sèche.
Sans tache
Contours nets.
Éclair
Immodéré
Indécidé.
Au-delà de toutes les
Consciences.
Intraçable.
Déchireur du
Normal.
Fou
Extra-hors ;
Flamme
Délinquante du
Quotidien.



vendredi 30 novembre 2018

Réiterreur

Par la petite porte,
Etroit chambranle,
La tête basse
Sous peine d’emplafon-
nage,
Rituel étrécis-
sage,
Bobsleigh en
Verticale.
La position
Prise et reprise
Apprise
Comme une image.
En automate,
Passe et repasse
Sous entre dans
L’huis
Petiriquiqui.

Par la petite porte,
Va-et-vient
Incessants
Toile de fond,
Entrer sortir
Ne veulent rien dire :
Traversées
Redondées
Écervelées.
Milliards de
Fois
Et
Finit par
Se dédoubler
Et applaudir
Au manège.
Une poule sur un mur.
Ou un vague lion en cage.
Le marathon invisible.

Accélère,
Court,
La tête ailleurs,
Le ventre à terre,
Pattes en compote.
Et l’on voudrait
Faire
Exploser
Cette trouée
Étriquée,
Rapetisseuse d’esprit
Et d’espoir.
Et pourtant
Poursuit
Les allers-retours
Infructueux.

De jour en jour,
En année,
Décennie,
A s’amenuir
Sous le même porche,
Sûr de
Finalement
Sa valeur.
Légitime
Et parfaitement non
Idoine.
Absurdité facétieuse
De la réitété-
ration,
Butée bêtasse,
Compulsation tic-tac,
Contre-nature.

La petite porte
Timide et
Tyrannique,
Colle à la
Peau,
Englue les horizons.
Une puissance
Obscure
Fondue du haut
Des vieilles
Générations.
Terreur acquise,
Serf loyal
Rabougri.
Chose marionnette
Croupie.
Où se cache donc le
Vrai
Révoltireur ?

Le miroir ou l'étrange


En passant,
Un coup d’oeil ;
Plus fort que soi.
L’attraction aveugle.
Épidermique.
Du miroir.
La Reine fausse mère tous !
Bien plus que
Blanche-Neige.
Miroir mon beau miroir
En silence
Et pourtant.
Les yeux dans le dos
S’animent,
Se prennent pour
Mouche
Et tirent les ficelles et visses
Vertébrées ;
Rotation
Pivotage,
Le dos crisse dans ses
Gonds,
Prêt à en
Sortir,
Effaré,
Outré ;
De ce changement de cap
Inopiné.
Le miroir aspire
La volonté
De tout un corps.
La mécanique
Obéit au plus
Offrant.

L’on finit par
Se
Retrouver ;
Face au reflet
Hypnotique.
Happé,
L’on cherche,
S’approche,
Zoome
Puis dé-.
Cherche encore
Chien avide ;
Affamé
De réponses.
Se retient de
Couler,
Coller au verre,
Perdu entre
Dedans et hors.
Dernier cliché
À bout portant :
Regard hagard,
Qui es-tu ?
Frisson du
Néant
Ironique
Qui traverse
La scène.

L’étranger range
Son rire
En coulisses.
Il ronronne
Nuit et jour.
Et l’on l’oublie.
Lalalalala
Les doigts dans les oreilles.
Jusqu’au prochain
Rencard.
Où l’on
Dérivera
Un instant,
Entourloupé
Dans les impérieuses
Arab-
Esques.
Du miroir.

jeudi 29 novembre 2018

Homme politique et sa pyramide sans pieds

Les mains en pyramide,
Chaque doigt et son jumeau,
L’un contre l’autre
En pulpe,
Fort de leur symétrie
Carrée,
S’élevant au-dessus de
La table,
Survolant,
Planantes,
Sans toucher,
Sans pilier,
Seulement des bras lointains
Incertainement
Déposés sur le bord,
Désappuyés,
Léger point de contact
Glissant
Prêts à
S’enfuir
Au fond des poches.
La pyramide de doigts,
Rassurante,
Ferme et nette,
Mais
L’iceberg s’étend
En-deçà sans limites.
Fondations
Mortes-nées.
Pyramide hypnotique
Et
L’angle aveugle
Le dessous des
Cartes.

L’homme digne politique
Ne se départit
Pas
De sa pyramide
Anti-sorts.
La range quand
Joue au gentil gendre.
La brandit quand
La question fâche.
Il n’est qu’un
Magicien en toc,
Au geste
Éculé,
Aux formules
Décaties,
Circonvolutionneur
Contorsionniste
Ridicule.
Derrière les mains et doigts
Sérieux,
La mine sans vie,
Le corps s’emmêle,
Les pieds jusques aux jambes
Tressés
Pour peu que !
Passés sur la nuque,
Souplesse intrigante
Terreau de toutes
Les folies
Du spectacle.
Imperturbable
Demeure la pyramide de doigts
Au bout des bras
Sans bouger,
Sans toucher
Toujours.
Bientôt,
L’usurpateur sorcier
Se mue
En fakir exotique.
Décolle de toute
Attache
Et
Homme-tronc,
Plié
Comme un papier
Frivole
Crie au miracle
Et
Jesus-Christ.
Mais voilà un nom
Qu’on ne prononce pas
Même si.
Rédempteur
Sauveur
Miséricordieux,
L’homme digne politique
Sorti de son cirque
Éthéré.
Souffle dessus !
Et s’évanouit.
Juste sur ta rétine,
La jolie pyramide.






mardi 27 novembre 2018

Grande cheffe

Elle claque des talons,
Roule sa langue
Poings serrés
L'oeil en flamme.
Elle
Crie
Scie
Visse
et
Martèle
Maçonne.
Toujours bruyante.
Toujours tonnante.
Elle
S'avance
Se prononce
Invective
Montre du doigt.
Elle
ne se démonte
ni ne dévie
ne se défend.
Elle
Assène
Insiste
Gave
Jusqu'au foie
Gras
Nausée.
Toujours braillante.
Toujours taillante.
Elle
Fait trembler
Les timides.
Elle
Horripile
Les francos.
Elle
Eloigne
Les pacifiques.
Ne reste que les
Guerriers,
Amoureux du
Combat en
Armes,
Attaquants désinhibés.

Le soir venu,
Célibataire proclamée,
Elle s'enferme
Seule
et
S'affale en
Lamentin spongieux,
S'imbibe,
Dilate,
Dilue.
Elle
Brouillonne
Titube.
Enfin tranquille
Enfin fragile.
Elle
Joue
Rit
Ronfle
Comme un sonneur
Inconscient.

Demain matin,
Elle sera
Regonflée,
Haute et
Altière
Sur ses échasses
Fatales.
Sans repentir.
Gagner plus vite encore.
Plus gros.
Plus grand.
Sans jamais retourner.

lundi 26 novembre 2018

Confiance, d'entre les morts

Croix sur
L’insolitude.
Barrée.
Deuillée.
Enterrée.
Je et je seule.
Pas vraiment moi.
Mais pas eux
Jamais nous.
Vous tu elles.
Chacun.
Pré carré.
C’est comme ça.
On avait dit que jamais
On ne la dirait
Cette phrase honnie
De connerie sidérale.
Mais elle est tombée en
Couperet
Salvateur.
Arrête les frais.
N’attends pas tant.
Seul et seul.
C’est comme ça.

Tranquille nageant
Dans cette belle
Certitude,
Oui mais voilà
Qu’un jour,
Seul se fait
Insoutenable.
Hurlements intérieurs
Et
Chairs à vif.
L’ultime non-retour
Bravé.
Et sans les mains tu crois ?
Seule et sans appel ?
Parce que tu dis
C’est comme ça ?

Juste à côté,
De moi,
Attend celui qui voudrait
La belle confiance
Morte et
Oubliée.
Il dit que
Si l’on aime,
On ne compte pas.
Sauf que ma tête
Rétorque
Du tac au tac
Que le monde compte tout
Toujours et encore.
Elle tourne
Boucle le
C’est comme ça
Qui jamais ne
Déçoit.
Sauf que ce jour
Où Seule est
Une inhumaine croisade,
Je me mets à
Entendre que si l’on aime
On compte moins.
Alors à mon tour,
Je cesse de compter.
Les nombres
De toute façon
S’emmêlent
Et me trompent.

J’appelle.
J’attrape.
J’agrippe.
Et ses mots
Et ses bras trop forts
Réveillent
D’entre les morts
Ma confiance
Déconfite.
Éberluée,
Elle s’érige
A nouveau
Et éclate de rire
Tonitruante
Et
Conquérante.
Elle s’incline
Pourtant
Devant son
Révéleur.





Immersion

Le sable en pente
Souple
Me porte
Jusqu’à l’eau.
Éthérée,
Limpide,
Et vite,
Gloutonne
Et sombre.
Mes pieds hésitent,
Ruent,
Se retournent
Sous moi,
Je deviens cubiste
En chair et en os.
Les yeux vers l’horizon
Les panards remontent
La grève,
Moulinent dans le vide,
Et la machine se met à
Fumer.
C’est les bras qui
Rament dur
Et rescoussent
La tête droit devant.
Le corps
S’allonge,
Tiré de part et
D’autre.
Élastique fantastique.
Tordue,
Difforme,
Chaque pas est
Un géant
Improbable.
Il peine.
Il plainte.
Il grince.
Il couine.
Il fume encore.
Et encore.
Hoquète.
Mais imperturbable,
Pas après pas.
J’avance.
Je ne sais ni
N’entends
Comment.
L’eau à mi-corps,
Nombril névralgique,
Je stoppe net,
Continuant à
Tourner sur place.
Tout le monde
S’arrête,
Au pied du mur.
Jusque là oui,
Cahin caha.
Mais jusqu’au cou,
Il faudra s’accorder
Et nager de
Conserve ou !
le sable et les eaux se feront
Mouvants.
D’un seul trait,
D’une seule trempe,
Sans guingois
Ni boiterie.
La valse harmonie
De rigueur.
Juste suivre le temps,
Suivre le ton,
Le timbre
Et s’y couler,
Chacun et tous
Pour revenir à
Ne former plus qu’un.
Les pieds renoncent
Et sautent le pas.
Jettent les dés
Et lâchent
Terre ferme et sa
Naïve sécurité.
L’autre,
La vraie
Entière et
Vagabonde
Se fait
Jour,
Téméraire,
Non !
Juste désirante.
L’immersion arrive
Comme un chat.
Pas vu le coup venir
Et zouip je suis
Au coeur du
Rapide
Vire-
voltant.
La tête sur les épaules
Et les pieds
Frétillants.



De tortue en lion : Les Familiers Fantastiques (5)

La grande muraille
De
L’impossible
Se dresse.
Non sans avoir
Fort claironné
Sa venue.
Pas de surgissement
Volcanique.
Elle a poussé
Tout doucement,
Eclôt
Minute après minute
En douce fleur
Empoisonnée.

Elle
Se dresse,
N’étouffe pas,
N’enferme pas,
Armes grossières
Qu’elle dédaigne.
Elle se troue
Même
En filet
Mou
Ajouré,
Dentelle au vent
Tranchante
Castra-
Trice
Perforeuse
Robe flottante
Chantonnante
Aux quatre
Vents.

Tu lui fais
Face,
Malgré toi
Ton désir tirailleur.
Tu sors ta
Carapace
Chauffante
Ronde et
Gironde.
Plus que ta tête et
Tes pattes
À l’air,
L’organique à
Couvert.
En tortue
Digne du nom,
Tu as perdu ta grasse
Vivacité
Charnue.
Sec,
Craquelé,
Sans lèvres
Et sans ourlures,
Imberbe,
Le filet a imprimé
Ses carreaux
Reptiliformes.
Peu à peu,
Même les cinq
Derniers
Bouts
Décarapaçonnés
Se retirent en
Coquille.
Tu refroidis.
Tu désertes le
Monde.
Et tu revis
Sous ton dôme
Bercelant.
Tu souris de
Douceur.
Tu respires
Ralentis
Et
Le calme.

Tout bien
Plié
Au creux,
Ta retraite
Soudain
Touche
Le fond.
Recroquevillé
Au sol des
Mers,
T'es yeux s’ouvrent
Presque
Brutaux.
Et ta tête surgit
De son antre.
Le silence
Abyssal
T’enveloppe
Et dans un aboi
Inaugural
Et grave
Remplit l’espace
Aveugle
Qui t’avait
Recueilli.

La carapace
Tombe.
La mue
D’un claquement de
Doigt,
Féerique
Improbable.
Le sourire élargi,
Le réel se retourne
Comme un gant.
Rapide et sûr,
Entier,
Tout contre toi,
Tu remontes en surface
Et planches au ras
De l’air.
Te voilà de retour
Au jour
Et roi de la
Jungle.

Tout ton corps
T’appartient,
René d’entre les
Mers.
Maître ;
Puissant,
Tu te tapis
Grondes
Sourdement
Et les yeux brillent
Quand les babines
S’enroulent
Et
Tapis rouge
Au défilé de
Crocs
Rapaces.
Les mâchoires se
Tendent
Et avancent
Les
Premières,
Au bout de ton cou
Ambitieux.
Silencieux
Majestueux,
Tu glisses
En muscles ronronnants
Sur
Ta
Proie
Désignée.
La grande muraille
De
L’impossible,
Filet chasseur
Infranchi a
Dispa-
Ru.
Tu l’as même
Oubliée,
Oublié
Et tu brilles
Sans éclat
Impitoyablement
Pourtant.
Recule. Recule !
Assénés-tu à
Cet autre
Qui écarquille
Les mirettes.
Les bras ballants,
Il cherche la tortue
Enfouisseuse
Qu’il combattait
Confiant.
Tu rugis maintenant
Et achèves
Le combat.
Tu as tracé
Ton
Nouveau-né
Territoire.
Tu flambes
De fierté
Et
D’espoir.









vendredi 23 novembre 2018

Tendre hérisson : Les Familiers Fantastiques (4)

Les yeux s’ouvrent
Rond
Ni grand
Ni haut,
Tout rond,
Roule bille,
Les sourcils ^
Ouverts au ciel.
Le nez rondit
Aussi,
Presque s’allonge
Sans Pinocchio,
En pinceau doux
Et petite bulle
Juste tout au bout.
Les lèvres s’ourlent
En-dedans
Et le mince fil se
Tait
Timide.

Sur ce visage
Connu et reconnu
A surgi
Hérisson,
Sans le corps,
Sans les piques
Oh si !
Enroulé sur soi-même,
Comme le petit
Rondouillard
Cochonnet juché
Sur la truffe,
Immobile
Indécis
Le regard questionneur.
À moitié
Enfantin.
À moitié
Faux naïf.
Les angles tous
Gommés.
Tes bras s’ouvrent
En même temps que ses
Yeux
Et enveloppent
A leur tour
La bobine
Rebondie.
On ne résiste pas
A l’art du tendre de
Hérisson.




jeudi 22 novembre 2018

Hyène : Les Familiers Fantastiques (3)

Il est tard,
Chien ou loup,
Ni jour ni nuit,
Dans un coin de couloir.
Elle a fui
Vite
Loin des lumières
Absente au jour.
Elle sort
Quand l’ombre
S’épand.
Imprenable,
Masquée,
Dos rond,
Sans fanfares
Sans rugir,
Elle s’approche
En crabe.
Stratégique,
Brouille les pistes,
Crépuscule,
En douceur
Et puissante.
Air de piétonne
Dans un coin de couloir,
Règne
Dans la tombée des noirs.
Enfin son univers,
Un monde à
Sa mesure,
Déconvenu.
Elle ne règne
Ni ne brille.
Même en nuit
Reste sombre,
De guingois,
Sans fierté.
N’attendez pas qu’elle crie,
Hurle,
Se montre.
Elle est bien assez là
Comme ça.
Mine de rien,
Elle ne joue pas.
Elle ne tourbillonne
Pas.
Elle n’entre dans aucune
Danse.
Elle reste
Etrange,
Interdite,
Pas assez belle,
Pas assez bien
Pour les autres
Effrayés peureux
De sa drôlerie
Dos rond
Inharmonique.
Dans le coin de couloir,
Un clair,
Laisse cingler
Ses crocs
Et claquer
Sa mâchoire.
Fatale.
Éclair de canine,
En cape draculique.
Morsure
Bavure
Impeccables.
Elle rit.
Sans spectacle.
Elle rit.
Elle règne.
En invisible.

lundi 19 novembre 2018

Matin d'étoiles

Matin de nuit,
Noir enveloppé
Etoiles du jour
Endormies
Encore,
Brillent déjà
Dans leur sommeil
D’hiver.
Je trépigne
A ce spectacle
De promesses
De tous ces éclats
En puissance.
Calendrier de l’Avent
Impatiente ;
Tout ouvrir
Sur un coup de tête
Tant attendu
Chéri
Et libérer
Réveiller
Les allumeuses
En dodo.
Le jour éclaboussera
Multicolore lumineuses.


samedi 17 novembre 2018

Trapézistes du monde

Soupape
Soupire
Soupèse.
Les yeux en-dedans.

Eclaire
Éclate
Éclipse.
Les yeux tout dehors.

Fouille
Fouine
Flaire.
Les yeux tout au fond.

Crie
Créé
Croit.
Les yeux de mille feux.

Pense
Panse
Pense.
Les yeux enroulés.

Chante
Chasse
Chance.
Les yeux dévoilés.

A la lisière des mondes.
Plongés, s'envolent.
Les yeux roulent
Toutes les bosses.
Invisibles profondeurs.
Spectaculaires voltiges.
Trapézistes innés.



Les familiers fantastiques (2)

Loin de toutes les terres fermes,
Les globules à fleur d’eau,
Je surnage
Juste en-dessous
Juste sous le zéro
Du bord.
Sous le zéro
Du sable,
Du sol le plus bas.
Juste les yeux
Dépassent
Mais le reste
Se cache.
Je prends mille
Précautions pour ne
Pas toucher terre.
Pas rêveuse non.
Je m’enfonce
Dans l’eau tranquille
Jusqu’aux pupilles
Alertes.
Je sens par moments
Les écailles
Et le long corps
Rocailleux
Me prendre.
Ma mâchoire se fait
Puissante.
Mes yeux brillent.
A l’abri de mon eau,
Je suis invulnérable.
Je suis mon propre
Gardien
Armée aux dents,
Le sang froid.

Loin des terres fermes,
Je n’ai plus peur.


mercredi 7 novembre 2018

Les familiers fantastiques (1)

Comme un chat
Il féline
Habilement,
Trace son pas
À sa patte,
Sans queue ni
Tête,
Rien d’humaine.
Il faufile
Le monde
Son propre texte
Et ses
Noeuds.
Je le chasse.
Tu le suis.
Toujours à cours.
Il a l’échec et mat
Et quatre coups
D’avance.

La danse
Du chat-faufile.

Tu l’aperçois au coin
De rue,
Une patte velue
Mais sans
Moustache.
Un bout de crâne
Chauve comme un œuf.
Tu tressailles
Et te tais,
Bouche bée.
Tu te lances
Trop tard
Entre les murs.

La danse
Du chat-chauveux.

Je le vois
Couler
Dans les yeux
De l’ami bleu
D’horizon.
Les fentes
Couleuvrent
Ses iris.
Je le secoue
Brutal,
Trop tard,
Jeu de la porte
Et son plafond,
Glisse le
Siffleur
Oreilles pointues.

La danse
Du chat-serpente.

Chacun
Croise sa route,
Chaque jour
En éclair,
Chat-monstre
Chimère
Chimie d’alambique,
Faune,
Fileur
Filant.
L’insaisissable
Fabuleux
Animal
Omnivère
Vivipore
Mammifare,
Fantasque
Stratège.





mardi 6 novembre 2018

La déferlante

Les lèvres serrées pour
Ne rien vomir.
Ne rien trahir.
Tous les mots butent
Bien en amont
Du fond des
Gorges.
La poitrine
Brûle,
Prévisible,
Les mots encore une fois
Hébétés
Restent
Indésirables.
Ils sont priés,
Appelés de tous vœux,
Ils se jettent
Émerveillés
A nouveau
Dans la mêlée,
Ils sont des millions,
Toujours plus
Au rendez-vous.
Ils butent contre
La gorge
Infrangible.
La déferlante
Stoppe net,
Cognée de plein fouet.
Ils s’entregardent,
Encore n’entendent pas,
Les clairons ont
Sonné ;
Ils n’ont pas droit de
Cité.
Ni les uns plus que d’autres.
Tous les mots sont
Saqués.
Appelés fanfaronnés
Puis
Enthousiastes ne font qu’un
Fichés sec.

Ils grondent
Depuis quelque
Temps.

En gorge
Face à ?
Miroités ?
Étourdis ?
Le cul par terre.
Ils ne sont face à
Rien.
Rien,
Un rien,
Deux riens,
Trois riens,
Dansons la capucine !
Juste
Interdits,
Appelés aussitôt
Réformés.

Mais les années
Énervent
La masse des mots.
La révolte
Roule
Et
Affrontera
La gorge
Sans fond
Ni tours.
Ils jetteront
Leurs forces
Tout en avant
Et
Se répandront
Sans pudeur.
Criards s’il le faut,
Aux airs de fous,
Qu’à cela ne tienne !
Sales,
Asociaux,
Ou
Simples,
Peut-être,
Témoins d’un
Silence
Stupéfiant de
Bêtise.
Un rien
Automatique
Qui décennies durant
A cru
Son pouvoir
Implacable.

La déferlante
Aujourd’hui même
Te hurlera
Ses sens.
Les mots
Révolutionnent.

Prêts depuis dix mille
Lunes...
Partez !










samedi 3 novembre 2018

Olivier Liron, Einstein, le sexe et moi - Alma Editeur

Un Question Pour Un Champion sautillant, comique, déluré même. L'arbre qui cache la forêt du passé. Olivier Liron dans son roman Einstein, le sexe et moi nous entraîne dans un cerveau et tout un être pas comme les autres. Voyage au coeur d'un intrépide "anormal".
 
        Olivier est un concurrent dangereux pour ses adversaires dans ce fameux Question Pour Un Champion qu'il dispute ce dimanche après déjà plusieurs victoires. Le jour J, l'attente, les diverses prises, les différentes épreuves se succèdent. Et Olivier nous les décrit par le menu. Toujours optant pour un second degré comique, il met en scène véritablement le jeu qui se déroule, les larmes de l'une, les encouragements de l'autre à son égard, la frustration changée en sadisme du perdant qui opère sa remontada. Nous sommes immergés dans ce microcosme qui peu à peu nous semble moins comique et plutôt très humain. Grand classique des mouvements du groupe humain. Une danse, des clans, des oui et des non, un leader extatique ou tranchant. Le personnage de Julien Lepers est particulièrement affiné et ne peut nous laisser de marbre.
La malveillance n'est pas de mise ici. Il s'agit de dévoiler le comique de tout un chacun et c'est un succès. Cela donnerait envie de participerait à un QPUC une fois dans sa vie. Oups pardon ! il faut tout de même être une encyclopédie ambulante. L'incongruité des questions et de leurs réponses, auxquelles rarement nous pouvons répondre ajoute encore à l'humour qui traverse ce roman.
     Nous avons donc là un axe de récit du genre bouffon, dans tous les sens du terme. Et cela n'est pas sans nous rappeler (cela n'est peut-être qu'une subjectivité isolée qui entrevoit ce parallèle, cela n'empêche en rien d'avoir envie de la partager n'est-ce pas ?), le dernier roman de Jérôme Ferrari, A son image ( Editions Actes Sud). Vous me direz que Mais précisément cela semble être tout le contraire ! Quel rapprochement peut bien valor d'etre écrit ici ? Eh bien, c'est cette trame narrative qui sous-tend en permanence le récit,  laquelle on revient quand il le faut, dont on s'éloigne quand on le peut. Mais en effet, il y a d'un côté la trame d'un requiem, de l'autre celle d'un jeu télévisé. Les trésors d'incongruité de l'esprit n'ont pas de limite. Toujours est-il que l'on peut voir dans ce roman un cousin comique et farfelu à celui de Jérôme Ferrari. Espérant ne choquer personne car bien au contraire, il semble important de pouvoir faire se cogner ceux qui se distinguent tant. Une petite iu une grande magie en ressort souvent.

       Au cours du récit, on ne peut nier que l'exagération comique est à tous les rendez-vous. Certes mais au bout d'une centaine de pages, ne se demande-t-on pas s'il est véritablement question d'exagération ?  Derrière cette dernière, nous revenons au bouffon cité ci-dessus, une réalité émotionnelle se dessine. Sinon, l'on ne rirait pas. Une espèce de tragi-comique digne d'une pièce de théâtre voilà ! Nous sommes par moments tout simplement au théâtre. Ave toutes ses ficelles et ses finesses.
       Cependant, il y a les apartés. Il y a ces arrêts sur image. Le temps s'étire alors et le jeu est sur pause. Il y a donc des allers-retours, des changements de rythme sans pitié pour le lecteur qui doit redémarrer en trombe quand le jeu recommence et ne pas contineur de courir quand le souvenir s'invite. En effet, Olivier nous raconte ses souvenirs de famille, d'école etc., dans l'ensemble exactement non-comiques. De fait, ils tranchent dans le vif et le lecteur ouvert et confiant assiste à de vieilles douleurs surgissant comme des sorcières de leur placard. Et nul besoin pour le narrateur de le préciser pour savoir que l'empreinte est indélébile. Ces incartades dramatiques sont racontées en faits. Elles ne sont pas l'occasion d'écrire une émotion réelle. Mais bien davantage celle d'en ressentir une. Olivier Liron parvient à susciter une émotion qu'il ne dit pas. Sans doute parce que tout cela est brûlant d'authenticité.
       Le narrateur qui mène cette danse hachée Parle de la norme, du diktat maltraitant de la norme, du "pouvoir hideux et haineux de la norme"(p. 63). La norme de laquelle il ne fait partie en rien. La norme qui lui vaut violences et négligences. La colère se change en rage de vaincre le fameux Super Champion de QPUC. Elle est bien là, tapie et le doigt sur la bouche pour ne pas être reconnue. Mais dans le souvenir, elle voudrait déchiqueter, mordre, briser jusqu'à ce que mort s'ensuive.
Il y a l'adolescence, l'apprivoisement de soi-même, la légitimité à être. Cette justesse terrifiante avec laquelle il l'écrit : "Je couchais toutes les nuits avec la tristesse d'exister.
Je n'avais pas le droit d'exister."(p.168)
Et la poésie qui sauve. Classique ? Oui. Non moins émouvante dans ce récit tout sauf mélodramatique rose layette à pompons. Et l'écriture dont on entend peu de choses mais quelques phrases qui se glissent loin en soi  "le déclenchement de l'écriture est lié à la sensation intime de l'horreur." (p.59)

         Olivier nous fait entrer dans le fonctionement de sa machine à penser, dans ses secrets, ses rythmes, se savoirs, ses ignorances, ses doutes sans aucune limite, ses questions, ses douleurs, et sa rage de mordre (au sens propre) celui qui blesse. Ce regard d'adulte encore meurtri qui ose l'assumer, les blessures d'enfant jamais guéries. C'est du passé ? Très peu pour lui. Et pourtant, le roman est drôle, rafraîchissant et le héros tout sauf aigri. Il cherche sa revanche là où il peut la trouver. 
Nous sommes sur le fil entre réel et irréel. Mais au final l'on n'a pas, je crois, réellement envie de savoir ce qu'il en est. Ce roman nous parle de nos rouages, de nos secrets et de notre rage à vivre malgré tout, en commençant par rire sans cruauté des autres et de nous-mêmes. Rire, penser, et y gagner.


Olivier Liron, Einstein, le sexe et moi - Alma Editeur - 9782362792878 - 18 Euros

mardi 30 octobre 2018

Tombe le masque de princesse

        Cléo rentre après cette belle soirée.  Pas trop de picole. Pas top de poudre non plus. Non qu’elle n’y touche pas, mais un peu trop même un tout petit peu et tout devient  si chiant !
     Elle marche souple et tranquille dans la rue qui la conduit chez elle. Elle ne se préoccupe d’ailleurs pas de savoir conduire quoi que ce soit. L’asphalte este sous ses pieds.
Les regards ralentissent et se retournent sur elle. Elle aspire les yeux qui l’approchent. Elle est de ceux que chaque jour l’on  redécouvre. L’émotion qu’elle enflamme doit céder, et le plus vite possible. Ou l’être entier prend feu et s’empoussière enfumé. Chacun possède, comme il se doit en ce bas monde, un instinct de survie. La plupart d’entre nous bien heureusement sait s’en saisir sans mode d’emploi en poche comme bouclier impitoyable. C’est face à Cléo une sorte de passage obligé. Elle n’est ni dupe ni idiote. Elle perçoit parfaitement l’effet crématoire qu’elle produit. Elle n’en fabrique une arme que si nécessaire. Plutôt, en général au jour le jour, un masque très facile.
       Comment a-t-elle attrapé ce virus ? Ce comment est si complexe que plusieurs tomes ne suffiraient. Exagère-je ? Tentez donc sur l’une de ces créatures fantastiques. Et le temps vous filera entre tous vos doigts grand experts.
       Elle, Cléo, les autres, quelle différence si ce n’est la brillance et l’intensité du masque. Ni plus ni moins. Elle n’en fait pas toute une histoire. Beaucoup aimeraient qu’elle en fasse une fabuleuse histoire. Mais la leur la vaut bien.
        Souvent, elle sObserve dans le grand miroir de sa salle de bain. Il devait être grand. Pour la contenir entière. Elle doit se comprendre chaque matin et chaque soir. Une nouvelle dis pour se rappeler son entièreté. Elle-même, aussi bizarre que cela paraisse, ressent un courant du genre de foudroyant. Elle ne sait toujours pas lui donner le bon sens et celui que les autres lui donnent à penser, elle s’y oppose fermement. Trop maigre ! Trop simple ! Trop croyant. Elle n’a toujours pas l’adéquation clairem ce cette sensation.
       Elle est donc devenue cette égérie fantasmatique ! Elle ne peut-on entier sont évidente responsabilité. Sans pour autant la définir. On ne fait jamais un quelconque effet aux autres sans en être intense partie prenante.

       Seule le soir, sans regard ni parole à venir, le masque dont tout le monde rêve qu’il tombe, choit en effet. Mais personne ne rêve ce qui se dévoile là. Elle le sait de longtemps fort longtemps. Elle se garde donc une enraierez fois et se munit de son rasoir, plus neuf que neuf. Deux allez trois jours maximum et la poubelle le reçoit. Un nouveau effilé prend la place vacant, qui en réalité n’est jamais vraie vacante.
Elle tient la lame entre délivrance  préventive et colère enragée. L’un contenant l’autre. Ce sont des sœurs non pas ennemies, bien au contraire. Irréductiblement liées et loyales. Avec la beauté qui l’anime elle, Cléo, elle se déshabille et s’apprête à trancher la chair. La redessiner à son image, sa vraie image. Elle s’assoit fesses nues Suri tendre tapis de bain,un peu poilu. Généreux. Il l’accueille. Elle s’y glisse. Elle profite de quelques secondes de cette douceur qui ensuite se perdra dans la rage orgasmique. Elle ouvre les cuisses. Toujours les cuisses d’abord. La gauche plus accessible. Elle enclenche à merveille le processus.
Cléo trace la première travée, au milieu de son membre. La douleur est somme toute négligeable. Elle descend doucement, presque délicatement le long de l’intérieur duveteux de sa jambe. Le sang ne gicle jamais. Il coule en petit ru, tout humble. La deuxième entaille entamé la ribambelle. Parallèle, des volutes déjà, toujours minutieuse. Troisième, quatrième... Des arabesques se forment au gré de la lame. Insensées. Juste rondes et voluptueuses.
Les jours de grande terreur, les traits se font plus secs et parallèles. Le soulagement est alors immédiat. Nécessairement immédiat.
Chaque jour dessine sa peine.

     Le ventre, l’incontournable. Il est point d’orgue de l’aventure. De petits coups, petits morsures un peu partout, pointilliste. Et toujours in moment une immense balafre qui transverse. Essayer de l’extraire du monde, de lui interdire de sortir de sa minuscule cage que peut-être déjà, il ne mérite pas.
Le coup final n’est pas fatal mais il signe le bas de page du rituel. Elle se place en tailleur sur le tapis-peluche. Elle lui sourit, un peu bêtement. C’est important. Elle le caresse.
Le sang ? Elle en fait son affaire. On croit à bien pire que ce n’est. Chacun voit midi à sa porte.
       Elle respire fort, aussi fort que tout l’air, les mains englouties dans le tapis. Plus aussi doux, déjà, que tout à l’heure. Mais le souvenir nourrit.
        Elle se lève d’un bond. Fort et déterminé. Elle s’appartient, se lave et finit la soirée, on ne peut plus classique. Elle peut sourire sans feindre. Personne ne connaît cela, sauf son tapis-peluche et l’énorme air qu’elle a tout pris.

         Demain sera un jour comme précédent et à venir. Elle sera masquée, fascinante et rayonnante. Et tous l’aimeront de rien.




lundi 29 octobre 2018

Samuel Benchetrit, Reviens - Editions Grasset

Un livre du quotidien et de ses frasques tout aussi banales que déroutantes


      Samuel Benchetrit nous propose une lecture de la banalité, de notre banalité à tous. Un homme qui pourrait être lui, ou n'importe quel autre écrivain en panne d'inspiration, divorcé seul, son fils parti découvrir le monde. Un ex-conjoint, un père normaux. On commence par lire ce roman sans forcément y déceler autre chose que ce quotidien relativement déprimant et sans relief. Le narrateur nous endort avec ses jours gris. 
Puis au fil du récit, cet homme plutôt antipathique revêt bosses et crevasses plus complexes qu'il n'y paraît. Peut-être de cette manière suit-on la connaissance de plus en plus approfondie d'un être apparemment insipide. Agaçant aussi, disons-le. 
      Sous cette première couche du gros oignon que constitue ce personnage bien emmitouflé dans sa déprime et ses malheurs ordinaires, une ironie parfois alambiquée se fait jour. Ce regard aigu sur soi-même qui nous rend toujours ou presque, même si nous ne voulons pas nous l'avouer, un personnage plus agréable. Il a aussi cette tendresse d'un père pour son fils. Chose commune et souvent écrite de nos jours mais qui reste touchante. Il y a surtout cette relation absolument paradoxale avec son ex-femme qu'entretient notre héros. Un attachement nécessaire, pour l'un comme pour l'autre, et non seulement autour de leur fils. Egalement pour chacun d'eux en tant qu'individu. Cet attachement brutal, vif, tranchant, sans filtre donc comique pour qui en est le spectateur. Le narrateur n'est pas sans souligner cet aspect humoristique de l'histoire.
       Peu à peu, le récit devient de plus en plus farfelu, semblant prendre un chemin sans issue. Pourtant c'est bien ce chemin-là inattendu qui mène à des nouveautés qui détournent une vie de l'axe qu'elle suivait jusqu'alors. Il se met à parler à un canard et à lire en public l'œuvre de son pire ennemi. Le farfelu, l'incongru, l'innommable : les voilà tous là et la mayonnaise prend fantastiquement bien. L'on rit et se sent ancré.
      Samuel Benchetrit pose le tableau quelconque d'un homme qui deviendra un petit héros du quotidien. Juste à parvenir à donner vie et sens aux choses qu'il n'aimait plus.
        L'on retient de ce texte la capacité à nous surprendre de Benchetrit. Un récit fluide, aisé, tantôt passif, tantôt sautillant et d'un coup, une sortie sur l'existence, les gens, notre monde. D'autant plus saisissante que parfaitement qu'inopinée. La fin du roman en est une illustration parfaite et à rebours tout ce que vous venez de lire s'ouvre sous de nouvelles lumières.
   

Samuel Benchetrit, Reviens - Editions Grasset - 9782246784029

Antoine Wauters, Pense aux pierres sous tes pas – Editions Verdier

Pas à pas, pierre à pierre, survis et peut-être un jour...


Pense aux pierres sous tes pas : une dystopie tranchante où l'enfance se permet la folie, la seule qui sauve. Nos normes, nos règles volent en éclat et Léo et Marcio, les jumeaux, nous tiennent fort la main pour nous conduire dans ces méandres de malheurs ineffables, émerveillements, renouveau. Ne pensons nous aussi qu'aux pages sous nos yeux, petit à petit.

         Pense aux pierres sous tes pas, une pierre après l'autre, un pas après l'autre. Ne regarde pas plus loin ni plus haut. Ne regarde pas l'horizon. Il a disparu. Ou n'a peut-être jamais été.
C'est suivant ces préceptes que Marcio et Léo vivent dans la ferme misérable de leurs parents. Ils travaillent tous les quatre du matin au soir, sans récompense, sans plaisir et surtout sans amour. Madame regrette sa maternité chaque jour davantage et Monsieur hurle et frappe. Madame ne s'en prive pas du reste. Les jumeaux, à défaut d'être aimés des adultes, s'aiment de toutes leurs forces d'enfant. Ils s'aiment plus que de raison. Mais où est passée la raison ? Ils n'ont qu'eux à aimer et se serrent le plus fort possible pour encore avoir envie de vivre. La misère, la pauvreté, l'épuisement, la dictature, le désespoir partout sauf si l'on regarde juste les pierres sous ses pas et que l'on aime son frère ou sa sœur d'amour fou.
        L'on peut se dire que mettre en scène deux enfants, gémellité à l'appui, toujours un peu fascinante, maltraitance (terme tout à fait inadéquat dans cet univers mais c'est celui qui nous aide nous lecteurs d'ici maintenant à entendre la blessure) des enfants, des adultes, vie sans issue, et l'amour que quelques personnages portent et qui traverse le désespoir , l'on peut dire que tout cela annonce un roman bien pathétique voire peace and love mélodramatique. Bref, un roman baveux de bons sentiments à grands renforts de douleurs. Et pourtant, malgré ce risque que prend Antoine Wauters, risque certain, Pense aux pierres sous tes pas ne tombe jamais dans cet écueil. Jamais. L'écriture est sans blablas, sombre, violente, de cette banale violence qui laisse coi. Le thème est potentiellement doucereux. Le façonnage en est proprement rugueux.
Et à chacun, s'il est honnête, d'y reconnaître la violence, le mal banal de l'existence.

       Dans cet univers dystopique d'abord puis en métamorphose par la suite, de nombreuses problématiques sont abordées. On les entend d'emblée. Elles ne sont pas cachées. L'auteur ne perd pas son énergie à masquer ses intentions. Il est transparent. Et cela n'empêche pas le roman de véritablement en être un, qui nous entraîne avec des personnages qui tournent la tête parfois.
La misère qui engendre la misère, l'anormal-normal catégorie fictives et nécessaires à nos têtes pensantes, l'instinct de survie que nous éprouvons souvent peu de nos jours mais qui se terre là, le monde à l'envers qui pourraient nous pendre au nez. Antoine Wauters nous claque son univers et le fait survivre puis muer devant nos yeux incrédules.

         Un accent sur l'écriture de l'enfance mal-aimée. Pas de bêtises revendicatrices. Mais deux enfants qui rivalisent avec Rémi sans famille et Oliver Twist et pourtant ne nous font jamais pleurer. Leurs tours de passe-passe pour sauver des miettes de plaisir et de joie. L'auteur écrit l’ambiguïté folle des relations et du rapport au monde quand « en tant qu'enfant, vous ne mesurez jamais à quel point votre vie est sinistre. » (p.69) Les yeux sur les pierres et le nez dans le guidon. Un mélange de malheur indéniable et de bonheur véritable se construit au fil des pages sans qu'on puisse en démêler l'écheveau. Mais il n'y a rien à démêler. Cette justesse de l'équivoque. Le flou absolu qui ne se défloute pas mais s'observe et se partage.

         Dans cet indéchiffrable, le narrateur surgit de temps à autre, avec les notes de bas de page pour prédilection, et dénorme aussi notre lecture.
Ce roman effondre notre monde.


Antoine Wauters, Pense aux pierres sous tes pas – Editions Verdier – 9782864329879 - 15

samedi 27 octobre 2018

L'Ane qui rêvait de la ville

Monsieur l’Âne
On lui bat et rebat
Les oreilles,
Dieu sait qu’elles offrent
Place,
De ces collines
Verdoyantes
Fluorescentes même
Parfois.
Tous s’en réjouissent.
Il s'en chausse
Ses noires lunettes.
Riez riez...

Un jour de mauvaise
Souche,
Lunettes crochées,
Il rencontre,
Pas les premiers bien sûr,
On vient chercher
Dans ses collines
Rageantes un
Aaaaah bêtifié
De magnificence.
Il y en a même qui !
S’asseoit pour
Contempler.
Il s’en détourne
Écœuré.
Mais ce jour-là,
Deux petits
Peut-être plus grands que lui
Certes certes
Ne faites pas les nigauds à
Ne pas comprendre
Ce petit-là,
Blondinets
Les beaux yeux clairs
Grand ouverts,
Rigolards,

On sait pas trop pourquoi,
Dans les sabots
Quelque chose d’un peu
Flotaillons.
Ils sont drôles
Et il
Rit rit rit rit
De bon coeur !
Ah ce coeur
Derrière ses
Grandes lunettes.
On en connaît d’autres
N’est-ce-pas ?...
Des maîtres et des voix.
Bref, il en fait tomber le
Masque
Et accourt.
Ne s’attaque pas
D’emblée à la femelle
Humaine,
Il sait qu’il y perdra.
Il trotte jusqu’au petit blondinet
Tout à fait à sa taille.
Ils se vont à ravir.
Il le regarde.
Ca y est !
Il a choisi celui-là
Qui
L’emmènera enfin
Loin
Des uniformes
Vallons de nature.
Lui,
Pour sûr,
C’est un âne des cités.
Il rêve
Asphalte et pompimpon.
Lui l’y conduira.
Il se rapproche.
Il se frotte.
C’est ambitieux.
An tout bien tout honneur.
L’autre ouvre des soucoupes
Bleu-vert
Qu’on n’aurait pas soupçonnées.
Les humains sont parfois
Saisissants.
Il se défend un peu.
Ah oui la distance de sécurité.
Monsieur l’Âne s’est
Emballé.
M’enfin quand on trouve son hôte,
Le feu sacré prend aux
Tripes.
Quand même.
Il est le mieux élevé
Possible,
Trotte le plus régulièrement
Possible,
Évidemment aucune ruade,
Pour qui le prenez-vous ?
Son sort est dans les mains
Du gentilhomme
Et de sa belle.
Séduire la belle,
À ne pas négliger quand
Le mâle sera
Ferré.

Nous marchons côte à côte.
Je suis béni des dieux.
Il semble au plus mal.
Je cherche l’harmonie,
Partenaire.
Mène-moi
Au bout de ton monde !
Je suis un Âne des villes,
Pense à La Fontaine,
Il y a de tout pour faire un monde,
Merde alors !

Je tairai la chute
De mon épopée
Embryonnée.
Il gueule un coup
Et je cavale dans l’autre sens
Affolé.
Pas un aventurier
Tout de même.
Et nos chemins se séparent.
Les signes ne trompent
Pas.

Mais qui sait ?
Les grands yeux clairs
Pourraient
Me retrouver.
L’Âne à lunettes fumées.

Alexis Brocas, Un dieu dans la machine – Editions Phébus

Un dieu dans la machine : l'épidémie de l'esprit

Il revient avec panache dans une société qui l'avait mis de côté. Il travaille dans une entreprise dont il doit tout taire. Il aime sa fille à en risquer sa vie encore et encore. Pourquoi ? Pour qui ? Un roman de science-fiction, un roman d'aventure, un roman contemporain. Peut-être ou pas. Alexis Brocas construit un univers où tout se questionne, d'aujourd'hui jusqu'à l'infiniment grand.

      Avec « Un dieu dans la machine », l'on peut s'imaginer tant de choses. Et l'on aura raison d'imaginer ce roman prendre tant de chemins divers. Quel dieu ? Pour qui, où, quand ? Quelle machine ? Que de mots qui résonnent avec ce titre. Et aussi riche que peut être notre élucubration, l'est la narration d'Alexis Brocas.
Pour être tout de même un peu plus précis, voilà un roman proprement d'actualité.
Il s'agit de la machine, la chose qui fonctionne dans sons sens premier et qui se manipule, puis ses pouvoirs qui questionnent la main qui joue, à qui elle appartient. L'homme face à cette machine : face à elle ? avec elle ? contre elle ? L'aimer, la craindre, l'adopter, la défier, autant de questions qu'on ne peut manquer de se poser.
Il s'agit également du rapport que nous entretenons avec le réel. Le nous de tout âge, avec la particularité de l'adolescence qui mêle étroitement réel et fiction ainsi que technologie. Rien de virulent ni de véritablement dénonciateur. Interrogeant avec originalité.
      Il s'agit enfin de la relation d'un père et sa fille Emma, des mouvements de la vie qui les éloignent et les rapprochent successivement. D'un père plutôt absent puis salvateur. D'un homme blasé ou prêt à tout. Des imprévus et des schémas classiques au contraire. D'une vie qui ne se commande pas. Et par là même, de l'inquiétude tenaillante d'un parent pour son enfant. Un peu insensée. Et tout à fait inévitable, aussi rationnel que l'on tente d'être.

       Notre société est moquée. Le jeu de la mort, le spectacle et le secret en permanente concomitance, le spectacle de l'ultime combat, traversent le roman. La gladiature, finalement nommée, est ce qui définit l'ici maintenant. Alors sommes-nous bien toujours ces Romains qui attendent le verdict de leur empereur en nous délectant du spectacle des Jeux ? La réponse est peu équivoque. Le tout n'est pas de juger quiconque, ce que nous sommes, ce qu'ils furent, même si la révolte du narrateur surgit parfois, mais de ne pas non plus préjuger de notre grandeur.
     La folie des grandeurs qui nous poursuit, que nous poursuivons et qui est bel et bien la plus grande des folies. Thème on ne peut plus classique. Évidemment. De fait, toujours aussi actuelle.

     Il semble important d'évoquer plus spécifiquement la forme de ce roman. L'auteur prend le temps d'établir son univers. Un monde dont les limites avec le nôtre, soi-disant réel sont floues. Il s'efforce tout en douceur de bâtir ce monde qui prend temps et espace, s'étale et finit par nous devenir familier. Même si le héros, sa fille, son ex-femme qui nous parlent demeurent étrangement lointains. Le mystère est distillée tout en finesse. Pas de livre à suspens. On ne sursaute pas. On ne s'impatiente pas. On ne veut pas absolument savoir la suite. Mais un plomb saute dans notre tête de lecteur et une béance se rouvre. Et après ? Pourquoi donc ? C'est dans une compréhension lente, a contrario de la vitesse grand V de notre quotidien, et profonde que nous plonge Un dieu dans la machine.
     Quand l'action s'accélère, le temps et l'espace nous échappe d'autant plus. A nous lecteurs d'accepter de voir les choses nous échapper explicitement. Cachet de La Poste à l'appui.
      Alexis Brocas est hors du commun, au sens premier du terme. La narration est plus forte que les personnages. Le style est plus vivant qu'Emma et ses parents. Non qu'ils ne soient bien campés et attachants. Non, ça n'est pas cela. C'est que les vrais personnages ne sont peut-être pas ceux qu'on croit. Les humains qui peuplent son roman sont des outils de sa machine à lui. En est-il le dieu ? Pas davantage que le lecteur puisque sans lecture ici maintenant, ce roman n'existe pas dans toutes ses dimensions.
Et surtout, attardez-vous sur le style de l'écriture. Corrosif. Comique. Pudique. Tout le monde se cache et tout le monde est clair pourtant. Le style très personnel de l'auteur se jongle derrière ses mots pimentés et saugrenus. Faussement masqué et d'autant plus séduisant.
I      Il est ardu de mettre en mots une subtilité sans en faire une lourdeur. Je cesserai donc là. Lisez et vous entendrez ; l'entrechoc des images, les mots qui s'accrochent à la plus précise des prises du mur qui se dresse et les équilibres adroits qui penchent et dépenchent.


Alexis Brocas, Un dieu dans la machine – Editions Phébus – 9782752911698 - 17



dimanche 21 octobre 2018

L'ultime duel

      Elle la voit là dans son lit, pas vraiment inerte et vraiment vulnérable. Elle regarde ce corps qui a été si fier. Il n'est là plus le meilleur. Il n'est mieux que personne. Elle voit avec jouissance le mythe s'effondrer et elle s'avance vers le lit, sourire aux lèvres. 
La mère sourit en retour. Avenante. Avenante… 
Elle a poussé tiré loin d'elle contre elle ses enfants comme elle l'entendait. A son bon vouloir. Juste le sien, grand, son immense et sacro-saint bon vouloir. Egoïste, suprême, cheffe incontournable de.., elle a pris, elle a jeté les yeux comme des… , non comme ses objets périssables, remplaçables. 
Aujourd'hui, elle n'est plus en mesure de, elle doit sourire à ses visiteurs.
Elle sa fille n'est pas venue pour bavarder ni pour doucement bercer la mourante. Elle est venue pur admirer. Le spectacle inédit de sa mère déconfite. Elle s'amarre au pied du lit d'hôpital. Ne s'approche pas, surtout, d'une quelconque tête. Elle a les deux mains bien accrochées. Bien mises. Bien sages. Menteuses. Et elle sourit d'aise. L'autre s'y méprend encore. En fait, la fille se fiche de ce qui lui revient du miroir qu'on lui tend. Elle n'est plus qu'elle. 
Pour la première incroyable fois, elle n'est que ce qui grouille en elle. Elle comprend sans doute mieux que jamais ce tas d'os informe. Ici. Là. Elle est parfaitement immobile. Parfaite. Elève modèle jusqu'au bout. Tout dépend du bout. Elle ne fait rien de mieux que cela. L'élève modèle se forge son déguisement, sans le savoir et malgré lui. Pourtant c'est sans doute ce déguisement-là qui la servira le mieux. Derrière son apparence d'inoffensive crétinerie, elle rit de plaisir face à cette maîtresse cannibale. L'autre n'y voit que du feu : elle ne s'est jamais cachée de rien. Fière, fière et fière. Dame de fer en putréfaction, Mon Dieu, quelle déchéance !
La fille sourit car bientôt, elle n'aura plus de mère. Ce qui se dit tel.  Qui est écrit. Officiel. Elle sera libre. Encore plus libre. La grande folle de sa vie aura cessé de respirer. 
Elle restera imperturbable. De marbre. Souvent, elle n'est qu'un automate et cela la surprend. Alors, elle se laisse animer quelques minutes parce qu'au fond tout ça ne lui est pas égal. Rien ne lui est égal, à la sage et impassible petite écolière crétine. 
Là réside tout le problème. Et mieux vaut le marbre que le feu. 
Mais aujourd'hui, pourquoi continuer d'avancer masquée ? La folle moribonde n'en pipera mot. La force de l'habitude. Sans aucun doute. Mais elle, tout de même, elle cherche quand même quelques mots qui suffiront à tout briser : la grâce, le calme, la folie. Elle ne s'en cache pas et ne s'en est vraiment cacher : elle la brisera. Elle attendait son heure. La voilà qui gongue.
Son sourire s'épanouit sur son doux visage et apparaissent ces canines vampiriques insensées que personne n'a jamais réussi à intégrer au tableau. Aujourd'hui, elles luisent de mille feux. 
Bien sûr, elles sont toujours là. 
Bien sûr, pas davantage aujourd'hui qu'hier. Sauf que les voilà qui ne s'invisibilisent plus. 
Les chiens ne font pas des chats. 
Elles jouent les stars. Le podium s'offre à elles, les laissées-pour-compte. Voilà qu'elles peuvent s'exhiber, pointer et menacer comme elles en ont toujours rêvé. 
Elle sourit de toutes ses dents et la mère se sidère comme une proie qui enfin saisit. Son visage sans failles se fige. La petite fille sage sera la dernière. 
Les mains toujours rigoureuses sur la barre du lit, elle sourit. Et plus elle fend sa face de sa joie inédite, plus l'autre s'étrécit. Pour n'être plus qu'une fente. Stupide. Inutile. Toute sa vie, elle a attendu cette chute cette aspiration, de l'intérieur.
Peu à peu, la vieille se ride encore davantage. Ses joues se creusent jusqu'à l'os. Ses yeux s'enfoncent dans les orbites squelettiques. Elle doit faire vite avant que le cœur ne s'enroule en hérisson, truffe au fond des abymes. Irrespirante.
"Crève que je vive, Folcoche."
Les yeux toujours plus profonds ont un dernier sursaut, un sursaut bouffon qui voudrait répliquer. Mais le cœur-hérisson est en marche. La peau colle au corps qui n'en est plus un. La carcasse surgit de toutes parts.
Elle ne bouge pas d'un pauvre pouce. Elle la voit mourir enfin. 
Tout mouvement cesse. Elle détache ses mains et range ses belles dents sanguinaires. Elle sort de la chambre. Elle croise une infirmière : "un décès chambre 666."Et sans s'arrêter repart plus sereine que jamais.

Dans la rue, elle sourit aux larmes, pleine de deux flamboyantes canines.